JURISPRUDENCE COUR DE CASSATION
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DANS LES 139 082 ARRETS DE LA COUR DE CASSATION

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1 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 février 2021, 19-20.004, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 février 2021, 19-20.004, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

ANALYSE DE L'ARRET :



DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
CH.B


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 3 février 2021



Rejet

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 104 F-P
Pourvoi n° M 19-20.004









R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 3 FÉVRIER 2021
La société [...] , société civile professionnelle, dont le siège est [...] , en la personne de M. G... S..., agissant en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société Lorraine DA à l'enseigne Vital'Dis, a formé le pourvoi n° M 19-20.004 contre l'arrêt rendu le 23 mai 2019 par la cour d'appel de Metz (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. D... W...,
2°/ à Mme P... U..., épouse W...,
domiciliés tous deux [...],


3°/ au procureur général près la cour d'appel de Metz, domicilié en son parquet général, Palais de justice, 3 rue Haute Pierre, BP 41045, 57036 Metz cedex,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société [...] , ès qualités, de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. et Mme W..., et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 décembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Metz, 23 mai 2019), le 4 janvier 2012, la société Lorraine DA a été mise en liquidation judiciaire, la société [...] étant désignée en qualité de liquidateur. Ce dernier a assigné M. et Mme W..., qui se sont succédé dans les fonctions de président de la société, en responsabilité pour insuffisance d'actif.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses cinq premières branches, et le second moyen, ci-après annexés
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Et sur le premier moyen, pris en sa sixième branche
Enoncé du moyen
3. Le liquidateur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à ce que M. et Mme W... supportent l'insuffisance d'actif de la société Lorraine DA, alors « que l'omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal ne peut constituer une simple négligence du dirigeant qu'à la condition que celui-ci ait pu ignorer la cessation des paiements ; qu'en considérant que la simple négligence du dirigeant ne pouvait être écartée après avoir relevé que le résultat de l'exercice de société sur les quinze derniers mois était déficitaire de 122 350 euros, qu'avait été établi un dossier prévisionnel de développement afin de résoudre les difficultés financières de la société, ce qui démontre la volonté du gérant de chercher une solution, et qu'il a ensuite été procédé à la vente de 80 % du fonds de commerce et que 60 000 euros ont été versés afin d'augmenter le capital social, aux fins d'apurer la situation financière de la société, alors que ces circonstances démontraient au contraire la connaissance de la situation de cessation de paiements par le dirigeant, la cour d'appel a violé les articles L. 640-4 et L. 651-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016. »
Réponse de la Cour
4. L'article L. 651-2 du code de commerce, qui permet, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, à un tribunal, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, de décider que le montant en sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion, écarte cette faculté en cas de simple négligence du dirigeant dans la gestion de la société, sans réduire l'existence d'une simple négligence à l'hypothèse dans laquelle le dirigeant a pu ignorer les circonstances ou la situation ayant entouré sa commission.
5. Le moyen, qui postule que l'omission de la déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal ne peut constituer une simple négligence du dirigeant qu'à la condition que celui-ci ait pu ignorer cet état, n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société [...] , en sa qualité de liquidateur de la société Lorraine DA, aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société [...] , ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté la demande de la SCP [...], mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SAS LORRAINE DA visant à ce que Monsieur W... et Madame U... supportent l'insuffisance d'actif de la société ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'article L 640-4 du code de commerce dispose que l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire doit être demandée par le débiteur au plus tard dans les 45 jours qui suivent la cessation des paiements, s'il n'a pas dans ce délai sollicité l'ouverture d'une procédure de conciliation ; qu'en l'espèce la cessation des paiements a été fixée au 5 juillet 2010 par le jugement du tribunal de grande instance de Metz du 4 janvier 2012 et Mme W... représentant la SAS Lorraine DA n'a sollicité l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire que par requête enregistrée au greffe le 22 décembre 2011 alors que, selon le bilan arrêté au 31 décembre 2010, le résultat de l'exercice de la SAS Lorraine DA sur les 15 derniers mois était déficitaire de 122.350 euros ; que le dernier bilan établi le 31 mars 2011 démontre que la situation s'était légèrement améliorée puisque le résultat de l'exercice était positif de 929 euros ; qu'il avait été établi le 23 mars 2011 un dossier prévisionnel de développement afin de résoudre les difficultés financières de la SAS Lorraine DA ce qui démontre la volonté du gérant de chercher une solution ; qu'il a ensuite été procédé à la vente d'une partie du fonds de commerce de la SAS Lorraine DA ; que 60.000 euros ont été versés afin d'augmenter le capital social ; que des démarches étaient donc entreprises pour apurer la situation financière de la société ; qu'il n'est ainsi pas démontré que la déclaration tardive a aggravé la situation financière de l'entreprise, ni que Mme W... a eu une intention frauduleuse en ne déposant la requête qu'en décembre 2011 et qu'il ne s'agissait pas d'une simple négligence ; qu'aucune faute ne sera donc retenue à ce titre » ;
ALORS QUE, premièrement, l'omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal, susceptible de constituer une faute de gestion, s'apprécie au regard de la seule date de la cessation des paiements fixée dans le jugement d'ouverture ou dans un jugement de report ; qu'en faisant état en l'espèce de ce que, selon une situation établie le 31 mars 2011, la situation s'était légèrement améliorée, le résultat étant positif, ou encore que le 23 mars 2011, un dossier prévisionnel de développement avait été établi révélant la volonté du gérant de chercher une solution, ou bien encore qu'il avait été procédé à la vente d'une partie du fonds de commerce, une somme ayant été versée afin d'augmenter le capital social attestant de la volonté des dirigeants d'apurer la situation, quand ils ne devaient raisonner qu'au regard de la date du 5 juillet 2010, date de cessation des paiements telle que fixée par le jugement d'ouverture, les juges du fond ont violé l'article L. 651-2 du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, seul l'état de cessation des paiements, révélé par l'impossibilité de faire face au passif exigible au moyen de l'actif disponible, déclenche l'obligation pour le dirigeant de déposer une déclaration de cessation des paiements ; qu'en s'abstenant en tout état de cause d'évoquer l'état de cessation des paiements tel qu'il vient d'être défini pour la période postérieure au 5 juillet 2010, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
ALORS QUE, troisièmement, et en tout état de cause, la condamnation du dirigeant pour faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif n'est pas conditionnée à son intention frauduleuse ; qu'en écartant la faute de Madame W... au titre de la déclaration tardive de l'état de cessation des paiements au motif de son absence d'intention frauduleuse, l'arrêt a violé les articles L. 640-4 et L. 651-2 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
ALORS QUE, quatrièmement, s'il a été constaté qu'au cours du premier trimestre 2011, la société était légèrement bénéficiaire (929 euros), les juges du fond devaient rechercher si, hormis cette brève période, la situation financière n'avait pas été aggravée par l'absence de déclaration de cessation des paiements ; que faute de se prononcer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L. 640-4 et L. 651-2 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
ALORS QUE, cinquièmement, la charge de la preuve de la circonstance exonératoire incombe à celui qui entend s'en prévaloir ; qu'en faisant peser sur la SCP [...] la charge de la preuve de ce que la déclaration tardive de l'état de cessation des paiements ne constituait pas une simple négligence de Madame W..., la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil, ensemble l'article L. 651-2 du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
ET ALORS QUE, sixièmement, l'omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal ne peut constituer une simple négligence du dirigeant qu'à la condition que celui-ci ait pu ignorer la cessation des paiements ; qu'en considérant que la simple négligence du dirigeant ne pouvait être écartée après avoir relevé que le résultat de l'exercice de société sur les 15 derniers mois était déficitaire de 122.350 euros, qu'avait été établi un dossier prévisionnel de développement afin de résoudre les difficultés financières de la société, ce qui démontre la volonté du gérant de chercher une solution, et qu'il a ensuite été procédé à la vente de 80% du fonds de commerce et que 60.000 euros ont été versés afin d'augmenter le capital social, aux fins d'apurer la situation financière de la société, alors que ces circonstances démontraient au contraire la connaissance de la situation de cessation de paiements par le dirigeant, la cour d'appel a violé les articles L. 640-4 et L. 651-2 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté la demande de la SCP [...], mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SAS LORRAINE DA visant à ce que Monsieur W... et Madame U... supportent l'insuffisance d'actif de la société ;
AUX MOTIFS QU' « il est constant que les capitaux propres étaient négatifs de 22.350 euros alors que le capital social avait été fixé selon les statuts à la somme de 100.000 euros ; qu'il convient de relever cependant qu'une somme de 60.000 euros a été incorporée au capital en mai ou juin 2011 ; que le bilan établi en mars 2011 montrait que l'activité était redevenue légèrement bénéficiaire ; qu'il résulte des motifs exposés précédemment qu'il était recherché des solutions pour relancer l'activité de la société ou à défaut pour procéder à une cession amiable du fonds de commerce afin d'apurer la situation financière ; que d'ailleurs les accords de confidentialité produits démontrent que des pourparlers avaient été engagés avec de potentiels acquéreurs, étant observé que le tribunal de grande instance a été saisi dès que Mme W... a su, fin novembre 2011, que ce projet ne se réaliserait pas ; qu'enfin il n'est pas établi que M. et Mme W... ont volontairement minimisé le montant du passif lors du dépôt de leur requête en ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire et qu'ils avaient eu connaissance de l'existence d'autres dettes, notamment fiscales ; qu'il n'est donc pas démontré d'une part que M. puis Mme W... ont volontairement poursuivi l'activité de la SAS Lorraine DA alors qu'ils savaient qu'elle était déficitaire et irrémédiablement compromise, et, d'autre part, que cela a contribué à l'insuffisance d'actif, étant observé que le fonds de commerce a été vendu pour un montant supérieur à celui auquel il avait été acheté (320.000 euros au lieu de 270.100 euros) » ;
ALORS QUE, premièrement, après avoir constaté que les capitaux propres étaient négatifs de 22.350 euros, quand le capital social avait été fixé à 100.000 euros, les juges du fond ne pouvaient se borner à énoncer qu'une somme de 60.000 euros avait été incorporée au capital en mai ou juin 2011 sans rechercher, comme il leur était demandé, si nonobstant cette augmentation de capital, les capitaux propres n'étaient pas inférieurs à la moitié du capital social (conclusions du 22 octobre 2018, p. 5, § 8) ; que l'arrêt souffre d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 651-2 du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
ALORS QUE, deuxièmement, s'il a été constaté qu'au cours du premier trimestre 2011, la société était légèrement bénéficiaire (929 euros), les juges du fond devaient rechercher si, passé cette brève période et comme précédemment, l'entreprise n'était pas déficitaire ; que faute de se prononcer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
ALORS QUE, troisièmement, le caractère volontaire ou non de la poursuite d'activité, ni son incidence, ne peuvent être retenus comme conférant une base légale à l'arrêt attaqué sans qu'au préalable, il ait été statué correctement sur le fait matériel de la poursuite d'activité déficitaire ; qu'à cet égard, l'arrêt encourt la cassation pour violation de l'article L. 652-1 dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.

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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 février 2021, 19-20.616, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

ANALYSE DE L'ARRET :



DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 3 février 2021



Rejet

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 177 FS-P
Pourvoi n° B 19-20.616



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 3 FÉVRIER 2021
1°/ M. P... R...,
2°/ Mme L... Y..., épouse R...,
domiciliés tous deux [...],
ont formé le pourvoi n° B 19-20.616 contre l'arrêt rendu le 30 avril 2019 par la cour d'appel de Poitiers (2e chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Jérôme G., société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
2°/ à Mme K... J..., domiciliée [...] , prise en qualité de liquidateur de la SCI des 4 cyprès, dont le siège est [...] ,
3°/ à la société des 4 cyprès, société civile immobilière, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme R..., de la SARL Corlay, avocat de la société Jérôme G., et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 janvier 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mmes Graff-Daudret, Vaissette, Bélaval, Fontaine, Fèvre, M. Riffaud, conseillers, M. Guerlot, Mmes Barbot, Brahic-Lambrey, M. Blanc, Mmes Kass-Danno, Comte, M. Boutié, conseillers référendaires, M. Lecaroz, avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 30 avril 2019), la SCI des 4 cyprès a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 29 mars et 26 septembre 2016. Mme J..., désignée en qualité de liquidateur, a été autorisée à reprendre la procédure de saisie immobilière qui avait été engagée par un créancier avant l'ouverture de la procédure collective.
2. Le 12 juin 2018, l'immeuble saisi a été adjugé à la société Jérôme G. M. et Mme R..., les parents du gérant de la SCI, ont formé une surenchère du dixième, qui a été contestée par la société adjudicataire.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. M. et Mme R... font grief à l'arrêt de faire droit à la contestation et d'annuler leur déclaration de surenchère, alors « que l'interdiction faite aux parents et alliés jusqu'au deuxième degré inclusivement du débiteur liquidé ou du dirigeant de la personne morale liquidée de présenter une offre de reprise de son entreprise ou de ses biens prévue par les articles L. 642-3 et L. 642-10 du code de commerce n'interdit pas à ces proches de porter une enchère ou surenchère dans le cadre de la vente aux enchères publiques des biens du débiteur ; qu'en retenant, pour annuler la surenchère formée par les époux R... dans le cadre de la vente aux enchères publiques de l'immeuble de la SCI des 4 cyprès, qu'ils étaient les parents du dirigeant de la SCI des 4 cyprès, M. E... R..., et que « la prohibition de l'article L. 642-3 (était) bien applicable à la vente aux enchères » et visait bien l'enchère ou la surenchère qui devaient être considérées comme des offres, la cour d'appel a violé les articles L. 642-3 et L. 642-10 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
4. C'est à bon droit que l'arrêt retient que les articles L. 642-18 et L. 642-19 du code de commerce, auxquels renvoie l'article L. 642-20 du même code, traitent spécialement des ventes aux enchères publiques des biens immobiliers du débiteur en liquidation judiciaire ainsi que de la vente amiable ou aux enchères des autres biens de ce débiteur. Il en résulte que l'interdiction de la cession des actifs, par quelque voie que ce soit, aux parents, jusqu'au deuxième degré, des dirigeants de la personne morale débitrice, que pose l'article L. 642-3 du code de commerce, auquel renvoie l'article L. 642-20 du même code, est applicable à M. et Mme R..., à l'exclusion des dispositions des articles L. 322-7 et R. 322-39 du code des procédures civiles d'exécution.
5. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme R... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme R... et les condamne à payer à la société Jérôme G. la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. et Mme R....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fait droit à la contestation de la société Jérôme G, d'AVOIR annulé la déclaration de surenchère formée par les époux R... en suite du jugement du 12 juin 2018 portant adjudication de l'immeuble dépendant de la liquidation judiciaire de la SCI des 4 Cyprès au profit de la société Jérôme G, d'AVOIR dit, en conséquence, que le jugement d'adjudication du 12 juin 2018 a produit ses pleins effets et que notamment, la société Jérôme G. était adjudicataire du bien litigieux, et d'AVOIR débouté les époux R... de toutes leurs demandes ;
AUX MOTIFS QU'il convient également de constater qu'au vu de l'extrait de naissance versé aux débats, les époux P... et L... R... sont les parents de M. E... R... dirigeant de la SCI des 4 Cyprès ; que l'article L. 642-3 du code de commerce dispose que ni le débiteur, au titre de l'un quelconque de ses patrimoines, ni les dirigeants de droit ou de fait de la personne morale en liquidation judiciaire, ni les parents ou alliés jusqu'au deuxième degré inclusivement de ces dirigeants ou du débiteur personne physique, ni les personnes ayant eu ou ayant la qualité de contrôleur au cours de la procédure ne sont admis, directement ou par personne interposée, à présenter une offre (...) ; que le texte prévoit que tout acte passé en violation de cette disposition est annulé à la demande de tout intéressé ou du Ministère Public, présentée dans un délai de trois ans à compter de la conclusion de l'acte ; qu'enfin une dérogation reste possible et la cession à l'une des personnes visées au premier alinéa de l'article L. 642-3 peut être autorisée par un jugement spécialement motivé pris sur requête du ministère public ; que si ces dispositions, en ce qu'elles sont insérées dans la section relative à la cession de l'entreprise, concernent les offres présentées dans le cadre des cessions totales et partielles de l'activité, l'article L. 624-20 du code de commerce vient toutefois préciser que les cessions d'actifs réalisées en application des articles L. 642-18 et L. 642-19 du même code sont soumises aux interdictions prévues par le premier alinéa de l'article L. 642-3, qu'or ces articles, placés dans la section relative à la cession des actifs du débiteur, traitent spécifiquement des ventes aux enchères publiques des biens immobiliers du débiteur en liquidation ainsi que de la vente amiable ou aux enchères des autres biens de ce débiteur et, en conséquence, la prohibition de l'article L. 642-3 leur est bien applicable à la vente aux enchères ainsi d'ailleurs que le confirment diverses décisions de jurisprudence de la cour de cassation comme, par exemple, l'arrêt du 8 mars 2017 (15-22.987) de la chambre commerciale ; que le premier juge, tout en reconnaissant l'applicabilité du texte aux ventes aux enchères, ne l'a pas admise en l'espèce en considérant que ni l'enchère ni la surenchère ne constituaient l'offre interdite par l'article L. 642-3 en opérant une distinction spécieuse, que le dit article n'opère cependant pas, entre les conséquences juridiques de la surenchère et celles de l'offre présentée dans un autre cadre juridique ; que toutefois, cette distinction vide le texte de sa substance dés lors que l'offre, qui doit s'entendre comme étant la manifestation de la volonté d'acquérir l'immeuble dépendant de la liquidation judiciaire, ne peut être présentée dans la procédure de vente aux enchères publiques que sous la forme d'une enchère ou d'une surenchère, qui incontestablement et quels que soient les effets propres attachés par la loi à ces actes, constituent la manifestation de volonté de l'enchérisseur ou du surenchérisseur d'acquérir l'immeuble objet de la vente et, en cela, sont bien des offres soumises aux interdictions de l'article L. 642-3 du code de commerce ; que le juge de l'exécution a objecté, à tort, que les dispositions spéciales de la saisie immobilière n'interdisant d'enchères, aux termes de l'article R. 322-39 du code des procédures civiles d'exécution, que le débiteur saisi, les auxiliaires de justice intervenus dans la procédure et les magistrats de la juridiction, la surenchère n'était donc pas interdite aux parents du dirigeant de la personne morale en liquidation, alors toutefois que la restriction de l'article L. 642-3 n'est ni contraire, ni inconciliable avec le texte spécial mais vient simplement ajouter une autre incompatibilité complémentaire qui résulte également d'un texte spécial propre aux procédures collectives ; qu'enfin, si les époux R..., surenchérisseurs, considèrent que l'application de l'article L. 642-3 aurait pour effet de rendre contestable sa constitutionnalité au regard de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 en ce qu'elle porterait une atteinte disproportionnée et illégitime à la libre disposition des biens, incluant la liberté d'acquisition, il est toutefois constant que la conformité des dispositions législatives à des principes constitutionnels ne peut être contestée devant une juridiction en dehors de la procédure spécifique de la question prioritaire de constitutionnalité, prévue à l'article 61-1 de la Constitution, que les époux R... n'ont cependant pas mis en oeuvre ; qu'il s'évince de ce qui précède que la déclaration de surenchère formée par les époux R... en suite du jugement d'adjudication de l'immeuble dépendant de la liquidation judiciaire de la SCI des 4 Cyprès, dont leur fils E... R... est le dirigeant, sans justifier d'un jugement leur accordant une dérogation à l'interdiction faite aux parents du dirigeant de droit de la personne morale en liquidation judiciaire, par les articles L. 642-3 et L. 642-20 du code de commerce, de présenter une offre d'acquisition d'un bien dépendant de cette liquidation, doit être annulée ; qu'il s'ensuit qu'à défaut de surenchère régulière, le jugement du 12 juin 2018, emportant adjudication de l'immeuble au profit de la société SAS Jérôme G., a produit tous ses effets ce que la cour dira, infirmant ainsi le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception de celle rejetant la demande de sursis à statuer ;
ALORS QUE l'interdiction faite aux parents et alliés jusqu'au deuxième degré inclusivement du débiteur liquidé ou du dirigeant de la personne morale liquidée de présenter une offre de reprise de son entreprise ou de ses biens prévue par les articles L. 642-3 et L. 642-10 du code de commerce n'interdit pas à ces proches de porter une enchère ou surenchère dans le cadre de la vente aux enchères publiques des biens du débiteur ; qu'en retenant, pour annuler la surenchère formée par les époux R... dans le cadre de la vente aux enchères publiques de l'immeuble de la SCI des 4 Cyprès, qu'ils étaient les parents du dirigeant de la SCI des 4 Cyprès, M. E... R..., et que « la prohibition de l'article L. 642-3 (était) bien applicable à la vente aux enchères » et visait bien l'enchère ou la surenchère qui devaient être considérées comme des offres, la cour d'appel a violé les articles L. 642-3 et L. 642-10 du code de commerce.

___________________ Cliuez sur l'intitulé de larrêt pour lire________________________
3 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 février 2021, 19-13.260, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 février 2021, 19-13.260, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Cassation partielle

MOTS CLES DE L'ARRET :

ANALYSE DE L'ARRET :



DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 3 février 2021



Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 100 F-P
Pourvoi n° F 19-13.260








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 3 FÉVRIER 2021
La société Ceramiche Marca Corona Spa, dont le siège est [...], a formé le pourvoi n° F 19-13.260 contre l'arrêt rendu le 13 mars 2018 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Bois et matériaux, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de la société Ceramiche Marca Corona Spa, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Bois et matériaux, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 décembre 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 13 mars 2018), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 2 novembre 2016, pourvoi n° 14-22.114), la société italienne Ceramiche Marca Corona (la société CMC), ayant pour activité la fabrication et la commercialisation de carrelage, a vendu le 18 avril 2003 des produits à la société Malet matériaux, aux droits de laquelle est venue la société Bois et matériaux (le vendeur), laquelle les a revendus le 9 mai 2003 en France à M. et Mme O... (les acheteurs).
2. Soutenant que le carrelage présentait des micro rayures, ceux-ci ont assigné en indemnisation de leur préjudice leur vendeur, qui a appelé en garantie la société CMC (le fournisseur).
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche, ci-après annexé
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. La société CMC fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action engagée contre elle par la société Bois et matériaux, alors « que la directive n° 1999/44/CE du Parlement et du Conseil du 25 mai 1999, sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation a pour finalité de protéger le consommateur se procurant des biens dans un état membre autre que celui de sa résidence ; qu'en retenant que la société Bois et matériaux est fondée à s'en prévaloir pour déclarer recevable son action contre la société Ceramiche, fabricant, tout en constatant que la société Bois et matériaux est un vendeur professionnel et non un consommateur au sens de la directive, la cour d'appel a violé par fausse application la directive n° 1999/44/CE du Parlement et du Conseil du 25 mai 1999. »
Réponse de la Cour
5. Aux termes de l'article 4 de la directive n° 1999/44/CE du Parlement et du Conseil du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation, lorsque la responsabilité du vendeur final est engagée vis-à-vis du consommateur en vertu d'un défaut de conformité qui résulte d'un acte ou d'une omission du producteur, d'un vendeur antérieur placé dans la même chaîne contractuelle ou de tout autre intermédiaire, le vendeur final a le droit de se retourner contre le ou les responsable(s) appartenant à la chaîne contractuelle. Le droit national détermine le ou les responsable(s) contre qui le vendeur final peut se retourner, ainsi que les actions et les conditions d'exercice pertinentes.
6. Ayant constaté que par un jugement du 29 septembre 2009 la société Bois et matériaux avait été condamnée à réparer le préjudice subi par M. et Mme O... du fait du défaut de conformité du carrelage qu'elle leur avait vendu, puis retenu que la société CMC était un vendeur antérieur dans la chaîne contractuelle, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action récursoire de la société Bois et matériaux, vendeur final, contre la société CMC, son fournisseur, était recevable.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche
8. La société CMC fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action engagée par la société Bois et matériaux, alors « que l'article 4 de la directive prévoyant que "lorsque la responsabilité du vendeur final est engagée vis-à-vis du consommateur en vertu d'un défaut de conformité qui résulte d'un acte ou d'une omission du producteur, d'un vendeur antérieur placé dans la même chaîne contractuelle ou de tout autre intermédiaire, le vendeur final a le droit de se retourner contre le ou les responsable(s) appartenant à la chaîne contractuelle. Le droit national détermine le ou les responsable(s) contre qui le vendeur final peut se retourner, ainsi que les actions et les conditions d'exercice pertinentes" se borne à opérer pour cette action récursoire un renvoi au droit national, soit en l'espèce au droit italien ; qu'en déduisant de cet article 4 de la directive que la norme italienne applicable en considération de la directive européenne "sont les dispositions du code de la consommation italien (article 131 et suivants) pris en application de ladite directive", la cour d'appel qui ne s'est pas référée à la loi désignée par les règles de conflit faute d'avoir recherché si selon la loi italienne, le vendeur professionnel peut se retourner contre le fabricant sur le fondement du droit de la consommation italien, n'a pas justifié légalement sa décision et a ainsi violé par fausse application l'article 4 de la directive n° 1999/44/CE du Parlement et du Conseil du 25 mai 1999. »
Réponse de la Cour
9. Ayant écarté l'application des dispositions du code civil italien comme non pertinentes, dès lors qu'était en cause l'action récursoire du vendeur final contre un vendeur antérieur, puis retenu que l'article 131 du code italien de la consommation permettait au vendeur final reconnu responsable vis-à-vis du consommateur en raison d'un défaut de conformité d'exercer un recours contre tout sujet responsable faisant partie de la même chaîne distributive que lui, la cour d'appel a, par là-même, effectué la recherche prétendument omise.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
11. La société CMC fait grief à l'arrêt de la condamner à garantir la société Bois et matériaux de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre en faveur de M. et Mme O..., alors « que selon l'article 39 de la Convention de Vienne "1. l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au vendeur, en précisant la nature de ce défaut, dans un délai raisonnable à partir du moment où il l'a constaté ou aurait dû le constater. 2. Dans tous les cas, l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au plus tard dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises, à moins que ce délai ne soit incompatible avec la durée d'une garantie contractuelle" ; qu'en écartant la déchéance invoquée en l'espèce au prétexte que la convention règle les relations contractuelles entre vendeur et acheteur y compris au titre d'une non conformité dans l'hypothèse par exemple d'une difficulté née avant revente à un consommateur au sens de la directive et ne règle pas le recours récursoire de vendeur final contre son propre vendeur, la cour d'appel a violé l'article 39 de la convention de Vienne du 11 avril 1980. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 39 de la convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises du 11 avril 1980 (la CVIM) :
12. Selon ce texte, l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au plus tard dans le délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises.
13. Pour condamner la société CMC à garantir la société Bois et matériaux, l'arrêt retient, en premier lieu, que l'action récursoire du vendeur final contre son propre vendeur trouve sa cause non dans le défaut de conformité lui-même mais dans l'action engagée contre ce vendeur final par le consommateur, en second lieu, que la CVIM régit les relations contractuelles entre vendeur et acheteur et ne s'applique pas à un tel recours.
Il en déduit que le débat sur l'application des articles 39 et 40 de la CVIM est inopérant.
14. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable l'action engagée par la société Bois et matériaux contre la société Ceramiche Marca Corona, l'arrêt rendu le 13 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la société Bois et matériaux aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Bois et matériaux et la condamne à payer à la société Ceramiche Marca Corona la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat aux Conseils, pour la société Ceramiche Marca Corona Spa.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré recevable l'action engagée par la Snc Wolseley France Bois et Matériaux (la société Bois et Matériaux) contre la société Ceramiche Marca Corona Spa,
AUX MOTIFS QUEEn l'espèce, il s'agit donc de déterminer la norme italienne applicable en considération de la directive européenne susvisée.L'article 4 de la directive énonce que "Action récursoire Lorsque la responsabilité du vendeur final est engagée vis-à-vis du consommateur en vertu d'un défaut de conformité qui résulte d'un acte ou d'une omission du producteur, d'un vendeur antérieur placé dans la même chaîne contractuelle ou de tout autre intermédiaire, le vendeur final a le droit de se retourner contre le ou les responsable(s) appartenant à la chaîne contractuelle. Le droit national détermine le ou les responsable(s) contre qui le vendeur final peut se retourner, ainsi que les actions et les conditions d'exercice pertinentes. »Il importe de rappeler le champ d'application de la dite directive étant rappelé qu'il n'est pas contesté qu'elle était déjà transposée en droit interne italien au jour de la vente des carrelages par la société Ceramiche à la société Wolseley.Au sens de la directive est consommateur, toute personne physique qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale ; (article 1er). Tel est le cas de M et Mme O....Est « vendeur » toute personne physique ou morale qui, en vertu d'un contrat, vend des biens de consommation dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale. Tel est le cas de la société Wolseley qui a pour activité celle de négoce de matériaux.Il résulte de l'article 1er e) et f) que sont couverts par cette directive les garanties et "réparation" au sens de la directive en cas de non conformité.L'article 2 énonce d'ailleurs les dispositions applicables s'agissant des difficultés relatives à la conformité au contrat des biens vendus.Ce faisant la directive a unifié le régime de la vente en ne retenant [pas] la distinction entre l¿action en garantie des vices cachés et la délivrance non-conforme de la chose existante en droit française. L'applicabilité de cette norme doit être examinée au sens des termes unifiés retenus par la disposition supra nationale.Cette directive prévoit l'action récursoire du vendeur final aux termes de l'article 4 précédemment rappelé. Il est constant que la société Ceramiche est un vendeur antérieur dans la chaîne contractuelle.En conséquence, la société Ceramiche soutient de manière inopérante que l'action initiale de M et Mme O... n'a pas été engagée sur le fondement des règles du code de la consommation, ce qu'ils ne pouvaient en tout état de cause pas faire puisqu'en France, la directive n'était pas encore transposée.Il n'en reste pas moins que leur action relève bien du champ d'application de la directive et qu'aucune disposition n'est de nature à priver le vendeur final de l'action récursoire prévue à l'article 4.A cet égard, la société Wolseley invoque donc les dispositions du code de la consommation italien (article 131 et suivants) pris en application de ladite directive déjà transposée en Italie dès lors que l'article 4 prévoyant l'action récursoire énonce que " Le droit national détermine le ou les responsable(s) contre qui le vendeur final peut se retourner, ainsi que les actions et les conditions d'exercice pertinentes".L'article 131 alinéa 2 du code de la consommation italien énonce que ""2. Le vendeur final qui a fourni les réparations demandées par le consommateur peut agir en récursoire, dans le délai d'un an à compter de l'exécution de sa prestation, vis-à-vis du sujet ou des sujets responsables, pour obtenir la réintégration de ce qu'il a prêté".La notion de réparation doit être entendue au sens de la Directive à savoir "en cas de défaut de conformité, la mise du bien de consommation dans un état conforme au contrat". Cette mise en conformité au contrat peut prendre la forme d'une indemnisation.Tel est le cas en l'espèce puisque qu'en tant que vendeur final du carrelage, la société Wolseley a été condamnée par jugement en date du 29 septembre 2009 et qu'elle a exécuté la décision qui la condamnait en adressant deux chèques d'un montant de 23.309,25 € et de 3.040,64 € au conseil des époux O... par courriers en date du 28 octobre 2009 et du 23 août 2010 (pièces 6 et 7).Elle avait appelé la société Ceramiche Marca Corona à la procédure l'opposant à M et Mme O... par acte du 15 février 2008, avant même la "réparation", afin qu'elle la relève indemne de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre soit à l'évidence avant même l'exécution de la décision la condamnant en sa qualité de vendeur final.Cette circonstance résulte d'une décision relevant des mesures d'administration judiciaire à savoir la disjonction de l'instance initialement engagée par M et Mme O... et de l'instance concernant l'appel en garantie consécutif.En conséquence, le délai pour agir prévu par l'article 131 alinéa 2 du code de la consommation italien a été respecté par la société Wolseley, peu important que la mise en cause ait été antérieure à la réparation.Il sera enfin ajouté que l'intimée soutient à juste titre que l'article 131 alinéa 2 prévaut sur l'article 1495 du code civil italien prévoyant un délai d'un an à compter de la livraison dès lors que le litige ne concerne pas simplement un vendeur et un acquéreur mais l'action récursoire d'un vendeur final à l'égard d'un co contractant antérieur considéré par le demandeur comme responsable par le vendeur final à l'égard d'un consommateur, au sens de la directive susvisée.En conséquence, l'action de la société Wolseley est recevable et le jugement sera donc confirmé sur ce point.
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE le fait que la transposition [de la directive européenne du 25 mai 1999] ait été faite dans le Code de la Consommation [italien] n'empêche nullement les professionnels de s'en prévaloir à défaut de quoi l'article 131 [du code de la consommation italien] serait privé de sa substance, et ce même si les demandeurs initiaux, consommateurs, ne se sont pas prévalus du Code de la Consommation d'un autre pays membre, les dates de transposition de la directive européenne du 25 mai 1999 pouvant différer
1)° ALORS QUE la directive n°1999/44/CE du Parlement et du Conseil du 25 mai 1999, sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation a pour finalité de protéger le consommateur se procurant des biens dans un état membre autre que celui de sa résidence ; qu'en retenant que la société Bois et Matériaux est fondée à s'en prévaloir pour déclarer recevable son action contre la société Ceramiche, fabricant, tout en constatant que la société Bois et Matériaux est un vendeur professionnel et non un consommateur au sens de la Directive, la cour d'appel a violé par fausse application la Directive n°1999/44/CE du Parlement et du Conseil du 25 mai 1999 ;
2°) ALORS QUE la directive n°1999/44/CE du Parlement et du Conseil du 25 mai 1999, sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation, vise à assurer un haut niveau de protection des consommateurs sans pour autant porter atteinte aux dispositions et principes des droits nationaux relatifs aux régimes de responsabilité contractuelle et extracontractuelle ; qu'elle n'affecte pas le principe de la liberté contractuelle entre le vendeur, le producteur, un vendeur antérieur ou tout autre intermédiaire ; qu'en retenant que la directive a unifié le régime de la vente, pour déclarer recevable l'action du vendeur final contre le fabricant, la cour d'appel a violé par fausse application la Directive n°1999/44/CE du Parlement et du Conseil du 25 mai 1999 ;
3°) ALORS QUE l'article 4 de la Directive prévoyant que « Lorsque la responsabilité du vendeur final est engagée vis-à-vis du consommateur en vertu d'un défaut de conformité qui résulte d'un acte ou d'une omission du producteur, d'un vendeur antérieur placé dans la même chaîne contractuelle ou de tout autre intermédiaire, le vendeur final a le droit de se retourner contre le ou les responsable(s) appartenant à la chaîne contractuelle. Le droit national détermine le ou les responsable(s) contre qui le vendeur final peut se retourner, ainsi que les actions et les conditions d'exercice pertinentes » se borne à opérer pour cette action récursoire un renvoi au droit national, soit en l'espèce au droit italien ; qu'en déduisant de cet article 4 de la Directive que la norme italienne applicable en considération de la directive européenne « sont les dispositions du code de la consommation italien (article 131 et suivants) pris en application de ladite directive », la cour d'appel qui ne s'est pas référée à la loi désignée par les règles de conflit faute d'avoir recherché si selon la loi italienne, le vendeur professionnel peut se retourner contre le fabricant sur le fondement du droit de la consommation italien, n'a pas justifié légalement sa décision et a ainsi violé par fausse application l'article 4 de la Directive n°1999/44/CE du Parlement et du Conseil du 25 mai 1999
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré recevable l'action engagée par la Snc Wolseley France Bois et Matériaux (la société Bois et Matériaux) contre la société Ceramiche Marca Corona Spa, condamné la Société Ceramiche Marca Corona Spa à garantir et relever indemne la Snc Wolseley France Bois et Matériaux (la société Bois et Matériaux) de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre en faveur des époux O..., par le Jugement du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux en date du 29 septembre 2009, débouté la Société Ceramiche Marca Corona Spa de toutes ses demandes, condamné la Société Ceramiche Marca Corona Spa A Verser à la Snc Wolseley France Bois et Matériaux (la société Bois et Matériaux) la somme de 3.750 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens, en ce compris les dépens d'expertise
AUX MOTIFS QUE
Sur la déchéance prévue par les articles 39 et 40 de la convention de Vienne du 11/04/1980Compte tenu des motifs qui précèdent, il s'agit désormais de déterminer si les parties peuvent arguer des dispositions de la convention de Vienne susvisée relatives à la déchéance du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité.L'article 39 énonce que :"1) L'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au vendeur, en précisant la nature de ce défaut, dans un délai raisonnable à partir du moment où il l'a constaté ou aurait du le constater.2) Dans tous les cas, l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité, s'il ne le dénonce pas au plus tard dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises, à moins que ce délai ne soit incompatible avec la durée d'une garantie contractuelle."L'article 40 de la même Convention prévoit que " Le vendeur ne peut pas se prévaloir des dispositions des articles 38 et 39 lorsque le défaut de conformité porte sur des faits qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer et qu'il n'a pas révélés à l'acheteur. "La société Ceramiche soutient que l'acquéreur (société Wolseley) est déchue du droit de se prévaloir d'un défaut conformité en application de l'article 39 alinéa 2 puisque la livraison des carrelages incriminés est intervenue le 18/4/2003 et que l'intimée a dénoncé le prétendu défaut de conformité auprès d'elle le 1/3/2006.La société Wolseley soutient que du refus de communiquer les résultats de ses essais en interne et en laboratoire, il découle que la société Ceramiche ne pouvait ignorer le défaut de conformité du carrelage. Dans la mesure où la société Ceramiche ne pouvait ignorer le défaut de conformité du carrelage et qu'elle ne l'a pas révélé à l'acheteur, l'article 40 de la Convention de Vienne s'applique. La société ne peut alors se prévaloir des dispositions de l'article 39.Sur ce point, la société Ceramiche réplique qu'il revient à l'acheteur de rapporter la preuve de la connaissance du vendeur du défaut de conformité de la chose vendue et que cette preuve n'est pas rapportée.La convention susvisée prévoit que l¿acheteur dispose d¿un délai d¿action de deux ans à compter de la remise effective de la marchandise pour dénoncer un défaut apparu tardivement (art. 39 al. 2), ce délai ne joue pas sur la prescription de l¿action en justice récursoire du vendeur final qui trouve sa cause non dans le défaut de conformité lui même mais dans l'action engagée par le consommateur puisque l'article 131 alinéa 2 traduit le recours récursoire entre les professionnels faisant partie de la chaîne de contrats précédant la vente au consommateur.Le débat sur l'application des articles 39 et 40 de la convention de Vienne du 11/04/1980 est donc inopérant étant observé que cette convention :- règle les relations contractuelles entre vendeur et acheteur y compris au titre d'une non conformité dans l'hypothèse par exemple d'une difficulté née avant revente à un consommateur au sens de la directive.- ne règle pas le recours récursoire de vendeur final contre son propre vendeur.
1°) ALORS QUE selon l'article 39 de la Convention de Vienne « 1. l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au vendeur, en précisant la nature de ce défaut, dans un délai raisonnable à partir du moment où il l'a constaté ou aurait dû le constater. 2. Dans tous les cas, l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au plus tard dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises, à moins que ce délai ne soit incompatible avec la durée d'une garantie contractuelle » ; qu'en écartant la déchéance invoquée en l'espèce au prétexte que la convention règle les relations contractuelles entre vendeur et acheteur y compris au titre d'une non conformité dans l'hypothèse par exemple d'une difficulté née avant revente à un consommateur au sens de la directive et ne règle pas le recours récursoire de vendeur final contre son propre vendeur, la cour d'appel a violé l'article 39 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 ;
2°) ALORS QUE selon l'article 39 de la Convention de Vienne « 1. l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au vendeur, en précisant la nature de ce défaut, dans un délai raisonnable à partir du moment où il l'a constaté ou aurait dû le constater. 2. Dans tous les cas, l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au plus tard dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises, à moins que ce délai ne soit incompatible avec la durée d'une garantie contractuelle » ; qu'en écartant la déchéance invoquée en l'espèce au prétexte que ce délai ne joue pas sur la prescription de l¿action en justice récursoire du vendeur final, quand la convention de Vienne ne traite pas de la prescription de l'action mais de la déchéance du droit d'agir, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 39 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980

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4 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 février 2021, 19-20.683, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 février 2021, 19-20.683, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

ANALYSE DE L'ARRET :



DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 3 février 2021



Rejet

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 95 F-P
Pourvoi n° Z 19-20.683



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 3 FÉVRIER 2021
1°/ Mme V... B..., domiciliée [...] ,
2°/ la société [...], société civile professionnelle, dont le siège est [...] , en la personne de M. I... G..., agissant en qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de Mme V... B...,
ont formé le pourvoi n° Z 19-20.683 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2019 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige les opposant au comptable public chargé du recouvrement du pôle de recouvrement spécialisé de la Marne, agissant sous l'autorité du directeur départemental des finances publiques de la Marne et du directeur général des finances publiques, domicilié [...] , défendeur à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mme B... et de la société [...], ès qualités, de la SCP Foussard et Froger, avocat du comptable public chargé du recouvrement du pôle de recouvrement spécialisé de la Marne, agissant sous l'autorité du directeur départemental des finances publiques de la Marne et du directeur général des finances publiques, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 décembre 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 28 mai 2019), Mme B... a été mise en redressement judiciaire le 13 février 2018, la société [...] étant désignée mandataire judiciaire.
2. Le comptable public du pôle de recouvrement spécialisé de la Marne a déclaré des créances au passif de la procédure et a été avisé par le mandataire judiciaire le 3 septembre 2018 que la créance était discutée et qu'un rejet serait proposé. Le comptable a répondu au mandataire le 12 octobre suivant et a maintenu sa demande d'admission.
Examen des moyens
Sur les premier et le second moyens, réunis
Enoncé des moyens
3. Mme B... et le mandataire judiciaire font grief à l'arrêt d'admettre les créances déclarées, alors :
« 1°/ que l'absence de justificatifs joints à la déclaration de créance ne caractérise pas une irrégularité de la déclaration de créance ; qu'en retenant, pour autoriser le comptable public à discuter de la proposition de rejet de sa créance contenue dans la lettre de contestation du mandataire judiciaire du 3 septembre 2018 à laquelle il n'avait pas répondu dans le délai de trente jours, que cette lettre, en ce qu'elle indiquait que la déclaration de créance n'était assortie d'aucun justificatif, portait notamment sur la régularité de la déclaration de créance, la cour d'appel a violé les articles L. 622-25 et R. 622-23 du code de commerce ;
2°/ que s'il y a discussion sur tout ou partie d'une créance autre que celles mentionnées à l'article L. 625-1 du code de commerce, le mandataire judiciaire en avise le créancier intéressé en l'invitant à faire connaître ses explications et le défaut de réponse dans le délai de trente jours interdit toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire judiciaire, à moins que la discussion ne porte sur la régularité de la déclaration de créances ; qu'en retenant, pour autoriser le comptable public à discuter de la proposition de rejet de sa créance contenue dans la lettre du mandataire judiciaire du 3 septembre 2018 à laquelle il n'avait pas répondu dans le délai de trente jours et admettre ladite créance, que cette lettre, en ce qu'elle indiquait que la déclaration de créance n'était assortie d'aucun justificatif, concernait la régularité de la déclaration, et contenait donc à la fois une contestation sur la régularité de la déclaration et une contestation sur une partie de la créance, quand la lettre de contestation qui mentionnait l'absence de justificatifs et en sollicitait la communication, contestait le montant de la créance et invoquait l'absence de prise en considération de paiements effectuées par Mme B..., débitrice en redressement judiciaire, et constituait donc une discussion sur tout ou partie de la créance au sens de l'article L. 622-27 du code de commerce, la cour d'appel a violé l'article L. 622-27 du code de commerce ;
3°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que dans sa lettre du 3 septembre 2018 adressée à la direction générale des finances publiques du pôle recouvrement de la Marne, le mandataire judiciaire a indiqué que Mme B..., débiteur en redressement judiciaire, entendait "contester [la] créance" qui [n'était assortie d'aucun justificatif. Mme B... souhaiterait être en possession des différents rôles", et que "par conséquent" () en l'absence de justificatif, je proposerai le rejet de la totalité de votre créance au mandataire judiciaire", qu'en retenant néanmoins que le mandataire judiciaire avait contesté la régularité de la déclaration de créance, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre susvisée, a violé l'article 1103 du code civil, ensemble le principe susvisé ;
4°/ que les contestations relatives au recouvrement qui portent sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, et sur l'exigibilité de l'impôt relèvent, en matière d'impôts directs, de la compétence du juge administratif ; qu'en statuant sur le montant de la créance déclarée par l'administration fiscale au passif de Mme B... au titre de l'impôt sur le revenu et de la taxe d'habitation compte tenu des paiements effectués quand il lui appartenait de renvoyer les parties à faire trancher la question relative au montant de la dette compte tenu des paiements effectués, dont dépendait la solution du litige, par la juridiction administrative exclusivement, la cour d'appel a violé la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble les articles L. 281 et L. 199 du livre des procédures fiscales. »
Réponse de la Cour
4. Les créances fiscales ne peuvent être contestées, en cas d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, que dans les conditions prévues par le livre des procédures fiscales. Doivent donc être admises les créances fiscales qui n'ont pas donné lieu à une réclamation contentieuse adressée à l'administration, conformément aux dispositions de ce livre.
5. Il ressort de l'arrêt que Mme B... n'a pas présenté de réclamation à l'administration fiscale.
6. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er et 1015 du code de procédure civile, la décision attaquée se trouve légalement justifiée.
7. Le moyen ne peut donc être accueilli
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme B... et la société [...], en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cette dernière, aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme B... et la société [...], ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le défaut de réponse du comptable public du pôle recouvrement spécialisé de la Marne dans le délai de 30 jours de l'article L. 622-27 du code de commerce n'interdit pas l'admission de sa créance au passif du redressement judiciaire de Mme B... net d'AVOIR admis au passif du redressement judiciaire de Mme B... la créance du comptable public du pôle recouvrement spécialisé de la Marne pour les montants suivants : créances hypothécaires, subsidiairement privilégiées de 27 513,53 euros, créances privilégiées de 106 466,72 euros ;
AUX MOTIFS QUE sur le rejet des créances fondé sur le défaut de réponse dans les 30 jours : l'article L.622-27 du code de commerce dispose que s'il y a discussion sur tout ou partie d'une créance, le mandataire judiciaire en avise le créancier intéressé en l'invitant à faire connaître ses explications ; que le défaut de réponse de la part du créancier dans le délai de trente jours interdit toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire judiciaire, à moins que la discussion ne porte sur la régularité de la déclaration de créances ; l'article R.622-23 du code de commerce précise que la déclaration de créance doit contenir les éléments de nature à prouver l'existence et le montant de la créance si elle ne résulte pas d'un titre et qu'à cette déclaration doivent être joints sous bordereau les documents justificatifs, ceux-ci pouvant être produits en copie ; qu'à tout moment, le mandataire judiciaire peut demander la production des documents qui n'auraient pas été joints ; il ressort du rapprochement de ces deux textes que la production des documents justificatifs est un élément qui conditionne la régularité de la déclaration de créance et que le défaut de production invoqué par le mandataire judiciaire ne peut être considéré comme constituant une "discussion sur tout ou partie d'une créance" ; les régimes applicables selon qu'il s'agit de "discussion sur tout au partie de la créance" ou de défaut de production de pièces justificatives sont d'ailleurs complètement différents : dans le premier cas la réponse doit être apportée par le créancier dans le délai impératif de 30 jours suivant l'avis de contestation adressé par le mandataire judiciaire au créancier, alors que dans le second cas, le mandataire judiciaire peut demander la production des pièces justificatives à tout moment et celles-ci peuvent être produites à tout moment sans que s'applique le délai impératif de trente jours (d'ailleurs, si le créancier n'a toujours pas produit ses pièces justificatives devant le juge-commissaire appelé à statuer, celui-ci ne peut rejeter la créance sans avoir lui-même demandé au créancier de produire les justificatifs) ; en l'espèce, le mandataire judiciaire a, par lettre recommandée avec AR du 3 septembre 2018, informé le Comptable du PRS 51 que sa créance était contestée sur plusieurs fondements : - déclaration de créances assortie d'aucun justificatif, - versements effectués entre les mains de l'huissier de justice non pris en compte, notamment concernant les impôts sur les revenus 2015 et 2016, - nécessité de fixer l'impôt sur le revenu 2017 à un solde de 9 757 euros ; si les deux derniers points sont constitutifs de contestations du montant de la créance déclarée par le Comptable du PRS 51, le premier point ne porte en revanche que sur la régularité de la déclaration ; or, le juge-commissaire a rejeté les créances déclarées par le Comptable du PRS 51 au motif que ce dernier n'avait pas fait valoir ses observations dans les 30 jours suivant cette lettre du 3 septembre 2018, alors que la sanction du délai de trente jours n'est pas applicable en cas de contestation sur la contestation de la régularité de la déclaration (quand bien même d'autres contestations porteraient parallèlement sur le montant de la créance déclarée) ; par conséquent, le Comptable du PRS 51 était recevable à faire valoir sa créance devant le juge-commissaire nonobstant l'absence de réponse de sa part dans le délai de 30 jours imparti par l'article L.622-27 précité ; aussi l'ordonnance déférée sera-t-elle infirmée sur ce point ;
1) ALORS QUE l'absence de justificatifs joints à la déclaration de créance ne caractérise pas une irrégularité de la déclaration de créance ; qu'en retenant, pour autoriser le comptable public à discuter de la proposition de rejet de sa créance contenue dans la lettre de contestation du mandataire judiciaire du 3 septembre 2018 à laquelle il n'avait pas répondu dans le délai de trente jours, que cette lettre, en ce qu'elle indiquait que la déclaration de créance n'était assortie d'aucune justificatif, portait notamment sur la régularité de la déclaration de créance, la cour d'appel a violé les articles L. 622-25 et R. 622-23 du code de commerce ;
2) ALORS QUE s'il y a discussion sur tout ou partie d'une créance autre que celles mentionnées à l'article L. 625-1 du code de commerce, le mandataire judiciaire en avise le créancier intéressé en l'invitant à faire connaître ses explications et le défaut de réponse dans le délai de trente jours interdit toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire judiciaire, à moins que la discussion ne porte sur la régularité de la déclaration de créances ; qu'en retenant, pour autoriser le comptable public à discuter de la proposition de rejet de sa créance contenue dans la lettre du mandataire judiciaire du 3 septembre 2018 à laquelle il n'avait pas répondu dans le délai de trente jours et admettre ladite créance, que cette lettre, en ce qu'elle indiquait que la déclaration de créance n'était assortie d'aucun justificatif, concernait la régularité de la déclaration, et contenait donc à la fois une contestation sur la régularité de la déclaration et une contestation sur une partie de la créance, quand la lettre de contestation qui mentionnait l'absence de justificatifs et en sollicitait la communication, contestait le montant de la créance et invoquait l'absence de prise en considération de paiements effectuées par Mme B..., débitrice en redressement judiciaire, et constituait donc une discussion sur tout ou partie de la créance au sens de l'article L. 622-27 du code de commerce, la cour d'appel a violé l'article L. 622-27 du code de commerce ;
3) ALORS, en toute hypothèse, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que dans sa lettre du 3 septembre 2018 adressée à la direction générale des finances publiques du pôle recouvrement de la Marne, le mandataire judiciaire a indiqué que Mme B..., débiteur en redressement judiciaire, entendait « contester [la] créance » qui [n'était assortie d'aucun justificatif. Madame B... souhaiterait être en possession des différents rôles », et que « par conséquent » () en l'absence de justificatif, je proposerai le rejet de la totalité de votre créance au mandataire judiciaire », qu'en retenant néanmoins que le mandataire judiciaire avait contesté la régularité de la déclaration de créance, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre susvisée, a violé l'article 1103 du code civil, ensemble le principe susvisé.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR admis au passif du redressement judiciaire de Mme B... la créance du comptable public du pôle recouvrement spécialisé de la Marne pour les montants suivants : créances hypothécaires, subsidiairement privilégiées de 27 513,53 euros, créances privilégiées de 106 466,72 euros ;
AUX MOTIFS QUE sur le bien-fondé de la déclaration de créance du Comptable du PRS 51 : celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; le Comptable du PRS 51 produit aux débats la déclaration de créance qu'il avait adressée à la SCP [...] ès qualités et qui reprend en détail, rôle par rôle, les différents impôts dus par Mme B..., ainsi que les avis qui ont été adressés à cette dernière pour chacun des impôts correspondants ; Mme B... ne conteste pas les montants de ses impôts, se bornant à soutenir que la totalité de ses versements n'auraient pas été pris en compte ; c'est à elle qu'il appartient de prouver les paiements qu'elle aurait faits et qui ne seraient pas pris en compte par l'administration fiscale ; or, la comparaison entre, d'une part, la liste des versements pris en compte par le Trésor public, telle qu'elle figure aux pages 7 et 8 de ses dernières conclusions, et d'autre part les paiements surlignés par Mme B... sur les relevés de compte bancaire qu'elle produits, ne fait apparaître qu'un seul paiement non pris en compte par le fisc : il s'agit du chèque n° [...] débité le 21 octobre 2015 pour un montant de 1 000 euros ; toutefois, Mme B... ne produit pas la photocopie de ce chèque, de sorte qu'il est impossible de déterminer si ce chèque débité de son compte l'a bien été au profit du Trésor public ; il ressort de l'ensemble de ces éléments que les sommes réclamées par le Comptable du PRS 51 sont dues par Mme B... et doivent être admises au passif de son redressement judiciaire, à savoir les sommes suivantes : - créances hypothécaires subsidiairement privilégiées : 27 513,53 euros (dont 26 407,53 euros au titre des impôts sur le revenu et 1 106 euros au titre des taxes d'Habitation), - créances privilégiées : 106 466,72 euros (dont 102 737,15 euros au titre des impôts sur le revenu et 3 729,57 euros au titre des taxes d'habitation) ;
ALORS QUE les contestations relatives au recouvrement qui portent sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, et sur l'exigibilité de l'impôt relèvent, en matière d'impôts directs, de la compétence du juge administratif ; qu'en statuant sur le montant de la créance déclarée par l'administration fiscale au passif de Mme B... au titre de l'impôt sur le revenu et de la taxe d'habitation compte tenu des paiements effectués quand il lui appartenait de renvoyer les parties à faire trancher la question relative à au montant de la dette compte tenu des paiements effectués, dont dépendait la solution du litige, par la juridiction administrative exclusivement, la cour d'appel a violé la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble les articles L. 281 et L. 199 du livre des procédures fiscales.

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5 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 27 janvier 2021, 18-21.168, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 27 janvier 2021, 18-21.168, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Cassation

MOTS CLES DE L'ARRET :

ANALYSE DE L'ARRET :



DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
CH.B


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 27 janvier 2021



Cassation

Mme DARBOIS, conseiller le plusancien faisant fonction de président


Arrêt n° 69 F-P+I
Pourvoi n° F 18-21.168



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 27 JANVIER 2021
La société Compagnie réunionnaise des tabacs (Coretab), société par actions simplifiée, dont le siège est zone industrielle n° 2, 97410 Saint-Pierre, a formé le pourvoi n° F 18-21.168 contre l'arrêt rendu le 11 mai 2018 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre civile TGI), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. X... V..., domicilié c/o recette régionale des douanes de la Réunion, 13 rue Jules Aubert, BP 02041cedex, 97488 Saint-Denis,
2°/ à la direction régionale des douanes et droits indirects de la Réunion, dont le siège est 7 avenue de la Victoire, 97488 Saint-Denis cedex,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Compagnie réunionnaise des tabacs, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. V... et de la direction régionale des douanes et droits indirects de la Réunion, après débats en l'audience publique du 1er décembre 2020 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 11 mai 2018), la société Compagnie réunionnaise des tabacs (la société Coretab), a pour activité, sur l'Ile de la Réunion, la fabrication de cigarettes, qu'elle vend à trois sociétés de distribution Philip Morris Réunion, American Tobacco Réunion et Altadis OI. Ces sociétés distributrices, qui ne sont pas propriétaires des marques sous lesquelles elles commercialisent leurs cigarettes, paient des redevances aux sociétés de leurs groupes respectifs qui en sont titulaires.
2. La société Coretab a fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement (AMR) émis par l'administration des douanes, le 2 avril 2014, au titre de l'octroi de mer intégrant à l'assiette de cette taxe les redevances payées par les sociétés distributrices aux sociétés propriétaires des marques.
3. L'administration des douanes ayant rejeté sa contestation, la société Coretab l'a assignée en annulation de l'AMR, ainsi que M. V..., inspecteur régional de première classe, en qualité de signataire de cet avis.Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. La société Coretab fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « que selon l'article 9 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004, la base d'imposition de l'octroi de mer interne est constituée par le prix hors taxe sur la valeur ajoutée et hors accises pour les opérations mentionnées au 2° de l'article 1er, à savoir les livraisons de biens faites à titre onéreux par des personnes qui exercent des activités de production ; que le prix, assiette de l'octroi de mer interne, ne peut être constitué que de sommes versées par l'acquéreur au vendeur, à l'exclusion des sommes versées à des tiers ; qu'en l'espèce, il était constant que la société Coretab fabriquait et livrait à ses clients des cigarettes, dont les marques étaient détenues par d'autres sociétés, et que le litige portait sur l'intégration, dans l'assiette de l'octroi de mer dû par la société Coretab, de redevances versées par ses clients aux tiers propriétaires des marques ; qu'en jugeant que ces redevances, non perçues et non incluses dans le prix de vente fixé et effectivement perçu par la société Coretab, devaient être comprises dans la base de calcul de l'octroi de mer dû par la société Coretab, la cour d'appel a violé l'article 9 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1, 2, 3 et 9 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004, dans sa rédaction applicable au moment des faits :
5. Selon ces textes, les livraisons de biens à titre onéreux par des personnes qui exercent des opérations de fabrication, de transformation ou de rénovation de biens meubles corporels ou des opérations agricoles ou extractives dans les régions de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion sont soumises à l'octroi de mer dont la base d'imposition est le prix de production, hors taxe sur la valeur ajoutée.
6. Pour dire que l'assiette de l'octroi de mer dont était redevable la société Coretab était composée du prix des cigarettes payé par les sociétés distributrices ainsi que des redevances de marque réglées par ces sociétés aux sociétés de leur groupe qui en étaient titulaires, l'arrêt retient que les sociétés distributrices ne pouvaient vendre les biens acquis auprès de la société Coretab qu'après l'acquittement de ces redevances et qu'elles ne devenaient propriétaires de ces biens qu'à la suite de ce paiement. Il retient encore que le prix, au sens des articles 3 et 9 de la loi du 2 juillet 2004, doit être défini comme les sommes dues par l'acquéreur pour recevoir la pleine livraison du bien.
7. En statuant ainsi, alors que l'octroi de mer est assis sur le prix de vente de biens meubles fabriqués par la société qui en est redevable, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une exigence qui a élargi l'assiette légale, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion autrement composée ;
Condamne la direction régionale des douanes et droits indirects de la Réunion et M. V... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la direction régionale des douanes et droits indirects de la Réunion et M. V... et les condamne à payer à la société Compagnie réunionnaise des tabacs la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie réunionnaise des tabacs.
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR rejeté l'ensemble des demandes formées par la société Compagnie réunionnaise des tabacs auprès de l'administration des douanes pour exclure de l'assiette de l'octroi de mer les redevances versées par les sociétés distributrices aux sociétés propriétaires des marques de cigarettes ;
AUX MOTIFS QUE « Aux termes de l'article 1 de la loi du 2 juillet 2004 sur l'octroi de mer, dans la région de la Réunion, les livraisons de biens faites à titre onéreux par des personnes qui exercent des activités de production sont soumises à une taxe dénommée octroi de mer ; la livraison d'un bien s'entend du transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble comme un propriétaire. Par ailleurs, l'article 9 de cette même loi dispose que la base d'imposition est constituée par les prix hors taxe sur la valeur ajoutée et hors accises. Il n'est nulle part prévu que la base d'imposition concernant l'octroi de mer interne sera calquée sur celle de la TVA. L'absence de toutes références à la TVA dans la définition de la base d'imposition pour l'octroi de mer interne doit conduire à écarter les règles propres à la TVA. Les livraisons soumises à l'octroi de mer interne visent les opérations qui entraînent le transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble comme un propriétaire. Pour que les sociétés concessionnaires puissent disposer des produits livrés par la CORETAB et les revendre à la Réunion, elles doivent s'acquitter auprès des sociétés propriétaires des marques, d'une redevance. Même si cette redevance n'est pas payée par le fabricant des cigarettes, elle fait partie du prix des produits livrés puisque leur destinataire ne pourra les revendre qu'après paiement de la redevance. Dès lors, elle doit être comprise dans la base de calcul de l'octroi de mer interne sur les livraisons faites par la CORETAB qui pouvait toujours en répercuter l'impact dans la négociation du prix des produits livrés. Donc c'est par des motifs pertinents que le premier juge a rejeté la contestation de la CORETAB et il convient de confirmer le jugement déféré » ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Attendu en droit que les articles 1, 3 et 9 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 disposent notamment que : "sont soumises à une taxe dénommée octroi de mer : (...) 2°-les livraisons de biens effectuées à titre onéreux par les personnes qui les ont produits", "pour l'application de la présente loi : 2° est considérée comme livraison d'un bien le transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble corporel comme un propriétaire", "la base d'imposition est constituée par : (...) 2° - les prix hors taxes sur la valeur ajoutée et hors accises pour les opérations mentionnées au 2° de l'article 1er" ; Attendu en l'espèce et liminairement que la demanderesse soutient s'agissant de l'assiette de la taxe litigieuse qu'en "réalité c'est bien à la notion d'assiette de la TVA qu'il convient de se référer, telle que visée à l'article 267 CGI, lequel ne vise à aucun moment les redevances payées au titre de la commercialisation par l'acheteur" ; Que cependant si tel était réellement le cas, l'article 9 ne préciserait pas quelle serait l'assiette dans les termes qui sont repris plus haut mais procéderait soit à la reprise des termes des articles 266 et suivant du CGI voire par simple renvoi aux dispositions applicables à la TVA ; Que dans ces conditions, il résulte du fait que les assiettes des deux fiscalités étant définies de manières distinctes et autonomes l'une de l'autre, il ne peut aucunement être recouru aux règles applicables à l'assiette de la TVA pour définir celle de l'octroi de mer interne ; Que par ailleurs et s'agissant notamment du rapport parlementaire N° 1612 rédigé par Monsieur C..., Député, s'il précise clairement au titre de la réforme de 2004 aboutissant à la rédaction actuelle de l'article 1er de la loi : "on parle dans ce cas d'octroi de mer "interne". Cet article ajoute par rapport au texte de 1992 une définition de la notion de livraison, en reprenant celle qui est donnée à l'article 256 II CGI : la livraison d'un bien est le "transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble corporel comme un propriétaire"', de sorte qu'effectivement le parlementaire note qu'à ce titre la loi de 2004 relative à l'octroi de mer interne reprend expressément des éléments applicables à la TVA, il en va autrement lorsqu'il procède à l'analyse de l'article 9 de cette même loi relatif à l'assiette ; Qu'à ce titre, il précise : "la base d'imposition de l'octroi de mer sur les livraisons reste égale au prix hors TVA de l'article 9, mais la réfaction de 15% introduite en 1992 pour tenir compte des frais de commercialisation des productions locales est supprimée. Celle-ci est en effet remplacée par le dispositif de différentiel de taux prévu en faveur des productions locales par les articles 28 et 29 du projet de loi. En outre, la déduction des taxes parafiscales n'est plus mentionnée, du fait de la suppression, à compter du 1er janvier 2004, de la parafiscalité", de sorte que s'agissant de l'assiette de l'octroi de mer, le député ne précise aucunement qu'il soit fait un renvoi quelconque au dispositif législatif voire réglementaire applicable en matière de TVA ; Que par ailleurs et s'agissant du rapport sénatorial n° 357 relatif à la même loi, il ne peut qu'être constaté que si son commentaire de l'article 1er de la loi, reprend la comparaison avec la TVA, il ne le fait pas plus dans le rapport parlementaire n° 1612, s'agissant de l'assiette de la taxe ; Qu'ainsi et contrairement à ce qui est affirmé en demande, l'assiette de l'octroi de mer interne ne peut aucunement être envisagée de manière identique ni même similaire à celle de la TVA ; Que s'agissant des redevances ou royalties réintégrées dans la base d'imposition par l'Administration, force est de constater qu'aux termes mêmes des écritures de la demanderesse, il apparaît que les sociétés distributrices des cigarettes par elle produites, ne peuvent se défaire de ces mêmes biens par la vente qu'à la condition qu'elles règlent une somme définie à leur société mère ; Qu'il résulte de ce simple constat que le pouvoir de disposition des sociétés distributrices, qui sont les clientes de la demanderesse, est limité en cas de non-paiement de cette somme ; Qu'en effet à défaut de règlement de la redevance, les distributeurs ne peuvent être considérés comme l'équivalent d'un propriétaire, leurs droits sur les marchandises étant limités ; Que par ailleurs s'il est constant que la référence au pouvoir d'agir comme propriétaire est mentionné, s'agissant de l'octroi de mer interne, au rang d'application de cette taxe, cette circonstance n'est pas de nature à faire totalement obstacle aux observations de l'Administration douanière dès lors que l'assiette de cette fiscalité est constituée du prix ; Que ce dernier par l'application combinée des dispositions des articles 3 et 9 de la loi de 2004 peut être considéré comme les sommes dues par l'acquéreur aux fins de recevoir la pleine livraison du bien c'est-à-dire ce qu'il a dû payer pour en être considéré comme pleinement propriétaire au sens de cette même loi ; Qu'à ce titre il a d'ores et déjà été mentionné plus haut que le pouvoir de disposition des sociétés distributrices, à défaut de paiement des redevances litigieuses, était limité de sorte que sans le paiement de ces sommes, redevances ou royalties, elles ne peuvent être considérées comme pleinement propriétaires ; Qu'il résulte donc de ce qui précède que les redevances visées par le service régional d'enquête sont à inclure au prix des cigarettes payé par les sociétés distributrices, assiette de l'octroi de mer interne ; Que dans ces conditions, l'ensemble des demandes formées par la SAS CORETAB doit être rejeté » ;
1) ALORS QUE selon l'article 9 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004, la base d'imposition de l'octroi de mer interne est constituée par le prix hors taxe sur la valeur ajoutée et hors accises pour les opérations mentionnées au 2° de l'article 1er, à savoir les livraisons de biens faites à titre onéreux par des personnes qui exercent des activités de production ; que le prix, assiette de l'octroi de mer interne, ne peut être constitué que de sommes versées par l'acquéreur au vendeur, à l'exclusion des sommes versées à des tiers ; qu'en l'espèce, il était constant que la société Coretab fabriquait et livrait à ses clients des cigarettes, dont les marques étaient détenues par d'autres sociétés, et que le litige portait sur l'intégration, dans l'assiette de l'octroi de mer dû par la société Coretab, de redevances versées par ses clients aux tiers propriétaires des marques ; qu'en jugeant que ces redevances, non perçues et non incluses dans le prix de vente fixé et effectivement perçu par la société Coretab, devaient être comprises dans la base de calcul de l'octroi de mer dû par la société Coretab, la cour d'appel a violé l'article 9 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004.
2) ALORS QUE selon le paragraphe 2° de l'article 1er de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004, sont soumises à l'octroi de mer les livraisons de biens faites à titre onéreux par des personnes qui exercent des activités de production ; qu'au sens de ce texte, la livraison d'un bien s'entend du transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble corporel comme un propriétaire ; que selon l'article 2 de la même loi, sont considérées comme des activités de production, assujetties à l'octroi de mer, les opérations de fabrication, de transformation ou de rénovation de biens meubles corporels, ainsi que les opérations agricoles et extractives ; qu'en l'espèce, il était constant que la société Coretab fabriquait et livrait à ses clients des cigarettes, dont les marques étaient détenues par d'autres sociétés, et que le litige portait sur l'intégration, dans l'assiette de l'octroi de mer dû par la société Coretab, de redevances versées par ses clients aux tiers propriétaires des marques ; qu'en jugeant que ces redevances, versées par les clients de la société Coretab en contrepartie non pas des biens meubles corporels que constituent les cigarettes livrées, mais en contrepartie de droits incorporels sur les marques desdites cigarettes, devaient être comprises dans la base de calcul de l'octroi de mer dû par la société Coretab, la cour d'appel a violé les articles 1er et 2 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004.
3) ALORS QUE la propriété intellectuelle est indépendante de la propriété de l'objet matériel ; qu'en l'espèce, il était constant que la société Coretab fabriquait et livrait à ses clients des cigarettes, dont les marques étaient détenues par d'autres sociétés, et que le litige portait sur l'intégration, dans l'assiette de l'octroi de mer dû par la société Coretab, de redevances versées par ses clients aux tiers propriétaires des marques en contrepartie de licences d'exploitation desdites marques ; qu'en affirmant que le paiement des redevances conditionnait pour les clients le pouvoir de disposer des produits livrés par la société Coretab, pour inclure ces redevances dans la base de calcul de l'octroi de mer dû par la société Coretab, la cour d'appel a violé la règle selon laquelle la propriété intellectuelle est indépendante de la propriété de l'objet matériel.

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6 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 27 janvier 2021, 18-20.783, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 27 janvier 2021, 18-20.783, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Cassation

MOTS CLES DE L'ARRET :

ANALYSE DE L'ARRET :



DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
CH.B


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 27 janvier 2021



Cassation

Mme DARBOIS, conseiller le plusancien faisant fonction de président


Arrêt n° 72 F-P
Pourvoi n° N 18-20.783



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 27 JANVIER 2021
La société Electricité de France, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° N 18-20.783 contre l'ordonnance rendue le 27 juillet 2018 en la forme des référés par le président du tribunal de grande instance de Paris, dans le litige l'opposant à la société GD déménagement, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Michel-Amsellem, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Electricité de France, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société GD déménagement, et l'avis de M. Douvreleur, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er décembre 2020 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Michel-Amsellem, conseiller rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le président d'un tribunal de grande instance en la forme des référés (Paris, 27 juillet 2018), la société Electricité de France (la société EDF) a lancé, par un avis de marché publié le 3 mai 2018 au Journal officiel de l'Union européenne, une procédure négociée pour le renouvellement d'un accord-cadre multi-attributaire portant sur des prestations de déménagement de bureaux, matériels informatiques et bureautiques, archives et manutentions diverses pour la France métropolitaine. Ce marché était divisé en quatre lots représentant chacun une zone géographique. La date de dépôt des candidatures était fixée au 23 mai 2018.
2. Par quatre courriels du 30 mai 2018, la société EDF a demandé à la société GD déménagement regroupant cinquante quatre entreprises, qui avait déposé une offre pour les quatre lots, un complément d'information. Le 2 juillet 2018, elle lui a notifié le rejet de sa candidature au motif qu'elle ne respectait pas un certain nombre de critères d'aptitude, notamment, qu'elle n'avait pas produit les certificats délivrés par les administrations concernant le respect de ses obligations sociales et fiscales, ni un extrait de l'inscription de chaque opérateur au registre du commerce des sociétés, ni, enfin, la certification ISO de certains des membres du groupement.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa septième branche, ci-après annexé
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. La société EDF fait grief à l'ordonnance de constater que des atteintes ont été portées aux règles de publicité et de mise en concurrence régissant l'attribution du marché public, de suspendre l'ensemble des décisions par lesquelles elle a écarté la candidature de la société GD déménagement et de lui ordonner de corriger les manquements relevés dans les documents de la consultation et dans la conduite de la procédure, ainsi que de reprendre la procédure de passation en se conformant à ses obligations de publicité et de mise en concurrence, alors « que seules sont fondées à saisir le juge du référé précontractuel pour mettre fin aux manquements d'une entité adjudicatrice à ses obligations de publicité et de mise en concurrence les personnes susceptibles d'être lésées par de tels manquements ; que ne remplissent pas cette condition les personnes dont la candidature devait nécessairement être écartée faute pour la déclaration du groupement candidat de comporter la signature de tous les membres de ce groupement ; qu'en se bornant à considérer que des atteintes avaient été portées aux règles de publicité et de mise en concurrence régissant l'attribution du marché litigieux, sans rechercher, comme il y était invité, si la candidature de la société GD déménagement, était régulière au regard notamment de l'absence de signature par l'ensemble des membres du groupement de la déclaration de groupement momentané d'entreprises solidaires, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a privé sa décision de base légale au regard de l'article 5 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique, ensemble l'article 45 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 5 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique et l'article 45 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, dans sa version antérieure au décret n° 2018-1075 du 3 décembre 2018 :
5. Selon le premier de ces textes, en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par des entités adjudicatrices des contrats de droit privé ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, les personnes ayant intérêt à conclure l'un de ces contrats et susceptibles d'être lésées par ce manquement peuvent saisir le juge avant la conclusion du contrat. Il résulte du second que les candidatures et les offres des groupements d'opérateurs économiques, qui participent aux procédures de passation de marchés publics, sont présentées soit par l'ensemble des membres du groupement, soit par un mandataire qui justifie des habilitations nécessaires pour représenter les autres membres du groupement.

6. Pour suspendre l'ensemble des décisions par lesquelles la société EDF a écarté la candidature de la société GD déménagement et lui ordonner de corriger les manquements relevés dans les documents de la consultation et dans la conduite de la procédure de passation du marché, ainsi que de reprendre celle-ci en se conformant à ses obligations de publicité et de mise en concurrence, l'ordonnance, après avoir relevé que l'arrêté du 29 mars 2016 fixe la liste des renseignements et des documents pouvant être demandés aux candidats aux marchés publics et que ces dispositions n'autorisent la société EDF à exiger, dès le stade de la remise des candidatures, que des documents figurant parmi ceux limitativement visés par cet arrêté, retient que la société GD déménagement n'a pas à produire, lors de la phase de candidature, une attestation concernant sa situation fiscale et sociale ni un extrait de moins de trois mois de son inscription au registre du commerce. Après avoir ensuite relevé que si des certifications, telles les certifications ISO 14001 et ISO 9001, peuvent être demandées en application de l'article 44-V du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, l'ordonnance retient que celles-ci doivent être analysées de manière globale et non individuellement pour chaque entreprise constituant ce groupement.
7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il y était invité, si la candidature de la société GD déménagement était régulière au regard de l'absence de signature de la déclaration de groupement momentané d'entreprises solidaires par l'ensemble des membres du groupement, cependant que la société EDF lui avait demandé de régulariser cette situation et accordé un délai pour y procéder, régularisation à défaut de laquelle la société EDF était fondée à invoquer l'absence d'intérêt à agir de la société GD déménagement, le juge des référés a privé sa décision de base légale.
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
8. La société EDF fait le même grief à l'ordonnance, alors « que le principe selon lequel l'appréciation des capacités d'un groupement d'opérateurs économiques est globale n'interdit pas au responsable du marché d'exiger que chaque membre du groupement candidat fasse preuve de l'aptitude requise pour l'exécution de l'ensemble des prestations du marché ; qu'en l'occurrence, les documents de la consultation exigeaient que chaque membre du groupement fournisse individuellement les certifications ISO 9001 et ISO 14001 afin de s'assurer que tous les déménagements objets du marché seraient assortis des mêmes garanties de service ; qu'en jugeant néanmoins que ces certifications devaient être analysées de manière globale et non individuellement, après avoir cependant relevé que la société EDF était fondée à exiger ces certifications au stade des candidatures, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a violé les dispositions du V de l'article 44 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 44 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics :
9. Il résulte de ce texte, d'une part, qu'en ce qui concerne les capacités techniques et professionnelles, l'acheteur peut imposer des conditions garantissant que les opérateurs économiques possèdent les ressources humaines et techniques et l'expérience nécessaires pour exécuter le marché public en assurant un niveau de qualité approprié et, d'autre part, que l'appréciation des capacités d'un groupement d'opérateurs économiques est globale et qu'il n'est pas exigé que chaque membre du groupement ait la totalité des capacités requises pour exécuter le marché public.
10. Pour suspendre l'ensemble des décisions par lesquelles la société EDF a écarté la candidature de la société GD déménagement et lui ordonner de corriger les manquements relevés dans les documents de la consultation et dans la conduite de la procédure de passation du marché, ainsi que de reprendre celle-ci en se conformant à ses obligations de publicité et de mise en concurrence, l'ordonnance retient que si des certifications, telles les certifications ISO 14001 et ISO 9001, peuvent être demandées en application de l'article 44-V du décret du 25 mars 2016, celles-ci doivent être analysées de manière globale et non individuellement pour chaque entreprise constituant ce groupement.
11. En statuant ainsi, alors qu'aucune disposition de l'article 44 du décret précité n'interdit à l'acheteur d'exiger, lorsque les spécificités du marché le justifient, que chaque membre du groupement candidat fasse preuve de l'aptitude requise pour l'exécution des prestations de celui-ci, le juge des référés a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 27 juillet 2018 en la forme des référés, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant le président du tribunal judiciaire de Paris ;

Condamne la société GD déménagement aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Electricité de France la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société EDF.
IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'avoir constaté que des atteintes avaient été portées aux règles de publicité et de mise en concurrence régissant l'attribution du marché public, d'avoir suspendu l'ensemble des décisions par lesquelles la société EDF avait écarté la candidature de la société GD Déménagement, et d'avoir ordonné à la société EDF de corriger les manquements relevés dans les documents de la consultation et dans la conduite de la procédure, et de reprendre la procédure de passation en se conformant à ses obligations de publicité et de mise en concurrence ;
AUX MOTIFS QUE, Sur la production des documents par le candidat à la souscription d'un marché public au moment de l'examen des candidatures, l'article 51-1 de l'ordonnance du 23 juillet 2015, l'article 50 du décret du 25 mars 2016 et l'article 55 du décret du 25 mars 2016 encadrent les conditions de participation à un marché public et ont vocation à s'appliquer à l'attribution du marché portant sur des prestations de déménagement de bureaux, matériels informatiques et bureautiques, archives et manutentions diverses de la société EDF pour toute la France Métropolitaine, hors Corse ; QUE l'arrêté du 29 mars 2016 fixe la liste des renseignements et des documents pouvant être demandés aux candidats aux marchés publics ; QUE ces dispositions n'autorisent donc la société EDF à exiger, dès le stade de la remise des candidatures, que des documents figurant parmi ceux limitativement visés par cet arrêté ; QUE, dès lors, la société GD Déménagement n'a pas à produire, lors de la phase de candidature, une attestation concernant sa situation fiscale et sociale ; QU'une simple déclaration sur l'honneur de la société GD Déménagement est donc seule exigible à ce stade de la procédure contractuelle ; QUE, concernant la remise d'un extrait de moins de trois mois de son inscription au registre du commerce de la société candidate, la société EDF n'a pas à demander un extrait Kbis de la société GD Déménagement, au stade de la candidature, en vue de la souscription d'un marché public conformément aux dispositions de l'article 55 du décret du 25 mars 2016 ;
QUE, Sur la méconnaissance des articles 44 et 55 du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, la société GD Déménagement est un groupement de 54 entreprises de déménagements réparties sur le territoire national ; QUE la certification ISO 14001 est une certification environnementale garantissant la mise en oeuvre d'un processus respectueux de l'environnement, tandis que la certification ISO 9001 garantit une organisation efficace et structurée de l'entreprise, permettant une haute qualité de service et de réactivité ; QUE la société EDF est fondée à exiger ces certifications au stade des candidatures en application de l'arrêté du 29 mars 2016 ; QUE la société GD Déménagement indique qu'aux termes de l'article 44 du décret du 25 mars 2016, ces certifications ne sont pas exigibles pour chaque entreprise constituant ce groupement, lorsqu'une candidature émane d'un groupement d'opérateurs économiques ; QU'en effet, la société GD Déménagement estime que les capacités techniques et professionnelles d'un groupement fondées sur ces certifications doivent faire l'objet d'une appréciation globale ; QUE la société EDF considère, quant à elle, que seuls 48 sur 54 membres du groupement GD Déménagement ont signé, après sa demande de régularisation du 30 mai 2018, la déclaration des groupements momentanés d'entreprises concernant ces certifications ; QUE la société EDF estime donc que la candidature de la société GD Déménagement doit être rejetée ; QU'il ressort des dispositions de l'article 44 V du décret du 25 mars 2016, qu'au moment de l'appréciation de la candidature de la société GD Déménagement par la société EDF, les certifications ISO 14001 et ISO 9001, doivent être analysées de manière globales et non individuellement pour chaque entreprise constituant ce groupement ; QUE, de plus, l'article 55-I du décret du 25 mars 2016 indique qu'un délai approprié et identique pour tous peut être attribué par l'acheteur en cas de candidature absentes ou incomplètes ; QUE la société GD Déménagement a bénéficié d'un délai de 5 ou de 7 jours complémentaires, selon que l'on compte le jour du point de départ et le jour du terme du délai ou pas, après la date de clôture de dépôt des candidatures ; QUE ce délai apparaît relativement court pour permettre à l'ensemble des membres de la société GD Déménagement, soit 54 membres de se procurer les documents sollicités en temps utile et ne peut donc être considéré comme approprié ; QUE, dans ces conditions, il y a lieu de considérer que des atteintes ont été portées aux règles de publicité et de mise en concurrence régissant l'attribution du marché public litigieux par la SA EDF ; QU'en conséquence, il convient de suspendre l'ensemble des décisions par lesquelles la SA EDF a écarté la candidature du demandeur ;
1°) ALORS QUE seules sont fondées à saisir le juge du référé précontractuel pour mettre fin aux manquements d'une entité adjudicatrice à ses obligations de publicité et de mise en concurrence les personnes susceptibles d'être lésées par de tels manquements ; que ne remplissent pas cette condition les personnes dont la candidature devait nécessairement être écartée faute pour la déclaration du groupement candidat de comporter la signature de tous les membres de ce groupement ; qu'en se bornant à considérer que des atteintes avaient été portées aux règles de publicité et de mise en concurrence régissant l'attribution du marché litigieux, sans rechercher, comme il y était invité (cf. § 16 et s. des conclusions de la société EDF, p. 10 et s.), si la candidature de la société GD Déménagement, était régulière au regard notamment de l'absence de signature par l'ensemble des membres du groupement de la déclaration de groupement momentané d'entreprises solidaires, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a privé sa décision de base légale au regard de l'article 5 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique, ensemble l'article 45 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics ;
2°) ALORS QU' en tout état de cause, en s'abstenant de répondre au moyen par lequel EDF faisait valoir que la candidature du groupement GD Déménagement était irrégulière vingt cotraitants n'ayant pas signé la déclaration ni remis un quelconque document, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le principe selon lequel l'appréciation des capacités d'un groupement d'opérateurs économiques est globale n'interdit pas au responsable du marché d'exiger que chaque membre du groupement candidat fasse preuve de l'aptitude requise pour l'exécution de l'ensemble des prestations du marché ; qu'en l'occurrence, les documents de la consultation exigeaient que chaque membre du groupement fournisse individuellement les certifications ISO 9001 et ISO 14001 afin de s'assurer que tous les déménagements objets du marché seraient assortis des mêmes garanties de service ; qu'en jugeant néanmoins que ces certifications devaient être analysées de manière globale et non individuellement, après avoir cependant relevé que la société EDF était fondée à exiger ces certifications au stade des candidatures, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a violé les dispositions du V de l'article 44 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics ;
4°) ALORS QUE les juges ont l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que le courriel du 30 mai 2018 adressé par la société EDF à la société GD Déménagement lui octroyait sans ambiguïté un délai de sept jours pour régulariser son dossier de candidature incomplet, en précisant expressément que les éléments étaient à communiquer « avant le 6 juin 2018 à 14h » ; qu'ainsi, la régularisation pouvait intervenir le jour de l'expiration du délai supplémentaire accordé ; qu'en énonçant que la société GD Déménagement avait bénéficié d'un délai de cinq ou de sept jours complémentaires, selon que l'on compte le jour du point de départ et le jour du terme du délai ou pas, après la date de clôture de dépôt des candidatures, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a dénaturé les termes clairs et précis du courriel du 30 mai 2018, en violation de l'obligation précitée ;
5°) ALORS QUE le délai approprié et identique pour tous que le responsable de marché a la faculté d'accorder aux candidats pour compléter leur dossier de candidature n'est encadré par aucune durée minimale et doit être apprécié au regard du temps dont disposaient les candidats pour présenter leur candidature initiale ; qu'en déduisant le caractère inapproprié du délai de sept jours octroyé après la date de clôture de dépôt des candidatures, de la seule taille du groupement GD Déménagement, sans prendre en considération la nature des documents sollicités et le délai total dont avait bénéficié le groupement pour les produire, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a violé les dispositions du I de l'article 55 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics ;
6°) ALORS QU' en tout état de cause, dans ses conclusions en défense (cf. § 12 et s., p. 8 et s.), la société EDF a rappelé que la société GD Déménagement avait bénéficié d'un délai total de 27 jours pour présenter une candidature complète et a fait valoir que le délai de sept jours supplémentaires octroyé au groupement ne saurait être regardé comme insuffisant, au regard du délai maximal de dix jours prévu par les anciennes dispositions de l'article 52 du code des marchés publics et de la nature des pièces sollicitées, qui étaient des documents standards, dont le groupement prétendait sans l'établir de ne pas être en mesure de les réunir ; qu'en se bornant à affirmer que le délai octroyé apparaissait relativement court pour permettre à l'ensemble des membres de la société GD Déménagement, soit 54 membres, de se procurer les documents sollicités en temps utile et ne pouvait donc être considéré comme approprié, le juge des référés a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
7°) ALORS QUE dans ses conclusions (cf. p. 11), la société EDF a fait valoir que, dans le cadre d'une procédure négociée, exiger au stade de la candidature des pièces dont l'absence ferait obstacle à l'attribution du marché afin de négocier avec les seuls candidats pouvant utilement prétendre à la conclusion du marché, ne viciait pas la procédure de passation ; qu'en se bornant à relever que l'attestation concernant la situation fiscale et sociale, ainsi que l'extrait Kbis, demandés aux candidats par la société EDF ne figurait pas parmi les documents limitativement visés par l'arrêté du 29 mars 2016, sans répondre à ce moyen pertinent, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

___________________ Cliuez sur l'intitulé de larrêt pour lire________________________
7 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 20 janvier 2021, 19-13.539, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 20 janvier 2021, 19-13.539, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Cassation

MOTS CLES DE L'ARRET :

ANALYSE DE L'ARRET :



DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
CH.B


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 20 janvier 2021



Cassation

M. RÉMERY, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 59 F-P+I
Pourvoi n° J 19-13.539







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 JANVIER 2021
La Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, société coopérative à capital et personnel variables, dont le siège est avenue de Montpelliéret Maurin, 34977 Lattes, a formé le pourvoi n° J 19-13.539 contre l'arrêt rendu le 17 janvier 2019 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme M... J..., domiciliée [...] ,
2°/ à M. R... J..., domicilié [...] ,
3°/ à la société Olivier Zanni, société civile professionnelle, dont le siège est [...] , prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Xamaline,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. et Mme J..., et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 17 janvier 2019) et les productions, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc (la banque) a consenti deux prêts à la société civile immobilière Xamaline (la SCI), les 27 mars et 24 avril 2007.
2. Par un arrêt du 24 mars 2011, devenu irrévocable le 28 juin 2012, confirmant partiellement un jugement du 29 juin 2010 du tribunal de grande instance de Châteauroux, la cour d'appel de Bourges a condamné la SCI à payer à la banque diverses sommes dues au titre de ces prêts.
3. La SCI a été mise en redressement judiciaire le 3 février 2014 puis en liquidation judiciaire le 9 février 2015 et les créances déclarées par la banque, sur le fondement de l'arrêt du 24 mars 2011, ont été admises par une ordonnance du juge-commissaire du 2 février 2015.
4. Assignés en paiement par la banque en leur qualité d'associés de la SCI, tenus en tant que tels des dettes de celles-ci à proportion de leur part dans le capital social, Mme M... J... et M. R... J... (les consorts J...) ont formé tierce-opposition à l'arrêt du 24 mars 2011 et demandé l'annulation des deux contrats de prêt et le rejet de la demande en paiement formée par la banque contre la SCI.




Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la tierce-opposition formée par les consorts J... contre l'arrêt de la cour d'appel de Bourges du 24 mars 2011, de réformer, à leur égard, le jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux du 29 juin 2010, de dire que les contrats de prêt souscrits par la SCI Xamaline auprès d'elle, les 27 mars 2007 et 24 avril 2007, étaient nuls pour non-conformité à l'objet social et de rejeter, en conséquence, ses demandes en paiement fondées sur ces deux contrats de prêt, alors « que l'autorité de la chose jugée qui s'attache à la décision irrévocable d'admission d'une créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire d'une société civile immobilière a pour conséquence que cette créance est définitivement consacrée, dans son existence et dans son montant, à l'égard des associés de la société civile immobilière ; qu'il en résulte que l'associé d'une société civile immobilière, qui n'a pas présenté à l'encontre de la décision d'admission d'une créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de cette société civile immobilière, la réclamation prévue par les dispositions de l'article R. 624-8 du code de commerce, est irrecevable à former tierce-opposition à l'encontre de la décision ayant consacré cette créance à l'égard de cette même société civile immobilière ; qu'en énonçant, dès lors, pour déclarer les consorts J... recevables en leur tierce-opposition à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Bourges en date du 24 mars 2011 et pour, en conséquence, réformer, à l'égard des consorts J..., le jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 29 juin 2010, dire que les contrats de prêt souscrits par la SCI Xamaline auprès de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, les 27 mars 2007 et 24 avril 2007 étaient nuls pour non-conformité à l'objet social et débouter la banque de toutes ses demandes en paiement fondées sur ces deux contrats de prêt, que c'était en vain que la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc prétendait qu'à défaut pour les consorts J... d'avoir exercé un recours à l'encontre de l'état des créances de la procédure de liquidation judiciaire de la SCI Xamaline dans le délai d'un mois à compter de sa publication au BODACC le 28 février 2015, les créances en litige avaient acquis l'autorité de la chose jugée à l'égard de tous et que les consorts J... étaient irrecevables à former toute nouvelle contestation portant sur l'existence, la nature ou le quantum des créances ainsi admises définitivement, qu'en effet, l'admission définitive des créances de la banque, dans le cadre et pour les besoins de la liquidation judiciaire de la SCI Xamaline, n'interdisait nullement aux associés, qui n'étaient ni plus ni moins parties à cette procédure collective qu'à l'instance précédente devant la cour d'appel de Bourges, d'exercer devant un juge le recours effectif reconnu par l'article 6, §1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'au demeurant, l'examen du bordereau de déclaration de créances montrait que la banque n'avait pas déclaré d'autre créance que celles résultant précisément du jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 29 juin 2010, confirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Bourges en date du 24 mars 2011, qui était déjà définitive à la suite du rejet du pourvoi en cassation formé contre cet arrêt le 28 juin 2012, quand l'autorité de la chose jugée, qui était, irrévocablement, attachée à l'ordonnance du 2 février 2015, par laquelle le juge-commissaire de la procédure de liquidation judiciaire de la SCI Xamaline avait admis les créances de la banque, résultant des prêts en date du 27 mars 2007 et du 24 avril 2007, telles qu'elles avaient été reconnues par le jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 29 juin 2010 et par l'arrêt de la cour d'appel de Bourges en date du 24 mars 2011, au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la SCI Xamaline, avait pour conséquence que ces créances étaient définitivement consacrées, dans leur existence et dans leur montant, à l'égard des consorts J... et que la tierce-opposition formée par ces derniers était irrecevable, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1351 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, qui ont été reprises par les dispositions de l'article 1355 du code civil, les dispositions de l'article 1857 du code civil et les dispositions de l'article R. 624-8 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1351, devenu 1355, du code civil, 583 du code de procédure civile et R. 624-8, alinéa 4, du code de commerce :
6. L'autorité de chose jugée qui s'attache à la décision irrévocable d'admission d'une créance au passif de la liquidation d'une société civile s'impose à ses associés, de sorte que, s'il n'a pas présenté contre une telle décision la réclamation prévue par l'article R. 624-8 du code de commerce, dans le délai fixé par ce texte, l'associé d'une société civile en liquidation judiciaire est sans intérêt à former tierce-opposition à la décision, antérieure, condamnant la société au paiement de ladite créance et sur le fondement de laquelle celle-ci a été admise.
7. Pour déclarer recevable la tierce-opposition formée par les consorts J..., l'arrêt retient que c'est en vain que la banque prétend qu'à défaut pour ceux-ci d'avoir exercé un recours contre l'état des créances dans le délai d'un mois à compter de sa publication au BODACC le 28 février 2015, la créance en litige a acquis l'autorité de la chose jugée à l'égard de tous, de sorte qu'ils seraient irrecevables à former toute nouvelle contestation portant sur l'existence, la nature ou le quantum de la créance ainsi admise définitivement, dès lors que l'admission définitive de la créance de la banque, dans le cadre et pour les besoins de la liquidation judiciaire de la SCI, n'interdisait nullement aux associés, qui n'étaient ni plus ni moins parties à cette procédure collective qu'à l'instance précédente devant cette cour, d'exercer devant un juge le recours effectif reconnu par le texte précité, qu'au demeurant l'examen du bordereau de déclaration de créance montre que la banque n'a pas déclaré d'autre créance que celle résultant précisément de l'arrêt du 24 mars 2011, qui était déjà définitive suite au rejet, le 28 juin 2012, du pourvoi formé contre cet arrêt et qu'ainsi les consorts J..., qui ont un intérêt manifeste à voir rétracter le jugement dès lors qu'ils sont poursuivis en paiement par la banque pour répondre des dettes sociales de la SCI à proportion de leurs parts dans le capital social, doivent être déclarés recevables en leur tierce-opposition.
8. En statuant ainsi, alors que les consorts J... ne contestaient pas ne pas avoir, en tant qu'intéressés au sens de l'article R. 624-8, alinéa 4, du code de commerce, présenté contre l'état des créances dans le délai d'un mois à compter de sa publication au BODACC, la réclamation prévue par ce texte, lequel leur ouvrait un accès effectif au juge au sens de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de sorte que, faute d'intérêt, leur tierce-opposition à l'arrêt condamnant la SCI, n'était pas recevable, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
9. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de la disposition de l'arrêt déclarant recevable la tierce-opposition formée par les consorts J... entraîne la cassation de toutes les autres dispositions de l'arrêt, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne Mme J... et M. J... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme J... et M. J... et les condamne in solidum à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un.MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré Mme M... J... et M. R... J... recevables en leur tierce opposition à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Bourges en date du 24 mars 2011, D'AVOIR réformé, à l'égard de Mme M... J... et de M. R... J..., le jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 29 juin 2010, D'AVOIR dit que les contrats de prêt souscrits par la société civile immobilière Xamaline auprès de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, les 27 mars 2007 et 24 avril 2007 étaient nuls pour non-conformité à l'objet social et D'AVOIR débouté, en conséquence, la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc de toutes ses demandes en paiement fondées sur ces deux contrats de prêt ;
AUX MOTIFS QUE « sur la recevabilité de la tierce opposition : / selon l'article 583 du code de procédure civile, " est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, à la condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque. Les créanciers et autres ayants cause d'une partie peuvent toutefois former tierce opposition au jugement rendu en fraude de leurs droits ou s'ils invoquent des moyens qui leur sont propres ". / Le droit effectif au juge, reconnu par l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, implique que l'associé d'une société civile immobilière en liquidation judiciaire, qui répond indéfiniment des dettes sociales à proportion de sa part dans le capital social, soit recevable à former tierce opposition au jugement ayant fixé une créance dans une instance en paiement engagée contre cette personne morale avant l'ouverture de sa liquidation judiciaire et, a fortiori, achevée avant celle-ci. / En l'espèce, la précédente instance introduite par la Crcam du Languedoc devant le tribunal de grande instance de Châteauroux et poursuivie devant la cour d'appel de Bourges, ayant donné lieu à l'arrêt en date du 24 mars 2011 qui a condamné la Sci Xamaline, représentée par M. K... J..., son gérant en exercice, au paiement de diverses sommes ; s'est déroulée en l'absence de Mme M... J... et de M. R... J... qui ne sont pas intervenus volontairement à cette instance et n'y ont pas été appelés par le créancier. / La Crcam du Languedoc ne peut soutenir que les associés, qui étaient censés avoir autorisé la Sci à demander que soit reconnue la responsabilité de la banque en raison des fautes commises par son préposé, étaient nécessairement représentés à cette précédente instance ou à celle engagée devant le tribunal de grande instance de Nîmes, alors que les statuts de la société prévoient expressément que le gérant, dans ses rapports avec les associés, a le pouvoir de représenter la société en justice et d'exercer toutes actions tant en demande qu'en défense, ce qui implique qu'il n'était pas tenu de solliciter une autorisation spéciale des associés. / C'est également en vain que la Crcam du Languedoc prétend qu'à défaut par Mme M... J... et M. R... J... d'avoir exercé un recours à l'encontre de l'état des créances dans le délai d'un mois à compter de sa publication au Bodaac le 28 février 2015, la créance en litige a acquis l'autorité de la chose jugée à l'égard de tous, de sorte qu'ils seraient irrecevables à former toute nouvelle contestation portant sur l'existence, la nature et le quantum de la créance ainsi admise définitivement. En effet, l'admission définitive de la créance de la Crcam du Languedoc, dans le cadre et pour les besoins de la liquidation judiciaire de la Sci Xamaline, n'interdit nullement aux associés, qui n'étaient ni plus ni moins parties à cette procédure collective qu'à l'instance précédente devant cette cour, d'exercer devant un juge le recours effectif reconnu par le texte précité. Au demeurant, l'examen du bordereau de déclaration de créance montre que la banque n'a pas déclaré d'autre créance que celle résultant précisément du jugement du 21 juin 2010 confirmé par l'arrêt du 24 mars 2011 qui était déjà définitive suite au rejet du pourvoi le 28 juin 2012. / Ainsi, Mme M... J... et M. R... J..., qui ont un intérêt manifeste à voir rétracter le jugement dès lors qu'ils sont poursuivis devant le tribunal de grande instance de Châteauroux, suivant assignation délivrée le 28 juillet 2017 par la Crcam du Languedoc, pour répondre des dettes sociales de la Sci Xamaline à proportion de leur part dans le capital social, doivent être déclarés recevables en leur tierce opposition. / Sur l'irrecevabilité de l'action en nullité des contrats de prêt : / La Crcam du Languedoc soutient, en premier lieu, que l'action en nullité est prescrite en application de l'article 1304 ancien devenu 2224 nouveau du code civil, le délai de cinq ans prévu par ces textes et courant à compter des actes de prêt contestés étant écoulé lors de l'assignation en tierce opposition introduite le 8 janvier 2018. / Cependant, il résulte de l'article 2224 du code civil que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. / En l'occurrence, il n'est pas démontré que Mme M... J... et M. R... J..., qui n'ont pas participé eux-mêmes à la conclusion les 27 mars et 24 avril 2007 des prêts souscrits par la Sci Xamaline dont ils sollicitent l'annulation, en ont eu immédiatement connaissance, laquelle ne saurait résulter du simple fait qu'ils étaient associés de ladite société. Au demeurant, il serait contradictoire de leur reconnaître, au titre d'un droit effectif à un juge, la possibilité de former tierce opposition à un jugement rendu à l'encontre de la Sci Xamaline qui n'était donc pas censée les représenter, et, dans le même temps, de les déclarer prescrits en leur action en nullité au motif que le délai de prescription doit courir à compter des actes de prêt contestés auxquels, par hypothèse, ils n'ont pas participé. / La Crcam du Languedoc n'établissant pas que Mme M... J... et M. R... J... auraient eu connaissance de la conclusion des contrats de prêt avant le 2 mai 2016, date à laquelle le liquidateur de la Sci Xamaline les a reçus pour s'entretenir de la situation de cette dernière, il y a lieu de fixer à cette date le point de départ du délai de prescription et d'écarter en conséquence la fin de non-recevoir soulevée par l'intimée. / La Crcam du Languedoc soutient, en second lieu, que Mme M... J... et M. R... J... seraient dépourvus du droit à agir en nullité des contrats de prêt, puisque cette nullité est relative et ne peut profiter qu'à la société, et non à des tiers à ces contrats, qualité qui serait la leur. / Cependant, les dispositions de l'article 1849 du code civil, selon lesquelles, dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société par des actes entrant dans l'objet social, n'ont pas pour seule vocation de protéger la société mais bénéficient également aux associés qui sont tenus indéfiniment des dettes à proportion de leur participation au capital social, de sorte que l'action de Mme M... J... et de M. R... J... est parfaitement recevable. / Sur le fond de l'action en nullité : / [] les dispositions de l'alinéa 1er de [l'article 1849 du code civil] selon lesquelles, dans les rapports avec es tiers, le gérant engage la société par les actes entrant dans l'objet social, autorisent les associés à se prévaloir de la nullité des contrats de prêt tirée de ce que ces derniers, destinés à financer l'acquisition du fonds de commerce de la société Écran System Industries, en liquidation judiciaire, par la société J... Écran System Industries, seraient contraires à l'intérêt social de la Sci Xamaline. / En premier lieu, la cour observe, à la lecture des statuts de la Sci Xamaline, que cette société a pour objet l'acquisition de tous biens immobiliers, leur administration et leur exploitation par bail, location ou autre, leur mise en valeur par l'exécution de tous travaux et l'édification de toutes constructions et, généralement, toutes opérations mobilières ou immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social, pourvu qu'elles ne modifient pas le caractère civil de la société. / Sous réserve de l'exactitude des affirmations de Mme M... J... et de M. R... J..., il ne fait pas de doute que la souscription de prêts destinés à financer, sous couvert de l'exécution de travaux immobiliers dans la maison située au [...] , appartenant à la Sci Xamaline, le rachat par la Sas J... Écran System Industries, société commerciale ayant pour objet la fabrication et le négoce de toute fermeture du bâtiment, d'un fonds de commerce d'une entreprise en redressement judiciaire est totalement étrangère à l'objet social de la Sci Xamaline, même si ces deux sociétés ont des associés communs, dont M. K... J..., Mme M... J... et M. R... J.... / Mme M... J... et M. R... J... justifient, au moyen des pièces versées aux débats par eux-mêmes ou la partie adverse, des éléments suivants : - le 20 mars 2007, la Sci Xamaline a ouvert un compte courant professionnel auprès de l'agence de Nîmes Esplanade du crédit agricole du Gard, alors que le siège de la société et l'adresse du gérant étaient situés dans l'Indre et que la société disposait déjà, pour son fonctionnement courant, d'un compte ouvert auprès de l'agence de La Châtre de la caisse d'épargne ; - les actes de prêt des 27 mars 2007 et 24 avril 2007 sont contemporains de la signature, le 2 mai 2007, de l'acte de cession du fonds de commerce, laquelle est intervenue en exécution d'un jugement du tribunal de commerce de Périgueux du 6 avril 2007, faisant lui-même suite à une proposition antérieure de reprise par M. V... J..., gérant de la Sas J... Écran System Industries ; - le 4 avril 2007, l'agence de Nîmes Esplanade du crédit agricole a établi pour le compte de l'emprunteur un chèque de banque de 109 600 euros destiné à Maître P... qui était le mandataire judiciaire de la société Écran System Industries ; le crédit agricole a établi un reçu de ce chèque précisant comme motif de la remise " acquisition " et portant une mention manuscrite " accord C... F... " ; un autre reçu de ce chèque de banque portant le cachet du tribunal de commerce de Périgueux et la date du 13 avril 2007, la mention " Ecran System " et une ventilation de la somme entre le fonds (Fds), le matériel (Mat) et le stock (Stock) montre indubitablement que ce chèque était destiné à financer la reprise du fonds de commerce de la société Écran System Industries ; - des retraits en espèces au guichet de l'agence du crédit agricole de Nîmes Esplanade ont été réalisés par ou pour le compte de la société Xamaline le 30 mars 2007 à hauteur de 30 000 euros et le 1er juin 2007 à hauteur de 10 000 euros ; - deux factures de 29 900 euros et 10 000 euros, d'un montant identique ou sensiblement identique aux sommes ci-dessus retirées en espèces, ont été adressées à la Sci Xamaline quelques jours auparavant, les 13 mars 2007 et 7 mai 2007, par une société Ict dont le siège social est à Avignon, au titre du montage du dossier financier aux deux prêts de 250 000 et 100 000 euros ; ces deux factures portent une mention manuscrite " bon pour accord de paiement " ou " bon pour déblocage " émanant pour l'une du gérant de la Sci Xamaline et pour l'autre d'un auteur non identifiable ; - dans le cadre de l'instruction des demandes de prêt, la Sci Xamaline a produit un devis particulièrement sommaire du 4 mars 2007 établi par une société Fimaco basée à Villeneuve-les-Avignon pour des travaux de réhabilitation de son immeuble de 144 mètres carrés d'un montant de 220 064 euros ; il a également été communiqué à la banque une facture du 25 avril 2007 d'un montant " rond " de 100 000 euros tva comprise correspondant à des travaux non détaillés d'extension d'une " villa " par aménagement d'un appartement de 80 m², émanant d'une société Kilic basée sur Avignon ; - la fiche de synthèse établie par la banque fait état de revenus fonciers attendus de 2 500 euros mensuels, alors que le bien était donné à bail à M. J... V... et son épouse depuis le 1er septembre 1997, moyennant un loyer mensuel de 2 500 francs, soit environ 375 euros ; cette dernière somme est au demeurant supérieure aux revenus locatifs bruts déclarés à l'administration fiscale par la société Xamaline, soit 2010 euros pour 2006 et de 2610 euros pour 2007 ; - l'étude de financement immobilier afférente au premier prêt de 250 000 euros fait mention, sous la signature de M ; F..., directeur de l'agence, d'une valeur du bien avant travaux de 350 000 euros (350 KE), étant observé que la Crcam du Languedoc, qui communique cette étude, produit par ailleurs une copie tronquée de l'acte d'acquisition qui en permet pas de s'assurer de la réalité de cette valeur, laquelle est en tout état de cause totalement invraisemblable au regard de la description du bien et du marché immobilier local à la date d'acquisition du 13 août 1997 puis de son évolution au jour du prêt, comme au demeurant au vu des droits d'enregistrement (26 152 F) mentionnés en première page de cette copie tronquée ; les consorts J..., qui ne produisent pas eux-mêmes l'acte d'acquisition, font état d'un prix de 330 000 francs, soit environ 50 000 euros, qui est plus en rapport avec la description du bien, le marché immobilier local et le montant des droits d'enregistrement ; - le jugement correctionnel rendu le 20 mai 2016 par le tribunal correctionnel de Nîmes fait état d'escroqueries commises, notamment, par M. C... F..., directeur de l'agence de Nîmes Esplanade, au préjudice de son employeur, partie plaignante et par ailleurs partie civile lors du procès, ainsi que de divers emprunteurs, au nombre desquels ne figure pas toutefois la société Xamaline ; en substance, le mécanisme de l'escroquerie consistait à monter, avec la complicité de M. C... F..., des dossiers de crédits immobiliers appuyés de fausses pièces justificatives, notamment devis et factures, dont le montant était destiné à d'autres fins que des acquisitions ou des travaux immobiliers ; l'enquête a mis en évidence le rôle de la société Ict qui, moyennant une commission pouvant atteindre 10 % du montant du crédit accordé, jouait un rôle de prescripteur ou d'intermédiaire et présentait de faux devis et/ou de fausses factures, censées émaner d'entreprises avec lesquelles elle avait l'habitude de travailler, pour justifier de pseudo travaux ; M. C... F... a reconnu avoir su que les dossiers contenaient de fausses factures et de faux devis et que certains des prêts immobiliers sollicités pouvaient avoir une autre finalité que celle de financer une acquisition ou des travaux immobiliers. / Tous ces éléments sont autant d'indices et de présomptions qui permettent de tenir pour constant le fait que les prêts contractés par la société Xamaline n'avaient pas pour objet de financer des travaux dans l'immeuble dont elle était propriétaire, mais des opérations distinctes en lien avec le rachat d'un fonds de commerce par la société J... Écran System Industries. Ainsi, les devis et factures étaient trop sommaires pour constituer le fondement ou la consécration d'engagements contractuels réels, les entreprises choisies ne pouvaient raisonnablement exécuter leurs prestations au regard de la distance géographique séparant leur siège du lieu de situation de l'immeuble et le montant même des prêts consentis était sans commune mesure avec la valeur du bien avant travaux et ne pouvait lui conférer une plus-value équivalente ou même sensiblement équivalente, d'autant qu'une somme de 39 900 euros était utilisée à la seule fin de rémunérer le prescripteur Ict, toutes choses que M. C... F..., préposé de la Crcam du Languedoc, qui était en rapport d'affaires habituel avec cet intermédiaire et connaissait ses pratiques, ne pouvait ignorer. Les dossiers de prêt ont par ailleurs été montés avec la plus grande légèreté, sans aucune vérification de la valeur de l'immeuble ou encore de la solvabilité de l'emprunteur, alors qu'au surplus ce dernier n'avait aucune attaché dans la région et n'est devenu client du crédit agricole que pour les besoins de cette opération de financement de travaux immobiliers dont le coût particulièrement onéreux, lié à l'intervention d'Ict, ne peut s'expliquer que par son caractère frauduleux. Enfin, il est avéré qu'une partie importante des prêts consentis a, de fait, servi à financer le rachat d'un fonds de commerce par la société J... Écran System Industries et les importantes commissions perçues par l'intermédiaire Ict. / Dès lors, la souscription par la Sci Xamaline des prêts litigieux, avec la complaisance coupable du préposé de la Crcam du Languedoc, est contraire à son intérêt social, de sorte que la nullité de ces contrats, dans les rapports entre le prêteur et Mme M... J... et M. R... J..., associés de la Sci Xamaline, doit être prononcée. / Enfin, la Crcam du Languedoc soutient vainement que les fonds prêtés ont profité à la société J... Écran System Industries et donc à Mme M... J... et M. R... J... qui en étaient actionnaires, alors que cette circonstance ne fait pas disparaître l'absence de conformité à l'intérêt social de la Sci Xamaline. Par ailleurs, il n'est pas établi que ces derniers, qui exerçaient une profession étrangère à cette société commerciale et n'ont jamais été qu'associés ou actionnaires des deux sociétés, aient été informés, avant leur entretien avec le liquidateur de la Sci Xamaline courant mai 2016, de la réalité d'un montage financier effectué par leur frère et leur père, respectivement gérant et président des deux sociétés » (cf., arrêt attaqué, p. 9 à 15) ;
ALORS QUE, de première part, l'autorité de la chose jugée qui s'attache à la décision irrévocable d'admission d'une créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire d'une société civile immobilière a pour conséquence que cette créance est définitivement consacrée, dans son existence et dans son montant, à l'égard des associés de la société civile immobilière ; qu'il en résulte que l'associé d'une société civile immobilière, qui n'a pas présenté à l'encontre de la décision d'admission d'une créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de cette société civile immobilière, la réclamation prévue par les dispositions de l'article R. 624-8 du code de commerce, est irrecevable à former tierce-opposition à l'encontre de la décision ayant consacré cette créance à l'égard de cette même société civile immobilière ; qu'en énonçant, dès lors, pour déclarer Mme M... J... et M. R... J... recevables en leur tierce opposition à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Bourges en date du 24 mars 2011 et pour, en conséquence, réformer, à l'égard de Mme M... J... et de M. R... J..., le jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 29 juin 2010, dire que les contrats de prêt souscrits par la société civile immobilière Xamaline auprès de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, les 27 mars 2007 et 24 avril 2007 étaient nuls pour non-conformité à l'objet social et débouter la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc de toutes ses demandes en paiement fondées sur ces deux contrats de prêt, que c'était en vain que la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc prétendait qu'à défaut pour Mme M... J... et M. R... J... d'avoir exercé un recours à l'encontre de l'état des créances de la procédure de liquidation judiciaire de la société civile immobilière Xamaline dans le délai d'un mois à compter de sa publication au Bodaac le 28 février 2015, les créances en litige avaient acquis l'autorité de la chose jugée à l'égard de tous et que Mme M... J... et M. R... J... étaient irrecevables à former toute nouvelle contestation portant sur l'existence, la nature ou le quantum des créances ainsi admises définitivement, qu'en effet, l'admission définitive des créances de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, dans le cadre et pour les besoins de la liquidation judiciaire de la société civile immobilière Xamaline, n'interdisait nullement aux associés, qui n'étaient ni plus ni moins parties à cette procédure collective qu'à l'instance précédente devant la cour d'appel de Bourges, d'exercer devant un juge le recours effectif reconnu par l'article 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'au demeurant, l'examen du bordereau de déclaration de créances montrait que la banque n'avait pas déclaré d'autre créance que celles résultant précisément du jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 29 juin 2010, confirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Bourges en date du 24 mars 2011, qui était déjà définitive à la suite du rejet du pourvoi en cassation formé contre cet arrêt le 28 juin 2012, quand l'autorité de la chose jugée, qui était, irrévocablement, attachée à l'ordonnance du 2 février 2015, par laquelle le juge-commissaire de la procédure de liquidation judiciaire de la société civile immobilière Xamaline avait admis les créances de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, résultant des prêts en date du 27 mars 2007 et du 24 avril 2007, telles qu'elles avaient été reconnues par le jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 29 juin 2010 et par l'arrêt de la cour d'appel de Bourges en date du 24 mars 2011, au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société civile immobilière Xamaline, avait pour conséquence que ces créances étaient définitivement consacrées, dans leur existence et dans leur montant, à l'égard de Mme M... J... et de M. R... J... et que la tierce-opposition formée par ces derniers était irrecevable, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1351 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, qui ont été reprises par les dispositions de l'article 1355 du code civil, les dispositions de l'article 1857 du code civil et les dispositions de l'article R. 624-8 du code de commerce ;
ALORS QUE, de deuxième part, sous l'empire des dispositions de l'article 1304 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, qui étaient applicables à la cause, le point de départ du délai de prescription de l'action en nullité d'un contrat est, hormis les cas particuliers des actions en nullité fondées sur un vice du consentement et sur une incapacité et des actions exercées par l'héritier d'une partie, la date de la conclusion du contrat ; que la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile n'a pas eu pour effet de modifier le point de départ du délai de la prescription extinctive ayant commencé à courir antérieurement à son entrée en vigueur ; qu'en outre, aux termes de l'article 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, les dispositions qui réduisent le délai de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'il en résultait, en l'espèce, que le délai de prescription des actions en nullité exercées par Mme M... J... et M. R... J... des contrats de prêts en date du 27 mars 2007 et du 24 avril 2007 conclus par la société civile immobilière Xamaline et par la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc avait commencé à courir à compter, respectivement, du 27 mars 2007 et du 24 avril 2007 et que ces actions étaient prescrites, que les nullités alléguées eussent été relatives ou absolues, lorsque Mme M... J... et M. R... J... les ont introduites le 8 janvier 2018 ; qu'en fixant, par conséquent, pour écarter la fin de non-recevoir, soulevée par la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, tirée de la prescription des actions en nullité exercées par Mme M... J... et M. R... J... des contrats de prêts en date du 27 mars 2007 et du 24 avril 2007 conclus par la société civile immobilière Xamaline et par la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc et pour, en conséquence, réformer, à l'égard de Mme M... J... et de M. R... J..., le jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 29 juin 2010, dire que les contrats de prêt souscrits par la société civile immobilière Xamaline auprès de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, les 27 mars 2007 et 24 avril 2007 étaient nuls pour non-conformité à l'objet social et débouter la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc de toutes ses demandes en paiement fondées sur ces deux contrats de prêt, le point de départ du délai de prescription de ces actions en nullité au 2 mai 2016, date à laquelle le liquidateur judiciaire de la société civile immobilière Xamaline avait reçu Mme M... J... et de M. R... J... pour s'entretenir avec eux de la situation de cette dernière et en en déduisant que les actions en nullité exercées par Mme M... J... et M. R... J... des contrats de prêts en date du 27 mars 2007 et du 24 avril 2007 conclus par la société civile immobilière Xamaline et par la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc n'étaient pas prescrites, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1304 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, qui était applicable à la cause, et de l'article 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile ;
ALORS QUE, de troisième part la nullité d'un contrat est absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l'intérêt général, tandis que la nullité d'un contrat est relative lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde d'un intérêt privé ; qu'il en résulte que la nullité d'un contrat conclu par une société résultant de la contrariété de ce contrat à son intérêt social est relative et, partant, ne peut être demandée que par cette société, qui est la partie que la loi entend protéger ; qu'en énonçant, par conséquent, pour écarter la fin de non-recevoir, soulevée par la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, tirée de l'absence du droit de Mme M... J... et M. R... J... à agir en nullité des contrats de prêts en date du 27 mars 2007 et du 24 avril 2007 conclus par la société civile immobilière Xamaline et par la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc et pour, en conséquence, réformer, à l'égard de Mme M... J... et de M. R... J..., le jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 29 juin 2010, dire que les contrats de prêt souscrits par la société civile immobilière Xamaline auprès de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, les 27 mars 2007 et 24 avril 2007 étaient nuls pour non-conformité à l'objet social et débouter la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc de toutes ses demandes en paiement fondées sur ces deux contrats de prêt, que les dispositions de l'article 1849 du code civil, selon lesquelles, dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société par des actes entrant dans l'objet social, n'ont pas pour seule vocation de protéger la société mais bénéficient également aux associés qui sont tenus indéfiniment des dettes à proportion de leur participation au capital social, de sorte que l'action de Mme M... J... et de M. R... J... était parfaitement recevable, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1304 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et de l'article 1849 du code civil ;
ALORS QUE, de quatrième part, en disant, dans le dispositif de son arrêt, que les contrats de prêt souscrits par la société civile immobilière Xamaline auprès de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, les 27 mars 2007 et 24 avril 2007 étaient nuls pour non-conformité à l'objet social et en déboutant, en conséquence, la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc de toutes ses demandes en paiement fondées sur ces deux contrats de prêt, quand elle avait retenu, dans les motifs de son arrêt, que les contrats de prêt souscrits par la société civile immobilière Xamaline auprès de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, les 27 mars 2007 et 24 avril 2007 étaient nuls pour contrariété à l'intérêt social de la société civile immobilière Xamaline, et non pour non-conformité à l'objet social de la société civile immobilière Xamaline, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif et a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

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8 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 20 janvier 2021, 19-20.076, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 20 janvier 2021, 19-20.076, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Redressement judiciaire - Période d'observation - Gestion - Transaction - Conditions - Autorisation préalable du juge-commissaire

ANALYSE DE L'ARRET :

Il résulte des exigences impératives de l'article L. 622-7, II, du code de commerce, que le pouvoir de transiger est subordonné à l'autorisation préalable du juge-commissaire. Il s'ensuit qu'une cour d'appel, qui a constaté que la proposition du bailleur et son acceptation, fût-elle donnée sous réserve de cette autorisation, étaient intervenues avant que le juge-commissaire autorise l'administrateur et la société débitrice à transiger sur les modalités d'une résiliation amiable du bail et l'apurement des comptes, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de rejeter la requête aux fins d'une telle autorisation

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CH.B


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 20 janvier 2021



Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 51 F-P
Pourvoi n° Q 19-20.076



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 JANVIER 2021
La société MJA, société d'exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est [...] , en la personne de Mme Y... P..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Victoires, a formé le pourvoi n° Q 19-20.076 contre l'arrêt rendu le 19 mars 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 8), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Paris Croix des Petits Champs, société en nom collectif, dont le siège est [...] ,
2°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, [...],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société MJA, ès qualités, de Me Bertrand, avocat de la société Paris Croix des Petits Champs, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, Mme Henry, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 mars 2019) et les productions, la société Victoires a été mise en redressement judiciaire le 25 janvier 2017, la société MJA étant désignée en qualité de mandataire judiciaire et la société Ascagne AJ, en celle d'administrateur judiciaire, avec une mission d'assistance.
2. Une procédure opposant la société Victoires à son bailleur, la société Paris Croix des Petits Champs, la société débitrice et son administrateur ont présenté, le 30 octobre 2017, une requête au juge-commissaire afin d'autoriser une transaction portant sur une résiliation amiable du bail commercial, négociée le 29 septembre 2017.
3. Par une ordonnance du 8 novembre 2017, le juge-commissaire a autorisé la transaction nonobstant la rétractation de la société Paris Croix des Petits Champs.
4. La société Paris Croix des Petits Champs a formé un recours contre cette ordonnance, laquelle a été maintenue par un jugement du tribunal de commerce de Paris le 29 mai 2018.
5. Le 4 décembre 2018, le redressement judiciaire de la société Victoires a été converti en liquidation judiciaire, la société MJA étant désignée en qualité de liquidateur.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. La société MJA, en sa qualité de liquidateur de la société Victoires, fait grief à l'arrêt de rejeter la requête du 30 octobre 2017 de la société Victoires et de son administrateur judiciaire aux fins d'être autorisées à signer une transaction avec la société Paris Croix des Petits Champs, alors « que le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation ; que le pollicitant ne peut plus rétracter sa proposition lorsqu'elle a été acceptée ; que l'offre de transaction d'un tiers ne peut donc plus être rétractée dès lors qu'elle a été acceptée par le débiteur en redressement judiciaire et l'administrateur, peu important que la transaction n'ait pas encore été autorisée par le juge-commissaire ; qu'en effet l'autorisation du juge-commissaire est une condition non pas d'existence, mais de validité de la transaction, celle-ci étant conclue dès que l'offre a été acceptée par le débiteur et l'administrateur judiciaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que l'offre de la société Paris Croix des Petits Champs avait été acceptée par la société Victoires et M. G..., ès qualités, de sorte que "les parties étaient parvenues à s'entendre sur les modalités d'une résiliation amiable du bail et l'apurement des comptes" ; qu'en retenant pourtant que "la rétractation de la proposition étant intervenue avant que le juge-commissaire n'autorise l'administrateur judiciaire et le débiteur à accepter l'offre par voie de transaction, le juge-commissaire ne pouvait pas, le 8 novembre 2017, autoriser une transaction inexistante", la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 622-7 du code de commerce et 1113 du code civil. »
Réponse de la Cour
7. L'arrêt relève que la requête aux fins d'être autorisé à transiger a été présentée le 30 octobre 2017 cependant qu'à cette date la société Paris Croix des Petits Champs ne maintenait pas son offre. Il retient que si les parties étaient parvenues à s'entendre sur les modalités d'une résiliation amiable du bail et l'apurement des comptes, toutefois ni l'administrateur judiciaire ni la société Victoires n'avaient, au regard des exigences impératives de l'article L. 622-7, II du code de commerce, le pouvoir de transiger sans l'autorisation préalable du juge-commissaire.
8. Par ces seuls motifs, la cour d'appel, qui a constaté que la proposition du bailleur et son acceptation, fût-elle donnée sous réserve de cette autorisation, étaient intervenues avant que le juge-commissaire autorise l'administrateur et la société débitrice à transiger, a légalement justifié sa décision.
9. Le moyen n'est donc pas fondé
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société MJA, en sa qualité de liquidateur de la société Victoires aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société MJA, ès qualités.
Il est fait grief à la décision infirmative attaquée d'avoir débouté la société Victoires et la Selas Ascage AJ, aux droits de laquelle vient désormais la société MJA, ès qualités, de sa requête en date du 30 octobre 2017 aux fins d'être autorisées à signer une transaction avec la société Paris Croix des Petits Champs ;
aux motifs qu' « il résulte de l'article L 622-7, II du code du commerce, que le juge-commissaire peut autoriser le débiteur à transiger ; que l'administrateur judiciaire, son administrée, et la société bailleresse se sont rapprochés sur les litiges les opposant, dans les circonstances ci-après ; que par courriel du 29 septembre 2017, faisant suite à une rencontre la veille en l'étude de l'administrateur judiciaire, Maître V..., avocat de la SNC Paris Croix des Petits Champs indiquait à Maître G... : « Je réitère la proposition de la Société PARIS CROIX DES PETITS CHAMPS, propriétaire des locaux loués à la Société VICTOIRES. La Société PARIS CROIX DES PETITS CHAMPS serait prête à une résiliation du bail moyennant indemnité à hauteur de 230.000 euros, se décomposant de la façon suivante : - Indemnité 56.000 euros, - Remboursement intégral du dépôt de garantie - 70.000 euros - Abandon du loyer du 3ème trimestre échu - 40.000 euros - Abandon de deux mois de loyers à échoir -30.000 euros - Sous-total -200.000 euros - Abandon de la créance déclarée au passif -30.000 euros Soit un total de 30.000 euros. Les locaux seraient libérés par la Société VICTOIRES au plus tard le 30 novembre 2017. L'indemnité de 56.000 euros et le remboursement du dépôt de garantie intervenant à la remise des clefs. La Société VICTOIRES se désisterait de toutes instances et actions à l'encontre de la Société PARIS CROIX DES PETITS CHAMPS et renoncerait notamment à toutes réclamations en ce qui concerne un éventuel trop-perçu de charges. Je vous serais reconnaissant de bien vouloir me confirmer que cette offre sera transmise au Juge-Commissaire. Je vous serais également reconnaissant de me confirmer que le rendez-vous prévu ce jour pour régularisation d'un contrat de sous-location est annulé, dans l'attente de la décision du Tribunal [....] » ; que par courriel du même jour, Maître G... accusait réception de cette correspondance, et répondait à Maître V..., que la question de l'abandon de créance mériterait d'être précisée, afin de ne pas laisser penser que l'abandon est limité à 30.000 euros sur les 110.000 déclarés, alors que c'est bien cette somme qui est abandonnée en totalité, mais que la valeur de l'abandon est forfaitaisé entre les parties à 30.000 euros ; qu'elle ajoutait, in fine « Sous le bénéfice de cette précision que je vous remercie de bien vouloir apporter, je demande à mon administrée d'annuler le rendez-vous de signature qui était prévu tout à l'heure et je présenterai une requête aux fins de transaction sur ces bases à Monsieur le Juge Commissaire avec mon avis favorable [....] » ; que par mail concomitant, Maître O... , conseil de la société sous procédure collective ajoutait qu'il lui paraissait également utile de mentionner que l'abandon de créance s'entendait hors taxes ; que Maître V... répondait le même jour dans le sens souhaité par Maître G... et Maître O... ; que le 10 octobre 2017, Maître V... informait Maître G..., ès qualités, que suite au changement de dirigeant décidé lors de l'assemblée générale du 30 septembre 2017, la société Paris Croix des Petits Champs n'entendait pas maintenir l'offre contenue dans son courrier du 29 septembre 2017, lui demandant d'en informer le juge-commissaire dans l'hypothèse où la requête aurait été déposée ; que c'est dans ce contexte que la requête aux fins d'être autorisé à transiger a été déposée le 30 octobre 2017, le juge-commissaire étant informé du revirement de la société Paris Croix des Petits Champs ; que pour autoriser la transaction, le juge-commissaire a notamment considéré que la proposition transactionnelle formée le 29 septembre 2017 par le conseil de la SNC Paris Croix des Petits Champs, complétée par un mail du même jour précisant la portée de l'abandon de créances, s'analysait en un engagement unilatéral courant jusqu'à l'ordonnance, que l'exigence d'autorisation préalable qu'édicte l'article L 622-7 du code du commerce ne concernait que la société sous procédure collective et non l'émetteur, que l'administrateur judiciaire avait donné son accord sous la seule réserve de l'autorisation du juge-commissaire, que la société Victoires, à la demande de la bailleresse, avait donné un commencement d'exécution à cette transaction en renonçant à une sous-location ; que le tribunal a confirmé l'ordonnance, aux motifs que la proposition d'accord de la bailleresse avait été acceptée, par retour, par Maître G... et la société Victoires, que la transaction comporte des concessions réciproques sans condition suspensive, ni mention de délai de rétractation et qu'il n'avait pas à trancher le caractère ou non abusif de la rétractation du 10 octobre 2017 ; que la recevabilité de l'appel à l'encontre du jugement n'est pas discutée ; qu'au soutien de son appel, la SNC Paris Croix des Petits Champs fait valoir que la transaction ne pouvant, à peine de nullité, être régularisée avant son autorisation par le juge-commissaire, aucun contrat, par rencontre d'une offre et de son acceptation, n'a pu se former avant une telle autorisation, de sorte qu'il n'existait à la date de rétractation de l'offre aucun contrat formé, ajoutant, qu'en vertu de l'article 1116 du code civil en sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016, une offre peut être rétractée tant qu'elle n'a pas été acceptée, peu important que cette rétractation soit licite et puisse engager la responsabilité de son auteur ; qu'il ressort des courriels échangés le 29 septembre 2017, que les parties étaient parvenues à s'entendre sur les modalités d'une résiliation amiable du bail et l'apurement des comptes. ; que toutefois, ni l'administrateur judiciaire, investi d'une mission d'assistance, ni le débiteur, n'ayant, au regard des exigences impératives de l'article L. 622-7,II du code du commerce, le pouvoir de transiger sans l'autorisation préalable du juge-commissaire, l'accord donné à la proposition de la société Paris Croix des Petits Champs, le 29 septembre 2017, ne vaut pas acceptation formelle de l'offre, et partant formation d'un contrat au sens de l'article 1113 du code civil, en sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ; que la rétractation de la proposition étant intervenue avant que le juge-commissaire n'autorise l'administrateur judiciaire et le débiteur à accepter l'offre par voie de transaction, le juge-commissaire ne pouvait pas, le 8 novembre 2017, autoriser une transaction inexistante ; que la cour n'a pas, dans la présente instance, à apprécier si cette rétractation engage ou non-responsabilité de la société Paris Croix des Petits Champs ; qu'il s'ensuit que le jugement doit être infirmé, sauf en ce qu'il a dit le recours recevable. Il y lieu, statuant à nouveau, d'infirmer l'ordonnance du 8 novembre 2017 ayant autorisé le débiteur et l'administrateur judiciaire à transiger avec la société Paris Croix des Petits Champs et de rejeter la requête du 30 octobre 2017 » ;
alors que le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation ; que le pollicitant ne peut plus rétracter sa proposition lorsqu'elle a été acceptée ; que l'offre de transaction d'un tiers ne peut donc plus être rétractée dès lors qu'elle a été acceptée par le débiteur en redressement judiciaire et l'administrateur, peu important que la transaction n'ait pas encore été autorisée par le juge-commissaire ; qu'en effet l'autorisation du juge-commissaire est une condition non pas d'existence, mais de validité de la transaction, celle-ci étant conclue dès que l'offre a été acceptée par le débiteur et l'administrateur judiciaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que l'offre de la société SNC Paris Croix des Petits Champs avait été acceptée par la société Victoires et Me G..., ès qualités, de sorte que « les parties étaient parvenues à s'entendre sur les modalités d'une résiliation amiable du bail et l'apurement des comptes » (arrêt, p. 5, alinéa 5) ; qu'en retenant pourtant que « la rétractation de la proposition étant intervenue avant que le juge-commissaire n'autorise l'administrateur judiciaire et le débiteur à accepter l'offre par voie de transaction, le juge-commissaire ne pouvait pas, le 8 novembre 2017, autoriser une transaction inexistante » (arrêt, p. 5, alinéa 6), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 622-7 du code de commerce et 1113 du code civil.

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9 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 janvier 2021, 18-24.853 19-11.302, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 janvier 2021, 18-24.853 19-11.302, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Cassation partielle

MOTS CLES DE L'ARRET :

SOCIETE ANONYME - Assemblée générale - Convocation - Convocation par un mandataire ad hoc - Désignation - Condition - Conformité à l'intérêt social

ANALYSE DE L'ARRET :

La désignation d'un mandataire ad hoc en application de l'article L.225-103, II, 2°, du code de commerce n'est subordonnée ni au fonctionnement anormal de la société, ni à la menace d'un péril imminent ou d'un trouble manifestement illicite, mais seulement à la démonstration de sa conformité à l'intérêt social

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 13 janvier 2021



Cassation partielle déchéance partielle et annulation

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 36 F-P

Pourvois n°M 18-24.853C 19-11.302 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 JANVIER 2021
I - La société Cofical - Compagnie financière calédonienne, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° M 18-24.853 contre deux arrêts n° RG : 17/00134 rendus les 14 mai 2018 et 27 septembre 2018 par la cour d'appel de Nouméa (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Figesbal, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Figesbal, société anonyme, dont le siège est [...] , en la personne de M. W... U..., en qualité de président du conseil d'administration de la société Figesbal,
3°/ à l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal, dont le siège est [...] ,
4°/ à M. W... U..., domicilié [...] , pris tant en son nom personnel qu'en qualité de président du conseil d'administration de la société Figesbal,
défendeurs à la cassation.
EN PRESENCE DE :
- Mme G... H..., domiciliée [...] , prise en qualité d'ancienne présidente du conseil d'administration de la société Figesbal,
- M. P... D..., domicilié [...] , pris en qualité d'ancien directeur général de la société Figesbal,
II - 1°/ M. P... D..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'ancien directeur général de la société Figesbal,
2°/ la société Figesbal, société anonyme, dont le siège est [...] , en la personne de M. P... D..., agissant en qualité de directeur général,
ont formé le pourvoi n° C 19-11.302 contre l'arrêt n° RG : 18/00099 rendu le 29 novembre 2018 par la cour d'appel de Nouméa (chambre commerciale), dans le litige les opposant :
1°/ à M. W... U..., domicilié [...] ,
2°/ à l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal,
3°/ à la société Figesbal, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse au pourvoi n° M 18-24.853 invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les demandeurs au pourvoi n° C 19-11.302 invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Cofical - Compagnie financière calédonienne, de M. D..., agissant en son nom personnel et en qualité d'ancien directeur général de la société Figesbal, de la société Figesbal, prise en la personne de M. D..., en sa qualité de directeur général, de la SCP Richard, avocat de la société Figesbal et de M. U..., tant à titre personnel et en qualité de président du conseil d'administration de la société Figesbal, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° M 18-24.853 et C 19-11.302 sont joints.
Déchéance partielle du pourvoi n° M 18-24.853
Vu l'article 978 du code de procédure civile :
2. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il serait fait application du texte susvisé.
3. En vertu de ce texte, à peine de déchéance, le demandeur doit, au plus tard dans le délai de quatre mois à compter du pourvoi, remettre au greffe de la Cour de cassation un mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée.
4. Aucun grief n'étant formulé contre l'arrêt du 14 mai 2018, il y a lieu de constater la déchéance du pourvoi en ce qu'il est formé contre cet arrêt.
Faits et procédure
5. Selon les arrêts attaqués(Nouméa, 14 mai 2018, 27 septembre 2018 et 29 novembre 2018), rendus en matière de référé, les sociétés Ficbal, FP Invest, [...] et Figespart sont associés et cogérants de la société Compagnie financière calédonienne (la société Cofical), qui détient 55 % du capital de la société anonyme Figesbal.
6. Le 29 juin 2017, l'assemblée générale mixte de la société Figesbal a adopté des résolutions par lesquelles quitus a été donné aux administrateurs de leur gestion pour l'exercice 2016, le résultat de l'exercice 2016 a été affecté et M. U... a été renouvelé dans ses fonctions d'administrateur pour une période de six exercices.
7. La société Cofical a assigné en référé la société Figesbal et M. U... afin d'obtenir, sur le fondement de l'article L. 225-103, II, 2° du code de commerce, la désignation d'un mandataire ad hoc de la société Figesbal, chargé de convoquer l'assemblée générale des actionnaires de la société ayant pour ordre du jour la révocation de MM. U... et E... de leurs mandats d'administrateurs et leur remplacement par les sociétés Figespart et Cofical et de convoquer le conseil d'administration de cette société pour désigner son nouveau président et, le cas échéant, un directeur général.
8. Le mandataire ad hoc de la société Figesbal, désigné par une ordonnance du 4 décembre 2017, a convoqué l'assemblée générale de cette société, qui a révoqué M. U... de ses fonctions de directeur général et nommé M. D... pour le remplacer.
9. Par le premier arrêt attaqué, la cour d'appel a infirmé l'ordonnance du 4 décembre 2017 et rejeté les demandes de la société Cofical. Elle a également déclaré recevable l'intervention volontaire de l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal.
10. Par le second arrêt attaqué, elle a dit que, par l'effet du dispositif de l'arrêt infirmatif prononcé le 27 septembre 2018, M. U... était remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal, et a ordonné en conséquence la suspension des effets des assemblées générales et conseils d'administration postérieurs à la nomination d'un administrateur en application de l'ordonnance du 4 octobre 2017.
Recevabilité du pourvoi n° C 19-11.302, en ce qu'il est formé par M. D... au nom de la société Figesbal, contestée par la défense
11. M. U... et la société Figesbal soutiennent que M. D... est sans qualité pour se pourvoir en cassation au nom de la société, dès lors que l'arrêt attaqué dit, dans son dispositif, que par l'effet du dispositif de l'arrêt infirmatif prononcé le 27 septembre 2018 par la cour d'appel de Nouméa, M. U... est remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal.
12. M. D... ayant eu, devant les juges du fond, la qualité dont il se prévaut pour se pourvoir en cassation, son pourvoi est recevable en tant qu'il agit au nom de la société Figesbal.
Recevabilité du même pourvoi n° C 19-11.302, en ce qu'il est formé par M. D... en son nom personnel, examinée d'office
Vu l'article 609 du code de procédure civile :
13. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il serait fait application du texte susvisé.
14. Selon ce texte, toute partie qui y a intérêt est recevable à se pourvoir en cassation même si la disposition qui lui est défavorable ne profite pas à son adversaire.
15. M. D... ayant agi, devant les juges du fond, uniquement au nom de la société Figesbal, son pourvoi n'est pas recevable en ce qu'il est formé en son nom personnel, faute d'avoir été partie en cette qualité à la décision attaquée.
Examen des moyens
Sur le moyen, pris en sa troisième branche, du pourvoi n° M 18-24.853, en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 27 septembre 2018
Enoncé du moyen
16. La société Cofical fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à la désignation d'un mandataire ad hoc, alors « que la désignation d'un mandataire ad hoc sur le fondement de l'article L. 225-103 II, 2°, du code de commerce, en vue de faire convoquer l'assemblée générale d'une société anonyme, suppose uniquement, lorsqu'elle est demandée par un ou plusieurs actionnaires réunissant au moins 5 % du capital social, qu'elle tende à des fins légitimes conformes à l'intérêt social, et non à la satisfaction de fins personnelles ; que les conditions propres à la désignation d'un administrateur provisoire, tenant à l'existence de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d'un péril imminent, n'ont en revanche pas à être remplies pour ce qui concerne la désignation d'un mandataire ad hoc ; que, pour rejeter la demande de désignation d'un mandataire ad hoc formée par la société Cofical aux fins de faire convoquer l'assemblée générale de la société Figesbal, la cour d'appel a jugé qu'une telle désignation ne serait "prévue de manière supplétive que dans l'hypothèse d'un dysfonctionnement avéré au sein de la société" et serait "toujours subordonnée soit à l'imminence d'un dommage soit à la démonstration d'un trouble manifestement illicite" et non, comme l'avait retenu le premier juge, à la démonstration par l'actionnaire demandeur de la poursuite de fins légitimes qui soient conformes à l'intérêt social ; que ce faisant, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 225-103 du code de commerce et par fausse application les dispositions de l'article 809 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 225-103, II, 2° du code de commerce :
17. Selon ce texte, à défaut de convocation par le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, l'assemblée générale d'une société anonyme peut être convoquée par un mandataire ad hoc, désigné en justice, à la demande, soit de tout intéressé en cas d'urgence, soit d'un ou plusieurs actionnaires réunissant au moins 5 % du capital social, soit d'une association d'actionnaires répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120 du même code.
18. Pour rejeter la demande de désignation d'un mandataire ad hoc de la société Figesbal avec mission restreinte de convoquer l'assemblée générale des actionnaires de la société ayant pour ordre du jour la révocation de MM. U... et E... de leurs mandats d'administrateurs et leur remplacement par les sociétés Figespart et Cofical et de convoquer le conseil d'administration de cette société à l'effet d'y voir désigner son nouveau président et, le cas échéant, un directeur général, l'arrêt retient que la désignation d'un mandataire par le juge des référés, qui est toujours subordonnée soit à l'imminence d'un dommage soit à la démonstration d'un trouble manifestement illicite, n'est prévue de manière supplétive que dans l'hypothèse d'un dysfonctionnement avéré au sein de la société.
19. En statuant ainsi, alors que la désignation d'un mandataire ad hoc en application sur l'article L. 225-103, II, 2° du code de commerce n'est subordonnée ni au fonctionnement anormal de la société, ni à la menace d'un péril imminent ou d'un trouble manifestement illicite, mais seulement à la démonstration de sa conformité à l'intérêt social, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Sur le moyen, pris en sa première branche, du pourvoi n° C 19-11.302
Enoncé du moyen
20. M. D..., en tant qu'il agit au nom de la société Figesbal, fait grief à l'arrêt de dire que par l'effet du dispositif de l'arrêt infirmatif prononcé le 27 septembre 2018, M. U... est remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal, d'ordonner en conséquence la suspension des effets de l'assemblée générale du 16 mars 2018 et du conseil d'administration du 16 mars 2018, des convocations du conseil d'administration des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018 et de l'assemblée générale du 26 juin 2018, et de ces conseils d'administration et assemblées générales des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018, et de dire que ces suspensions prendront effet au jour de la signification de l'arrêt à la société Figesbal, à charge pour l'une ou l'autre des parties de saisir le juge du fond au maximum dans un délai de deux mois à compter de ladite signification aux fins qu'il soit statué, le cas échéant, sur la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait des administrateurs et dirigeants désignés en conséquence des assemblées générales et conseils d'administration susvisés, alors « que pour ordonner la suspension des effets de l'assemblée générale et du conseil d'administration de la société Figesbal du 16 mars 2018, convoqués par le mandataire ad hoc désigné par l'ordonnance de référé du 4 décembre 2017, et des effets des conseils d'administration et assemblée générale qui s'en sont suivis, la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa du 27 septembre 2018 qui a infirmé l'ordonnance du 4 décembre 2017 ; que la cour d'appel a en effet considéré que cet arrêt infirmatif aurait eu pour effet de "remettre" M. W... U... en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal et que la "dyarchie" qui en résulterait au sein de la société Figesbal serait génératrice d'un trouble manifestement illicite justifiant les mesures de suspension ordonnées ; que l'arrêt attaqué se trouve ainsi dans la dépendance directe de celui rendu le 27 septembre 2018 ; que dès lors, par application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le pourvoi n° M 18-24.853 formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa du 27 septembre 2018 entraînera l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt attaqué. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 625 du code de procédure civile :
21. Selon ce texte, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
22. Pour dire que M. U... est remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal, ordonner en conséquence la suspension des effets de l'assemblée générale du 16 mars 2018 et du conseil d'administration du 16 mars 2018, des convocations du conseil d'administration des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018 et de l'assemblée générale du 26 juin 2018, et de ces conseils d'administration et assemblées générales des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018, et dire que ces suspensions prendront effet au jour de la signification de l'arrêt à la société Figesbal, à charge pour l'une ou l'autre des parties de saisir le juge du fond au maximum dans un délai de deux mois à compter de ladite signification aux fins qu'il soit statué, le cas échéant, sur la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait des administrateurs et dirigeants désignés en conséquence des assemblées générales et conseils d'administration susvisés, l'arrêt se fonde sur le seul effet du dispositif de l'arrêt infirmatif rendu le 27 septembre 2018.
23. La cassation de ce dernier arrêt sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, du pourvoi n° M 18-24.853 entraîne l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt du 29 novembre 2018, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
Sur le pourvoi n° M 18-24.853
CONSTATE la déchéance du pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 14 mai 2018 ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par la société Compagnie financière calédonienne et statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 27 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ;
Sur le pourvoi n° C 19-11.302
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est formé par M. D... en son nom personnel ;
CONSTATE l'annulation de l'arrêt rendu le 29 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ;
Remet, sur les points cassés et annulés, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa autrement composée ;
Condamne M. U... et la société Figesbal aux dépens des pourvois ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. U... et la société Figesbal à payer à la société Compagnie financière calédonienne la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés et annulés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi n° M 18-24.853 par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Cofical - Compagnie financière calédonienne.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait désigné un mandataire ad hoc de la société Figesbal avec mission restreinte de convoquer l'assemblée générale des actionnaires de la société ayant pour ordre du jour la révocation de MM. W... U... et O... E... de leurs mandats d'administrateurs et leur remplacement par les sociétés Figespart et Cofical et de convoquer le conseil d'administration de cette société à l'effet d'y voir désigner son nouveau président et, le cas échéant, un directeur général, et d'avoir rejeté la demande de la société Cofical tendant à la désignation d'un tel mandataire ad hoc ;
Aux motifs que les dispositions de l'article 809 du code de procédure civile applicables en Nouvelle-Calédonie disposent que "le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite" ; que par ailleurs les dispositions de l'article L. 225-103 du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie prévoient que "I.- L'assemblée générale est convoquée par le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas. II.- A défaut, l'assemblée générale peut être également convoquée : 1° Par les commissaires aux comptes ; 2° Par un mandataire, désigné en justice, à la demande, soit de tout intéressé en cas d'urgence, soit d'un ou plusieurs actionnaires réunissant au moins 5 % du capital social, soit d'une association d'actionnaires répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120 ()" ; que ces dispositions, interprétées ensemble par la jurisprudence, limitent la désignation d'un administrateur provisoire aux cas d'absence ou de vacance des organes sociaux (Com., 22 juillet 1986, Bull. 1986 n°289), à raison d'un péril menaçant une société dont le gérant se voit imputer de graves détournements (Com., 17 octobre 1989 Bull civ. IV n°250) ou en cas de mésentente rendant anormal le fonctionnement de la société (Com., 17 janvier 1989, JCP E 1989 II 15517) ; qu'il s'en déduit que la désignation d'un mandataire par le juge des référés, qui est toujours subordonnée soit à l'imminence d'un dommage soit à la démonstration d'un trouble manifestement illicite, n'est prévue de manière supplétive que dans l'hypothèse d'un dysfonctionnement avéré au sein de la société ; que la cour constate qu'en l'espèce l'assemblée générale des actionnaires de la société Figesbal a été régulièrement convoquée, s'est tenue le 29 juin 2017 à 10 heures en son siège social à Nouméa et que le différend qui a opposé M. W... U... aux associés de la société Cofical relativement à la représentation de cette société, qui a été consigné au procès-verbal de séance, n'a pas empêché l'assemblée générale de se poursuivre en présence des associés de Cofical, de procéder à la composition de son bureau et de délibérer sur les résolutions ; que l'assemblée générale a donné quitus aux administrateurs de leur gestion pour l'exercice 2016 à l'unanimité des voix, a approuvé l'affectation du résultat de l'exercice 2016 et approuvé, à la majorité des voix des actionnaires présents, le renouvellement de M. W... U... dans ses fonctions d'administrateur pour une période de 6 exercices jusqu'en 2022 ; que le juge des référés, en fondant sa décision sur la jurisprudence au visa "des conditions purement prétoriennes non prévues par le texte, celles de la démonstration par l'actionnaire demandeur de la poursuite de fins légitimes qui soient conformes à l'intérêt social et non point à la satisfaction de fins propres de ce demandeur", en ajoutant à ce texte des conditions supplémentaires, en a dénaturé le sens et la portée ; qu'en effet, ce texte n'impose nullement au juge saisi de s'interroger sur la légitimité de la fin poursuivie par l'actionnaire demandeur et sur sa conformité à l'intérêt social mais lui impose seulement de vérifier la réalité d'un dysfonctionnement né d'une carence ou d'un fonctionnement anormal des organes de la société, caractérisant l'imminence d'un dommage ou établissant un trouble manifestement illicite ; qu'en l'espèce l'existence d'une carence ou d'un fonctionnement anormal de la société est à l'évidence contredite par la tenue de l'assemblée générale et son exécution, constatations qui font échec à l'application des dispositions de l'article L. 225-103 II 2° du code de commerce ; qu'il s'ensuit que l'ordonnance doit être infirmée en toutes ses dispositions et la SARL Cofical déboutée de l'intégralité de ses demandes ;
Alors 1°) que les juges ne peuvent relever d'office un moyen de droit sans avoir préalablement invité les parties à conclure sur ce point ; qu'en relevant que les conditions prévues par l'article 809 du code de procédure civile n'étaient pas réunies pour refuser de désigner un mandataire ad hoc, quand cette disposition n'était dans le débat, la cour d'appel, qui a relevé d'office ce moyen sans inviter les parties à conclure, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Alors 2°) que les termes du litige sont déterminés par les écritures respectives des parties ; qu'en relevant, pour refuser de désigner un mandataire ad hoc, que les conditions de l'article 809 du code de procédure pénale n'étaient pas réunies, quand la demande ne portait pas sur la désignation d'un administrateur provisoire sur le fondement de l'article 809 du code de procédure civile mais d'un mandataire ad hoc sur le fondement de l'article L. 225-103 II 2° du code de commerce, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
Alors 3°) et en tout état de cause que la désignation d'un mandataire ad hoc sur le fondement de l'article L. 225-103 II, 2°, du code de commerce, en vue de faire convoquer l'assemblée générale d'une société anonyme, suppose uniquement, lorsqu'elle est demandée par un ou plusieurs actionnaires réunissant au moins 5% du capital social, qu'elle tende à des fins légitimes conformes à l'intérêt social, et non à la satisfaction de fins personnelles ; que les conditions propres à la désignation d'un administrateur provisoire, tenant à l'existence de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d'un péril imminent, n'ont en revanche pas à être remplies pour ce qui concerne la désignation d'un mandataire ad hoc ; que, pour rejeter la demande de désignation d'un mandataire ad hoc formée par la société Cofical aux fins de faire convoquer l'assemblée générale de la société Figesbal, la cour d'appel a jugé qu'une telle désignation ne serait « prévue de manière supplétive que dans l'hypothèse d'un dysfonctionnement avéré au sein de la société » et serait « toujours subordonnée soit à l'imminence d'un dommage soit à la démonstration d'un trouble manifestement illicite » et non, comme l'avait retenu le premier juge, à la démonstration par l'actionnaire demandeur de la poursuite de fins légitimes qui soient conformes à l'intérêt social ; que ce faisant, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 225-103 du code de commerce et par fausse application les dispositions de l'article 809 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi n° C 19-11.302 par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. D..., agissant en son nom personnel et en qualité d'ancien directeur général de la société Figesbal, de la société Figesbal, prise en la personne de M. D..., en sa qualité de directeur général.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que par l'effet du dispositif de l'arrêt infirmatif prononcé le 27 septembre 2018, M. W... U... était remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la SA Figesbal, d'avoir ordonné en conséquence la suspension des effets de l'assemblée générale du 16 mars 2018 et du conseil d'administration du 16 mars 2018, des convocations du conseil d'administration des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018 et de l'assemblée générale du 26 juin 2018, et de ces conseils d'administration et assemblées générales des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018, et d'avoir dit que ces suspensions prendraient effet au jour de la signification de l'arrêt à la société Figesbal, à charge pour l'une ou l'autre des parties de saisir le juge du fond au maximum dans un délai de 2 mois à compter de ladite signification aux fins qu'il soit statué, le cas échéant, sur la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait des administrateurs et dirigeants désignés en conséquence des assemblées générales et conseils d'administration susvisés ;
Aux motifs qu' « il convient de constater à titre préliminaire que par l'effet du dispositif de l'arrêt prononcé le 27 septembre 2018 par cette cour, l'ordonnance du juge des référés en date du 4 décembre 2017 a été mise à néant et que par voie de conséquence les parties se retrouvent dans la situation où elles se trouvaient antérieurement à la saisine du juge des référés diligentée le 12 septembre 2017 de sorte que W... U... est remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la SA Figesbal ; () que selon les dispositions de l'article 809 du code de procédure civile applicables en Nouvelle-Calédonie : "Le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite" ; qu'il apparait en l'espèce :- que l'assemblée générale du 16 mars 2018 a révoqué W... U... de son mandant d'administrateur et nommé à cette fonction la SC Figespart représentée par L... U... ;- que le conseil d'administration du 16 mars 2018 a élu G... H... en qualité de présidente du conseil d'administration de la SA Figesbal et P... D... en qualité de directeur général de cette société ;- que l'assemblée générale du 26 juin 2018 a conduit au vote, sur proposition de la présidente du conseil d'administration, d'une première résolution destinée, ainsi qu'en fait foi le procès-verbal de cette assemblée générale versé aux débats "à ratifier la composition actuelle du conseil d'administration de la société, de la nomination de sa nouvelle présidente et de son nouveau directeur général, dans l'hypothèse où l'action engagée devant la cour d'appel conduirait à une remise en cause des décisions prises par l'assemblée du 16 mars" ;qu'il est évident que le maintien en place de la gouvernance désignée en conséquence de l'ordonnance de référé anéantie est objectivement génératrice d'un trouble illicite dont pâtit l'intérêt social par le fait de la dyarchie qu'elle entraîne au sein de la société Figesbal qui ne peut être valablement représentée par deux présidents différents ; que le défaut de justification du "fonctionnement nocif" de la société retenu par le juge des référés pour écarter le trouble manifestement illicite est étranger aux débats dès lors que les critères d'application des dispositions de l'article 809 du code de procédure civile sont caractérisés par le constat du trouble illicite manifeste né de la représentation antinomique de la société ; que la volonté réaffirmée de l'associée majoritaire Cofical de bouleverser les modalités de gouvernance de Figesbal, également retenue par le juge des référés et rappelée par la société intimée, au soutien de sa demande tendant à la confirmation de l'ordonnance, est également inopérante dès lors que cette volonté, manifestée par les actes des conseils d'administration et des assemblées générales de la société Figesbal est la conséquence directe de la convocation d'une assemblée générale ordonnée par le dispositif de l'ordonnance de référé dont tous les effets sont anéantis ; qu'en qualifiant de "précaution" ce qui n'est qu'une stratégie ouvertement assumée par la nouvelle gouvernance de la société pour tenter de contourner les conséquences de l'arrêt du 27 septembre 2018, par une ratification a posteriori des décisions prises en conséquence de l'ordonnance infirmée, le juge des référés ne tire pas les conséquences de l'infirmation prononcée par cet arrêt ; que dès lors qu'aucune action au fond tendant à la constatation de la fraude aux droits de vote des associés lors de l'assemblée générale du 29 juin 2017 et à l'annulation de cette même assemblée générale, n'a été diligentée par les dits associés, il ne saurait être préjugé d'une situation illicite résultant d'une fraude dont à l'évidence ceux-là même qui l'invoquent se sont parfaitement accommodés, comme le démontre l'exécution à leur profit de l'ensemble des résolutions votées ; qu'il importe peu enfin que l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance du 7 [lire 4] décembre 2017 ait fondé en son temps la régularité de la tenue des actes et des assemblées dont la suspension des effets est demandée, dès lors que par l'effet de l'arrêt du 27 septembre 2018 qui a remis W... U... dans l'exercice de ses mandats antérieurs, ces actes et assemblées sont devenus irréguliers ; que la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait du dirigeant irrégulièrement désigné est reconnue par la jurisprudence (Cass. Com. 24/04/1990 et Cass. Com. 27/01/2009, n°07-20402) ; que les nullités qui sont encourues en chaîne par les actes et délibérations des organes sociaux, dont la nomination ou la composition est devenue irrégulière par le fait de l'arrêt précité, doivent être appréciées au fond au regard de chacun de ces actes ; que c'est donc avec raison que les appelants ont saisi le juge des référés aux fins que soit ordonné :
- la suspension des effets de l'assemblée générale du 16 mars 2018 et du conseil d'administration du 16 mars 2018 ;- la suspension des effets des convocations du conseil d'administration des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018, de l'assemblée générale du 26 juin 2018 et des effets de ces conseils d'administration et assemblées générales ;qu'il convient de dire que ces suspensions prendront effet au jour de la signification à l'intimée du présent arrêt, à charge pour l'une ou l'autre des parties de saisir le juge du fond au maximum dans un délai de 2 mois à compter de la dite signification, aux fins qu'il soit statué, le cas échéant, sur la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait des administrateurs et dirigeants désignés en conséquence des assemblées générales et conseils d'administration susvisés ; qu'il ne peut en revanche être fait droit à une demande de suspension des effets autres que celle résultant de convocations ou d'actes précisément définis et datés de manière certaines ; que les appelants seront donc déboutés du surplus de leurs demandes de suspension » ;
Alors 1°) que pour ordonner la suspension des effets de l'assemblée générale et du conseil d'administration de la société Figesbal du 16 mars 2018, convoqués par le mandataire ad hoc désigné par l'ordonnance de référé du 4 décembre 2017, et des effets des conseils d'administration et assemblée générale qui s'en sont suivis, la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa du 27 septembre 2018 qui a infirmé l'ordonnance du 4 décembre 2017 ; que la cour d'appel a en effet considéré que cet arrêt infirmatif aurait eu pour effet de « remettre » M. W... U... en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal et que la « dyarchie » qui en résulterait au sein de la société Figesbal serait génératrice d'un trouble manifestement illicite justifiant les mesures de suspension ordonnées ; que l'arrêt attaqué se trouve ainsi dans la dépendance directe de celui rendu le 27 septembre 2018 ; que dès lors, par application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le pourvoi n° M 18-24.853 formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa du 27 septembre 2018 entraînera l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt attaqué ;
Alors 2°) que le juge ne peut modifier l'objet du litige, tel que déterminé par les conclusions des parties ; que le trouble manifestement illicite invoqué par M. W... U... et l'Association d'actionnaires minoritaires de Figesbal à l'appui de leurs demandes de suspension résidait dans la nullité qui entacherait l'assemblée générale et le conseil d'administration de la société Figesbal du 16 mars 2018 et les conseils d'administration et l'assemblée générale qui s'en sont suivis, par l'effet de l'arrêt du 27 septembre 2018 ; qu'ils ne soutenaient en revanche nullement que ce trouble résiderait dans une représentation de la société Figesbal par deux présidents différents, en raison d'une supposée reprise par M. W... U... de ses qualités d'administrateur et de président du conseil d'administration à la suite de l'arrêt du 27 septembre 2018 ; qu'en se fondant pourtant sur un trouble manifestement illicite né d'une prétendue dyarchie au sein de la société Figesbal, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;
Alors 3°), en outre, que le juge ne peut relever d'office un moyen sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur celui-ci ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de l'existence d'une prétendue représentation antinomique de la société Figesbal par deux présidents différents, sans inviter les parties à s'en expliquer préalablement, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, en violation de l'article 16 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;
Alors 4°), en tout état de cause, que les actes ou délibérations pris par les organes d'une société s'imposent tant que leur nullité n'a pas été judiciairement prononcée ; que la cour d'appel a constaté que l'assemblée générale de la société Figesbal du 16 mars 2018 avait révoqué le mandat d'administrateur de M. W... U..., que le conseil d'administration du même jour avait élu Mme G... H... en qualité de présidente en remplacement de M. W... U..., et que l'assemblée générale du 26 juin 2018 avait ensuite ratifié la nouvelle composition du conseil d'administration et la nomination de la nouvelle présidente (arrêt attaqué, p. 9 § 8 à 10) ; qu'il résultait nécessairement de ces constatations que M. W... U... ne pouvait « récupérer » ses mandats d'administrateur et de président du conseil d'administration tant que les décisions prises par les assemblées générales et le conseil d'administration des 16 mars et 26 juin 2018 n'étaient pas judiciairement annulées ; qu'en jugeant néanmoins que, par l'effet de l'arrêt du 27 septembre 2018 ayant mis à néant l'ordonnance de référé du 4 décembre 2017, M. W... U... serait « remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la SA Figesbal », et en en déduisant l'existence d'un trouble manifestement illicite né d'une représentation de la société par deux présidents différents, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 235-1 du code de commerce, ensemble l'article 809 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;
Alors 5°), au surplus, que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en jugeant, d'un côté, que par l'effet de l'arrêt du 27 septembre 2018 les parties étaient replacées dans la situation où elle se trouvaient avant la saisine du juge des référés du 12 septembre 2017, et donc que M. W... U... serait « remis » en ses qualités d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal (p. 9 § 2 de l'arrêt attaqué), et, de l'autre, qu'était maintenue la nouvelle gouvernance désignée le 16 mars 2018, de sorte que la société Figesbal serait également présidée par Mme G... H... (p. 9 dernier §), la cour d'appel s'est contredite, et n'a donc pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.

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10 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 janvier 2021, 18-25.713 18-25.730, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 janvier 2021, 18-25.713 18-25.730, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Cassation partielle et rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

REFERE - Compétence - Applications diverses - Annulation des délibérations de l'assemblée des actionnaires d'une société

ANALYSE DE L'ARRET :

Il résulte de l'article L. 235-1 du code de commerce et de l'article 873, alinéa 1, du code procédure civile que l'annulation des délibérations de l'assemblée générale d'une société, qui n'est ni une mesure conservatoire, ni une mesure de remise en état, n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés, qui peut, en revanche, en suspendre les effets

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB

COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 13 janvier 2021



Cassation partielle et rejet

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 35 F-P

Pourvois n°W 18-25.713Q 18-25.730 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 JANVIER 2021
I - 1°/ La société Bpifrance investissements, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
2°/ la société BNP Paribas développement, société anonyme, dont le siège est [...] ,
3°/ la société Sofimac régions, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
ont formé le pourvoi n° W 18-25.713 contre un arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel de Dijon (2e chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à la société 2EC, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Administrateurs judiciaires partenaires (AJ Partenaires), société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , en la personne de M. N... X..., prise en qualité d'administrateur judiciaire de la société PCM développement,
3°/ à la société MP associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , en la personne de M. F... W..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société PMC développement,
défenderesses à la cassation.
II - 1°/ la société Bpifrance investissements, société par actions simplifiée,
2°/ la société BNP Paribas développement, société anonyme,
3°/ la société Sofimac régions, société par actions simplifiée,
ont formé le pourvoi n° Q 18-25.730 contre un arrêt rendu le 16 octobre 2018 par la cour d'appel de Dijon (2e chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à la société 2EC, société à responsabilité limitée,
2°/ à la société Administrateurs judiciaires partenaires (AJ Partenaires), société d'exercice libéral à responsabilité limitée, en la personne de M. N... X..., prise en qualité d'administrateur judiciaire de la société PCM développement,
3°/ à la société MP associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, en la personne de M. F... W..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société PMC développement,
4°/ à la société PMC développement, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
5°/ à la société Administrateurs judiciaires partenaires (AJ Partenaires), société d'exercice libéral à responsabilité limitée, en la personne de M. N... X..., prise en qualité d'administrateur judiciaire de la société Menuiserie Z... et O...,
6°/ à la société MP associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, en la personne de M. F... W..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Menuiserie Z... et O...,
7°/ à la société Menuiserie Z... et O..., société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] ,
8°/ à la société Administrateurs judiciaires partenaires (AJ Partenaires), société d'exercice libéral à responsabilité limitée, en la personne de M. N... X..., prise en qualité d'administrateur judiciaire de la société [...],
9°/ à la société MP associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, en la personne de M. F... W..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société [...],
10°/ à la société Bourgogne France Comté croissance, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
Les demanderesses au pourvoi n° W 18-25.713 invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les demanderesses au pourvoi n° Q 18-25.730 invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de Me Isabelle Galy, avocat des sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions, de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société 2EC, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° W 18-25.713 et Q 18-25.730 sont joints.
Reprise d'instance
2. Il est donné acte aux sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions de la reprise de l'instance dirigée contre la société AJ Partenaires et la société MP associés, prises en leurs qualités respectives d'administrateur judiciaire des sociétés Menuiserie Z... et O... et Z... et O... - Menuiserie bois et agencement et PMC développement et liquidateur judiciaire des sociétés Menuiserie Z... et O... et Z... et O... - Menuiserie bois et agencement et PMC développement.
Faits et procédure
3. Selon les arrêts attaqués (Dijon, 20 septembre 2018 et 16 octobre 2018), rendus en matière de référé, les sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions sont associées majoritaires de la société PMC développement, société par actions simplifiée. La société 2EC, dont M. K... est le gérant, est également associée, et présidente de la société PMC développement. Les autres actions sont détenues par la société Bourgogne Franche Comté croissance.
4. La société PMC développement a fait l'acquisition, au moyen d'emprunts bancaires, de la société Menuiserie Z... et O..., qui détient elle-même l'intégralité du capital de la société Menuiserie Z... et O... bois - agencement.
5. La société PMC développement rencontrant des difficultés, des mandataires ad hoc ont été successivement désignés en 2013 et 2015 afin de négocier avec les banquiers une restructuration de ses dettes et, en dernier lieu, par une ordonnance du 2 juillet 2018, la société AJ Partenaires, en la personne de M. X....
6. Le 13 juillet 2018, les sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions ont adressé à M. K..., en sa qualité de dirigeant de la société 2EC, une convocation à une assemblée générale de la société PMC développement, fixée au 30 juillet 2018, ayant pour ordre du jour la révocation de la société 2EC de son mandat de président de cette société et son remplacement par M. S....
7. Une ordonnance du 17 juillet 2018, rendue à la demande des sociétés 2EC, PMC développement, Menuiserie Z... et O... et Menuiserie Z... et O... bois-agencement, a désigné la société AJ Partenaires en qualité d'administrateur provisoire des sociétés 2EC, PMC développement, Menuiserie Z... et O... et Menuiserie Z... et O... bois-agencement avec mission, pendant une durée de trois mois, de diriger les sociétés du groupe et, notamment, de reprendre la mission confiée précédemment au mandataire ad hoc ainsi que de conduire les négociations avec les banques.
8. Les 25 et 26 juillet 2018, la société 2EC, en présence de la société AJ Partenaires, a assigné en référé les sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement, Sofimac régions et PMC développement aux fins d'obtenir le report, après le terme de la mission de l'administrateur provisoire, de l'assemblée générale convoquée pour le 30 juillet 2018.
9. Par le premier arrêt attaqué, la cour d'appel a fait droit à ces demandes, après avoir constaté que le maintien de l'assemblée générale du 30 juillet 2018 et la désignation de M. S... en qualité de président de la société PMC développement seraient contraires à la mission de l'administrateur provisoire telle que prévue par l'ordonnance du 17 juillet 2018.
10. Parallèlement, le 16 août 2018, les sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions ont convoqué une assemblée générale des associés de la société PMC développement pour le 31 août 2018 avec pour ordre du jour la fixation de la rémunération de la société 2EC. Lors de cette assemblée, les sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions en ont modifié l'ordre du jour et mis au vote deux projets de résolution, portant, l'une, sur la révocation avec effet immédiat de la société 2EC de ses fonctions de présidente de la société et, l'autre, sur la nomination, elle aussi à effet immédiat, de M. S... comme président de la société. La société 2EC s'étant abstenue, la modification de l'ordre du jour a été approuvée et les deux résolutions adoptées à la majorité des voix.
11. Par le second arrêt attaqué, la cour d'appel a prononcé la nullité de ces résolutions.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi n° W 18-25.713
Enoncé du moyen
12. Les sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions font grief à l'arrêt du 20 septembre 2018 de constater que le maintien de l'assemblée générale du 30 juillet 2018 et la désignation de M. S... en qualité de président de la société PMC développement seraient contraires à la mission de l'administrateur provisoire telle que prévue par l'ordonnance du 17 juillet 2018 l'ayant désigné, d'ordonner le report de l'assemblée générale convoquée pour le 30 juillet 2018 et de la proroger après le terme de la mission de l'administrateur provisoire, alors :
« 1°/ que le juge des référés, qui ne peut s'immiscer dans le fonctionnement d'une société, ne peut prononcer l'ajournement d'une assemblée générale qu'en cas d'irrégularité faisant peser sur cette assemblée un risque d'annulation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la régularité de la convocation adressée aux associés pour la tenue de l'assemblée générale n'était pas contestée, qu'il n'était pas soutenu que les associés n'auraient pas reçu toute l'information nécessaire pour statuer, et que le débat ne concernait donc pas un trouble manifestement illicite qu'il conviendrait de faire cesser mais un dommage imminent qui résulterait d'un changement de présidence ; qu'en ordonnant ainsi le report de l'assemblée générale litigieuse en l'absence de toute irrégularité faisant courir un risque d'annulation de cette assemblée, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et a violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile ;
2°/ qu'aucun dommage imminent ne saurait résulter de la tenue d'une assemblée générale à l'égard de laquelle n'est invoquée aucune irrégularité faisant peser un risque d'annulation ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a encore violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile ;
3°/ que la cour d'appel a constaté elle-même qu'il n'appartient pas au juge des référés de statuer sur l'intérêt social de la société, et a réformé l'ordonnance entreprise en ce qu'elle avait constaté dans le dispositif que le maintien de l'assemblée générale du 30 juillet 2018 et la désignation de M. S... en qualité de président de la société PMC développement seraient contraire à l'intérêt social de la société ; qu'en relevant, pour ordonner le report de cette assemblée, que la confiance que les banques accordent à l'administrateur provisoire serait susceptible d'être affectée par une délibération prévoyant un changement de présidence et qu'il en résulte un dommage imminent qu'il convient de prévenir, la cour d'appel, qui s'est ainsi prononcée sur l'intérêt social d'un changement de présidence, en contradiction avec le principe qu'elle avait elle-même énoncé, a excédé ses pouvoirs et violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile ;
4°/ que la cour d'appel a constaté elle-même que les parties s'accordaient à dire que tant que le mandat d'administrateur provisoire de la société AJ Partenaires serait en vigueur, un changement de président de la société PMC développement serait sans emport quant à la direction de la société et que le plan de retournement ne pourrait être mis en oeuvre ; qu'en constatant néanmoins dans son dispositif que le changement de présidence serait contraire à la mission de l'administrateur provisoire, et en ordonnant le report de l'assemblée générale devant décider ce changement au motif qu'il était nécessaire d'assurer à M. X... toutes les conditions optimales requises à la réussite de sa mission, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, dont il s'évinçait qu'un tel changement de direction n'était pas de nature à affecter la mission de l'administrateur provisoire, de sorte qu'il ne pouvait en résulter aucun dommage imminent pour la société PMC développement, et a violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
13. Après avoir constaté que l'administrateur provisoire de la société PMC développement avait pour mission, notamment, de reprendre les négociations avec les banques pour restructurer sa dette, l'arrêt retient qu'il est établi que la confiance accordée par les banques à l'administrateur provisoire, qui est de nature à favoriser les négociations que celui-ci mène avec elles dans l'exercice de son mandat, est susceptible d'être affectée par une délibération dont l'urgence n'est nullement avérée. De ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur l'opportunité de modifier la présidence de la société au regard de l'intérêt social, a pu déduire que la seule tenue de cette assemblée générale pendant que la société AJ Partenaires accomplissait sa mission était, par elle-même, de nature à causer à la société PMC développement un dommage imminent, qu'il convenait de prévenir en ordonnant le report de l'assemblée générale.
14. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le moyen du pourvoi n° Q 18-25.730, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
15. Les sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions font grief à l'arrêt du 16 octobre 2018 de prononcer la nullité des résolutions adoptées lors de l'assemblée générale de la société PMC développement du 31 août 2018, avec toutes conséquences de droit, alors « que l'annulation de délibérations de l'assemblée générale des associés d'une société n'étant ni une mesure conservatoire ni une mesure de remise en état, n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés ; qu'en prononçant l'annulation des décisions adoptées par l'assemblée générale de la société PMC développement du 31 août 2018, quand cette annulation, à supposer même qu'il s'agissait de la seule mesure de nature à faire cesser le trouble, excédait les pouvoirs du juge des référés, la cour d'appel a violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile, ensemble l'article L. 235-1 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 235-1 du code de commerce et l'article 873, alinéa 1er, du code de procédure civile :
16. Il résulte de ces textes que l'annulation des délibérations de l'assemblée générale d'une société, qui n'est ni une mesure conservatoire, ni une mesure de remise en état, n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés.
17. Pour annuler les résolutions adoptées lors de l'assemblée générale du 31 août 2018, l'arrêt retient que, s'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés d'annuler un acte dans la mesure où une telle annulation consiste à trancher le fond, il y a lieu de constater, en l'espèce, et sans qu'aucune appréciation soit portée sur le fond des décisions prises, que la décision de mettre à l'ordre du jour de l'assemblée générale du 31 août 2018 les projets de résolutions portant sur la révocation du président de la société et la nomination d'un autre président est à l'origine d'un trouble manifestement illicite consistant en la violation délibérée de l'ordonnance du 27 juillet 2018, et que la seule mesure permettant de faire cesser ce trouble est d'annuler les délibérations qui en ont découlé et au terme desquelles ces résolutions ont été adoptées.
18. En statuant ainsi, alors qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés, fût-ce pour faire cesser un trouble manifestement illicite, d'annuler les délibérations de l'assemblée générale d'une société, la cour d'appel, qui pouvait en revanche en suspendre les effets, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi n° Q 18-25.730, la Cour :
Sur le pourvoi n° W 18-25.713 :
REJETTE le pourvoi ;
Sur le pourvoi n° Q 18-25.730 :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule les résolutions adoptées lors de l'assemblée générale du 31 août 2018 et statue sur les dépens et l'application l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 16 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société 2EC aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi n° W 18-25.713 par Me Isabelle Galy, avocat aux Conseils, pour les sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté que le maintien de l'assemblée générale du 30 juillet 2018 et la désignation de M. S... en qualité de président de la société PMC Développement seraient contraires à la mission de l'administrateur provisoire telle que prévue par l'ordonnance du 17 juillet 2018 l'ayant désigné, d'AVOIR ordonné le report de l'assemblée générale convoquée pour le 30 juillet 2018 et de l'AVOIR prorogée après le terme de la mission de l'administrateur provisoire,
AUX MOTIFS PROPRES QUE« les appelantes soutiennent principalement qu'il n'entrait pas dans les pouvoirs du juge des référés d'ordonner l'ajournement de l'assemblée générale, et à titre surabondant que la décision n'est pas justifiée par les éléments invoqués par la société 2EC.Il doit être relevé que si, dans leurs écritures, les appelantes critiquent abondamment la décision par laquelle la SELARL AJ PARTENAIRES a été désignée par le président du tribunal de commerce de Dijon en qualité d'administrateur provisoire de la SAS PMC DEVELOPPEMENT, de la SAS MENUISERIE Z... et O... et de la SASU [...], la cour n'est pas saisie de ce litige ; que par ailleurs cette ordonnance n'ayant, au jour des débats devant la cour, donné lieu à aucune décision de rétractation, il peut seulement être pris acte de l'existence de ce mandat qui est toujours en cours puisque confié pour une durée de trois mois à compter du 17 juillet 2018.Il ressort tant de l'ordonnance dont appel que des explications des parties que, si le premier juge était saisi au double visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile, le débat n'a porté que sur la possibilité de faire droit aux prétentions de la Sarl 2EC sur le fondement de l'article 873 alinéa 1, lequel prévoit que le président peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.Les appelantes font valoir que seules des circonstances exceptionnelles peuvent justifier l'ajournement d'une assemblée générale ; que la jurisprudence n'a admis une telle décision que dans des hypothèses dans lesquelles il était constaté des manquements graves à l'information des associés ou des risques manifestes d'annulation des délibérations notamment en cas de violation flagrante des règles de convocation ou lorsqu'un litige existait quant à certains droits de vote ; que par contre il n'entre pas dans les pouvoirs du juge, à fortiori du juge des référés, d'intervenir dans le fonctionnement d'une société ni de s'immiscer dans sa gestion ; qu'une divergence de vues stratégiques ne peut notamment pas justifier son intervention alors que l'appréciation de l'intérêt social de la société incombe à ses actionnaires et à eux seuls.Il ressort des explications des parties que la régularité de la convocation adressée aux associés pour la tenue de l'assemblée générale ne fait l'objet d'aucune contestation ; qu'il n'est pas plus soutenu que les associés n'auraient pas reçu toute l'information nécessaire pour statuer.Le débat ne concerne en conséquence pas un trouble manifestement illicite qu'il conviendrait de faire cesser, mais uniquement un dommage imminent dont la Sarl 2EC soutient qu'il résulterait d'un changement de président de la société au moment où des négociations sont menées avec les banques pour obtenir des aménagements de créances.Les appelantes affirment pour leur part que la situation du groupe justifie que les mesures prévues au plan de retournement soient prises, et que c'est l'échec de la société 2EC qui rend nécessaire un changement de gouvernance pour permettre la mise en oeuvre de ce plan. Elles ont d'ailleurs motivé leur requête aux fins d'être autorisées à assigner à jour fixe en affirmant qu'à défaut de réorganisation de la gouvernance, la mise en oeuvre du plan risquerait d'être gravement compromise, ce qui mettrait en péril la société elle-même et en conséquence leurs droits.Il est exact qu'il n'appartient pas au juge des référés de statuer sur l'intérêt social de la société, et que c'est à tort que le premier juge a, dans le dispositif de sa décision, constaté que "le maintien de l'assemblée générale du 30 juillet 2018 et la désignation de Monsieur V... S... en qualité de président de la société PMC DEVELOPPEMENT seraient contraires à l'intérêt social" de cette société.Il doit être relevé que tant les appelantes que les intimés sont d'accord pour dire que, tant que le mandat confié à la SELARL AJ PARTENAIRES est en vigueur, un changement de président de la société PMC DEVELOPPEMENT est juridiquement sans emport quant à la direction de cette société.Il doit également être souligné que la SELARL AJ PARTENAIRES a certes reçu une mission de direction notamment de la société PMC DEVELOPPEMENT, mais que, concernant le plan de retournement, sa mission ne concerne que son étude, la vérification qu'il n'existe pas de solution alternative, et la reprise des négociations avec les banques en vue d'aboutir à un éventuel accord pour l'application de tout ou partie des mesures préconisées ; que notamment le juge a expressément exclu de la mission de l'administrateur provisoire la mise en oeuvre d'un plan social. Il s'en déduit que, tant que le mandat confié à la SELARL AJ PARTENAIRES est en vigueur, il n'est pas question de mettre en oeuvre le plan de retournement, mais uniquement de l'étudier et de voir dans quelles conditions il pourrait être mis en oeuvre ultérieurement.Les parties sont d'accord pour indiquer qu'il est impératif pour le groupe Z... et O... qu'un accord soit trouvé avec ses créanciers et en premier lieu avec les banques titulaires de la "dette senior LBO".Il ressort par ailleurs des échanges entre elles dont il est produit copie dans leurs dossiers que le litige porte non pas sur le principe d'une diminution de la masse salariale, mais sur ses modalités, et surtout sur l'identité de la personne qui, en sa qualité de président de la société, sera amenée à mettre en oeuvre les mesures.La Sarl 2EC soutient que les négociations menées avec les banques risquent d'échouer si Monsieur S... est désigné en qualité de président de la société PMC DEVELOPPEMENT. Les appelantes soutiennent pour leur part que c'est l'existence de voix discordantes entre la SELARL AJ PARTENAIRES et la société 2EC qui serait de nature à entraîner ce risque.Or il ressort des pièces produites par la société 2EC :- qu'en réponse à un courrier de Maître X... du 12 juillet 2018 qui annonçait une réunion le 6 septembre suivant, les banques ont toutes confirmé leur accord pour maintenir leurs concours à court terme, la Caisse d'Epargne, et le CIC jusqu'au 30 septembre 2018, et BPI France, la BNP Paribas et la Banque Populaire jusqu'au 6 septembre 2018, le représentant de la Caisse d'Epargne souhaitant toutefois des précisions sur la gouvernance prévue,- que par courriel du 26 juillet 2018, la Caisse d'Epargne, indiquant qu'elle apprenait "avec stupeur que trois des actionnaires de PMC DEVELOPPEMENT (tentaient) un passage en force en convoquant une assemblée générale" dont l'objet était de "révoquer l'actuel dirigeant Monsieur K..., alors que ce point de gouvernance est au centre des réponses attendues avant fin juillet", a remis en cause son accord précédent dans l'attente d'informations complémentaires,- que Maître X... ayant informé les banques de sa désignation par courrier du 30 juillet 2018 et leur ayant demandé le maintien de leurs concours à court terme jusqu'au 30 septembre suivant, ces dernières ont successivement toutes accepté de faire droit à cette requête compte-tenu de cette nomination.Il résulte de l'ensemble de ces éléments que, sans qu'il soit statué sur l'intérêt de la société PCM DEVELOPPEMENT à changer de président pour assurer sa pérennité, il est établi par la société 2EC que la confiance que les banques accordent à l'administrateur provisoire - confiance qui est de nature à favoriser les négociations que celui-ci mène avec elles dans l'exercice de son mandat - est susceptible d'être affectée par une délibération dont l'urgence n'est nullement avérée (puisqu'ainsi que retenu plus haut, tant que la mission de cet administrateur dure, il n'est pas question de mettre en oeuvre le plan de retournement, lequel est au surplus en cours d'étude) ; que la seule tenue de cette assemblée générale tant que la SELARL AJ PARTENAIRES exerce sa mission est par elle même de nature à causer à la société un dommage imminent pour la société PMC DEVELOPPEMENT qu'il convient de prévenir » (arrêt p. 6-7),
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « les sociétés en défense s'opposent à cette demande au motif que seules des circonstances exceptionnelles peuvent justifier l'ajournement ou le report d'une assemblée générale ;Attendu que les défendeurs pour corroborer leur argumentation s'appuient sur la jurisprudence constante de la Cour de cassation ; qu'il convient de relever que tous les arrêts cités relèvent de situations totalement différentes de la présente instance et sans administrateur provisoire ;Attendu qu'en l'espèce les circonstances actuelles peuvent être qualifiées d'exceptionnelles vu la désignation d'un administrateur provisoire, mesure conservatoire et temporaire ;Attendu par conséquent qu'à la vue des circonstances exceptionnelles, de la complexité de la situation et de la nécessité d'assurer à Me X... toutes les conditions optimales requises à la réussite de sa mission, il convient de faire droit aux demandes de la SARL 2EC » (jugement p. 4),
1°) ALORS QUE le juge des référés, qui ne peut s'immiscer dans le fonctionnement d'une société, ne peut prononcer l'ajournement d'une assemblée générale qu'en cas d'irrégularité faisant peser sur cette assemblée un risque d'annulation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la régularité de la convocation adressée aux associés pour la tenue de l'assemblée générale n'était pas contestée, qu'il n'était pas soutenu que les associés n'auraient pas reçu toute l'information nécessaire pour statuer, et que le débat ne concernait donc pas un trouble manifestement illicite qu'il conviendrait de faire cesser mais un dommage imminent qui résulterait d'un changement de présidence ; qu'en ordonnant ainsi le report de l'assemblée générale litigieuse en l'absence de toute irrégularité faisant courir un risque d'annulation de cette assemblée, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et a violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'aucun dommage imminent ne saurait résulter de la tenue d'une assemblée générale à l'égard de laquelle n'est invoquée aucune irrégularité faisant peser un risque d'annulation ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a encore violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE la cour d'appel a constaté elle-même qu'il n'appartient pas au juge des référés de statuer sur l'intérêt social de la société, et a réformé l'ordonnance entreprise en ce qu'elle avait constaté dans le dispositif que le maintien de l'assemblée générale du 30 juillet 2018 et la désignation de M. S... en qualité de président de la société PMC Développement seraient contraire à l'intérêt social de la société ; qu'en relevant, pour ordonner le report de cette assemblée, que la confiance que les banques accordent à l'administrateur provisoire serait susceptible d'être affectée par une délibération prévoyant un changement de présidence et qu'il en résulte un dommage imminent qu'il convient de prévenir, la cour d'appel, qui s'est ainsi prononcée sur l'intérêt social d'un changement de présidence, en contradiction avec le principe qu'elle avait elle-même énoncé, a excédé ses pouvoirs et violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile ;
4°) ALORS QU'en toute hypothèse, la cour d'appel a constaté elle-même que les parties s'accordaient à dire que tant que le mandat d'administrateur provisoire de la société AJ Partenaires serait en vigueur, un changement de président de la société PMC Développement serait sans emport quant à la direction de la société et que le plan de retournement ne pourrait être mis en oeuvre ; qu'en constatant néanmoins dans son dispositif que le changement de présidence serait contraire à la mission de l'administrateur provisoire, et en ordonnant le report de l'assemblée générale devant décider ce changement au motif qu'il était nécessaire d'assurer à Maître X... toutes les conditions optimales requises à la réussite de sa mission, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, dont il s'évinçait qu'un tel changement de direction n'était pas de nature à affecter la mission de l'administrateur provisoire, de sorte qu'il ne pouvait en résulter aucun dommage imminent pour la société PMC Développement, et a violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi n° Q 18-25.730 par Me Isabelle Galy, avocat aux Conseils, pour les sociétés Bpifrance investissements, BNP Paribas développement et Sofimac régions.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité des résolutions adoptées lors de l'assemblée générale de la société PMC Développement du 31 août 2018, avec toutes conséquences de droit,
AUX MOTIFS QU'« il ressort du dossier du tribunal de commerce de Dijon que, si la Sarl 2EC a saisi le président de cette juridiction en référé au visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile, la décision est motivée au regard des dispositions de ce second texte, lequel prévoit que le président peut, dans les mêmes limites (que celles prévues par l'article 872) et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.Il n'est pas contestable qu'il n'appartient pas au juge des référés de s'immiscer dans la vie sociale d'une société, et notamment pas de se prononcer sur l'adéquation des décisions de son assemblée générale à son intérêt social. Les développements des parties sur les mérites respectifs de l'actuel dirigeant de la société PMC DÉVELOPPEMENT et de Monsieur S... sont sans emport dans le cadre de la présente procédure.Par contre, il est de la compétence du juge des référés d'apprécier si la preuve d'un trouble manifestement illicite est rapportée par la partie qui l'invoque.A juste titre les appelantes relèvent que, pour conclure qu'il y avait lieu à référé, le président ne pouvait pas se contenter de retenir la vraisemblance d'un trouble manifestement illicite, seule la certitude de l'existence d'un tel trouble pouvant justifier son intervention.C'est également à raison que les appelantes soulignent que la force de chose jugée d'une décision ne concerne que les points réellement tranchés par le juge, et que les constats que celui-ci a pu faire ne constituent en aucune manière une telle décision; que, plus particulièrement, le constat que le président du tribunal de commerce de Dijon a fait dans son ordonnance du 27 juillet 2018, que "le maintien de l'assemblée générale du 30 juillet 2018 et la désignation de Monsieur V... S... en qualité de président de la société PMC DÉVELOPPEMENT seraient contraires à l'intérêt social de cette dernière ainsi qu'à la mission de l'administrateur provisoire telle que prévue par l'ordonnance du 17 juillet 2018 l'ayant désigné", outre le fait qu'il n'entrait pas dans les pouvoirs de ce magistrat statuant en référé, est sans aucune portée juridique.Par contre, il n'est pas contesté que, par ordonnance du 27 juillet 2018, le président du tribunal de commerce avait ordonné le report de l'assemblée générale des associés de la société PMC DÉVELOPPEMENT convoquée pour le 30 juillet 2018, prorogé cette assemblée jusqu'au terme de la mission de l'administrateur provisoire, et donné pouvoir à Maître X..., en sa qualité d'administrateur provisoire de la société PMC DÉVELOPPEMENT, d'assister à l'assemblée générale qui devait se tenir le 30 juillet 2018 avec mission de veiller à sa prorogation à l'issue de sa mission.Les appelantes ne contestent pas que ces dispositions figurant au dispositif de l'ordonnance du 27 juillet 2018 constituent bien des décisions ayant force exécutoire en raison de son caractère exécutoire par provision, ce nonobstant l'appel qu'elles avaient formé à son encontre.Il ressort par ailleurs clairement de cette ordonnance que l'ordre du jour de cette assemblée générale était d'une part la révocation de la société 2EC de son mandat de présidente de PMC DÉVELOPPEMENT et d'autre part la désignation de Monsieur V... S... en ses lieu et place.Ainsi que rappelé plus haut, le 30 juillet 2018, l'assemblée générale a été ajournée jusqu'au terme de la mission de l'administrateur provisoire après que les sociétés BPIFINANCE INVESTISSEMENTS, BNP PARIBAS DÉVELOPPEMENT PARIBAS DÉVELOPPEMENT et SOFIMAC RÉGIONS aient fait toutes réserves de leurs droits dont celui de réunir l'assemblée sur le même ordre du jour "dès le prononcé de la décision de la cour d'appel ou de la décision du président du tribunal de commerce sur leur demande de révocation de l'ordonnance du 17 juillet 2018" ce qui démontre qu'elles avaient parfaitement connaissance de la situation juridique.Il est également établi tant par les pièces du dossier que par les écritures des parties que si, le 16 août 2018, les sociétés appelantes ont convoqué les associés de PMC DÉVELOPPEMENT pour une nouvelle assemblée générale fixée au 31 août 2018 avec pour seul ordre du jour la fixation de la rémunération du PDG compte-tenu de l'intervention d'un administrateur provisoire, elles ont, dès l'ouverture de cette assemblée, demandé et voté une modification de l'ordre du jour pour soumettre de nouveau aux associés deux résolutions, l'une portant sur la révocation de la Sarl 2EC de son mandat de président et l'autre sur la nomination en ses lieu et place de Monsieur V... S... ; que malgré l'opposition tant de 2EC que de la société BFC CROISSANCE, ces deux résolutions ont été adoptées dès lors que le total des actions détenues dans le capital social par les trois sociétés appelantes leur donne la majorité.Il est également incontesté que le changement d'ordre du jour avait été décidé par les appelantes avant même la tenue de l'assemblée générale puisqu'elles ont averti la Selarl AJ PARTENAIRES de leur projet quelques instants avant la réunion. Le procès-verbal de cette assemblée générale démontre au surplus que la modification de l'ordre du jour n'a pas fait suite à un quelconque incident lors de la réunion des associés, mais que les appelantes ont annoncé leur intention dès l'ouverture des débats.Il ressort également clairement des propos tenus par le représentant des appelantes lors de cette assemblée générale que leur décision de la convoquer fait suite à un échange de courriers entre elles et la société 2EC intervenu les 30 juillet et 8 août 2018 et dans lesquels chaque partie restait sur ses positions initiales ; qu'aucun élément nouveau par rapport à ceux déjà connus lors de la procédure ayant donné lieu à l'ordonnance du 27 juillet 2018 n'était intervenu.Ces éléments permettent d'en conclure que les appelantes, qui avaient vu la précédente assemblée générale convoquée en vue d'un changement de gouvernance de la société PMC DÉVELOPPEMENT être reportée à l'expiration de la mission de l'administrateur provisoire par l'ordonnance du 27 juillet 2018, ont sciemment convoqué une nouvelle assemblée générale dans le même but dans des conditions leur permettant d'empêcher la société 2EC de saisir de nouveau le président du tribunal de commerce pour obtenir une décision similaire ; qu'elles ont ainsi sciemment violé l'ordonnance du 27 juillet 2018.D'autre part, la société 2EC avait démontré, pour obtenir le report de l'assemblée générale du 30 juillet 2018, que la confiance que les banques accordaient à l'administrateur provisoire - confiance qui est de nature à favoriser les négociations que celui-ci mène avec elles dans l'exercice de son mandat - était susceptible d'être affectée par une délibération dont l'urgence n'était nullement avérée (puisque tant que la mission de cet administrateur dure, il n'est pas question de mettre en oeuvre le plan de retournement, lequel est au surplus en cours d'étude), les banque ayant vivement réagi à l'annonce du changement de gouvernance en menaçant de ne plus maintenir leurs concours à court terme, et que la seule tenue de cette assemblée générale tant que la Selarl AJ PARTENAIRES exerce sa mission était par elle même de nature à causer à la société un dommage imminent pour la société PMC DÉVELOPPEMENT qu'il convenait de prévenir.La proximité de la tenue le 6 septembre 2018 d'une réunion très importante avec les banques rendait en conséquence très urgente l'intervention d'une décision judiciaire dans le cadre du nouveau litige créé par la tenue de l'assemblée générale du 31 août 2018.Cette violation délibérée d'une décision de justice exécutoire constitue un trouble manifestement illicite qui donne pouvoir au juge des référés de prescrire les mesures de remise en état qui s'imposent pour le faire cesser, et le juge apprécie souverainement le choix de cette mesure.Si la jurisprudence retient habituellement qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés d'annuler un acte dans la mesure où une telle annulation consiste à trancher le fond, en l'espèce, et sans qu'aucune appréciation soit portée sur le fond des décisions prises, il ne peut qu'être constaté que celle consistant à mettre à l'ordre du jour de l'assemblée générale du 31 août 2018 les résolutions portant sur la révocation du président de la société et la nomination d'un autre président est à l'origine du trouble illicite ci-dessus constaté, et que la seule mesure permettant de faire cesser ce trouble est d'annuler les délibérations qui en ont découlé et qui ont porté sur ces résolutions, étant ici rappelé que les droits des associés dans la direction de la société ne sont pas méconnus dès lors que l'assemblée générale du 30 juillet 2018, qui a le même objet, fait seulement l'objet d'une prorogation.La publication dans un journal d'annonces légale le 13 septembre 2018 des décisions de révocation et de nomination malgré l'annulation prononcée par le président du tribunal de commerce de Dijon dans l'ordonnance dont appel prononcée huit jours plus tôt démontre l'impossibilité d'envisager une autre alternative.L'ordonnance, en ce qu'elle a prononcé la nullité des deux résolutions adoptées lors de l'assemblée générale du 31 août 2018, ne peut donc qu'être confirmée par substitution de motifs » (arrêt p. 11-12),
1°) ALORS QUE l'annulation de délibérations de l'assemblée générale des associés d'une société n'étant ni une mesure conservatoire ni une mesure de remise en état, n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés ; qu'en prononçant l'annulation des décisions adoptées par l'assemblée générale de la société PMC Développement du 31 août 2018, quand cette annulation, à supposer même qu'il s'agissait de la seule mesure de nature à faire cesser le trouble, excédait les pouvoirs du juge des référés, la cour d'appel a violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile, ensemble l'article L. 235-1 du code de commerce ;
2°) ALORS QUE, subsidiairement, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet de la décision et a été tranché dans le dispositif ; qu'en l'espèce, l'ordonnance du 27 juillet 2018 se bornait, dans son dispositif, à ordonner le report de l'assemblée générale convoquée pour le 30 juillet 2018 et à la proroger après le terme de la mission de l'administrateur judiciaire ; qu'en retenant qu'en convoquant une nouvelle assemblée générale dans le même but que celui poursuivi par cette assemblée, à savoir décider d'un changement de direction, les appelantes avaient sciemment violé l'ordonnance du 27 juillet 2018, quand cette décision ne faisait pas interdiction aux associés de la société PMC Développement de convoquer une autre assemblée générale avec le même ordre du jour, la cour d'appel a violé les articles 480 et 488 du code de procédure civile, ensemble l'article 1355 du code civil ;
3°) ALORS QUE tout aussi subsidiairement, la cour d'appel a constaté elle-même que la décision de faire interdiction aux appelantes de prendre toute décision susceptible de modifier la gouvernance des sociétés PMC Développement et Menuiserie Z... et O... ne relevait pas du pouvoir du juge des référés, et a réformé l'ordonnance entreprise de ce chef ; qu'en retenant néanmoins que la convocation d'une nouvelle assemblée générale dans le but de décider un changement de gouvernance caractérisait un trouble manifestement illicite, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 873 alinéa 1er du code de procédure civile.

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11 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 janvier 2021, 18-21.860, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 janvier 2021, 18-21.860, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Cassation

MOTS CLES DE L'ARRET :

SOCIETE COMMERCIALE (règles générales) - Associés - Assemblée générale - Délibérations - Nullité - Conditions - Contrariété à l'intérêt social - Conditions suffisantes (non)

ANALYSE DE L'ARRET :

Il résulte de l'article L. 235-1 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, qu'une délibération de l'assemblée générale des associés d'une société octroyant une rémunération exceptionnelle à son dirigeant ne peut être annulée qu'en cas de violation des dispositions impératives du livre II dudit code ou des lois qui régissent les contrats, et non au seul motif de sa contrariété à l'intérêt social, sauf fraude ou abus de droit commis par un ou plusieurs associés pour favoriser ses ou leurs intérêts au détriment de ceux d'un ou plusieurs autres associés

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 13 janvier 2021



Cassation

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 43 F-P
Pourvoi n° G 18-21.860








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 JANVIER 2021
M. S... V..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° G 18-21.860 contre l'arrêt rendu le 14 juin 2018 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. I... H..., domicilié [...] ,
2°/ à la société Mécanique de précision de Méreau (MPM), société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ponsot, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. V..., de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. H... et de la société Mécanique de précision de Méreau, et l'avis de M. Douvreleur, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Ponsot, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 14 juin 2018), M. V..., gérant majoritaire, et sa compagne, Mme K..., ont consenti le 21 juillet 2014 une promesse de cession de l'intégralité des parts de la société Mécanique de précision de Méreau (la société) à M. H... pour le prix de 8 000 euros, montant nominal du capital social.
2. La promesse de cession comportait notamment une condition portant sur l'acquisition, par la société, du fonds artisanal de mécanique de précision de M. V..., que la société exploitait dans le cadre d'une location-gérance, pour le prix de 242 000 euros, montant ultérieurement ramené à 212 000 euros.
3. Le 29 octobre 2014, l'assemblée générale de la société a décidé d'octroyer à M. V..., au titre de ses fonctions de dirigeant, une prime de 83 000 euros, puis, le 24 novembre, une autre prime au titre d'un rappel de salaire, d'un montant de 3 049,94 euros.
4. Par acte sous seing privé du 4 décembre 2014, les parties ont réitéré la promesse de cession, en précisant dans l'acte qu'aux termes de l'assemblée générale du 29 octobre 2014, il avait été accordé à M. V... une prime exceptionnelle de 83 000 euros.
5. Devenu dirigeant de la société, M. H... a refusé de verser les sommes allouées à M. V... par les assemblées générales des 29 octobre et 24 novembre 2014, estimant que l'octroi de ces primes constituait un acte anormal de gestion, mettant en péril les intérêts de la société.
6. M. V... a assigné la société en paiement d'une somme totale de 84 623,05 euros. M. H... est intervenu volontairement à l'instance et a demandé l'annulation des résolutions du 29 octobre 2014 et du 24 novembre 2014 comme procédant d'un abus de majorité.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
7. M. V... fait grief à l'arrêt d'annuler les résolutions des 29 octobre et 24 novembre 2014 lui attribuant des primes exceptionnelles, et de rejeter l'ensemble de ses demandes, alors :
« 1°/ que les juges sont tenus de répondre aux moyens qui les saisissent ; qu'en l'espèce, M. V... faisait valoir que l'abus de majorité suppose de constater que la délibération adoptée en assemblée générale l'a été contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité, et que cette seconde condition manquait nécessairement lorsque la résolution avait été adoptée à l'unanimité des associés ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que l'abus de majorité suppose de constater que la délibération adoptée en assemblée générale l'a été contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité ; qu'en l'espèce, il était constant, ainsi que le faisait valoir M. V..., que les délibérations litigieuses avaient été adoptées à l'unanimité des associés, de sorte que l'associée minoritaire avait lui-même estimé que son intérêt n'était pas lésé par cette décision ; qu'en jugeant néanmoins que ces délibérations procédaient d'un abus de majorité, la cour d'appel a violé les articles 1832, 1833 et 1844-1 du code civil ;
3°/ que, subsidiairement, l'abus de majorité suppose de constater que la délibération adoptée en assemblée générale l'a été contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité ; qu'en se bornant à relever en l'espèce que les délibérations litigieuses étaient contraire à l'intérêt social, sans constater qu'elles avaient été adoptées dans l'unique dessein de favoriser M. V... au détriment, non pas seulement de la société, mais également des autres associés, la cour d'appel a de toute façon privé sa décision de base légale au regard des articles 1832, 1833 et 1844-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
8. Après avoir analysé les comptes de la société des exercices 2012 et 2013, l'arrêt retient que les délibérations litigieuses ont eu pour effet d'octroyer au dirigeant de la société, dans les quelques mois séparant l'engagement de cession des titres et sa réalisation, des primes exceptionnelles représentant treize fois le résultat annuel de la société, et en déduit, pour annuler ces décisions, que ces primes constituent des rémunérations abusives comme étant manifestement excessives et contraires à l'intérêt social. Il résulte de ces motifs que la cour d'appel n'a pas annulé les deux résolutions en se fondant sur l'existence d'un abus de majorité, et il ne peut donc lui être reproché de ne pas avoir caractérisé les conditions d'application d'un tel abus.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le moyen relevé d'office
10. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.
Vu les articles 1382, devenu 1240, du code civil et L. 235-1 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises :
11. Aux termes du premier de ces textes, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
12. Il résulte du second qu'une délibération de l'assemblée générale des associés d'une société octroyant une rémunération exceptionnelle à son dirigeant ne peut être annulée qu'en cas de violation des dispositions impératives du livre II dudit code ou de violation des lois qui régissent les contrats, et non au seul motif de sa contrariété à l'intérêt social, sauf fraude ou abus de droit commis par un ou plusieurs associés pour favoriser ses ou leurs intérêts au détriment de ceux d'un ou plusieurs autres associés.
13. Pour annuler les délibérations adoptées les 29 octobre et 24 novembre 2014, l'arrêt retient que les primes allouées à M. V... constituent des rémunérations abusives comme étant manifestement excessives et contraires à l'intérêt social.
14. En statuant ainsi, sur le seul fondement de la contrariété des délibérations litigieuses à l'intérêt social, sans caractériser une violation aux dispositions légales s'imposant aux sociétés commerciales ou des lois régissant les contrats, ni relever l'existence d'une fraude ou d'un abus de droit commis par un ou plusieurs associés, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne M. H... et la société Mécanique de précision de Méreau aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. H... et la société Mécanique de précision de Méreau et les condamne à payer à M. V... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille vingt et un.MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. V....

PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé les résolutions du 29 octobre 2014 et du 24 novembre 2014 attribuant des primes exceptionnelles à M. V..., et d'avoir débouté M. V... de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QU' il convient de rappeler que le 21 juillet 2014, Monsieur V... et Madame K... sont convenus de céder à Monsieur H... la totalité des 500 parts sociales composant le capital de la SAS Mécanique de Précision de Mereau moyennant le prix global de 8 000 € « étant précisé que la réalisation de cette cession est souhaitée avec effet au 1er septembre 2014 » ; qu'il était prévu que la réalisation de la cession des parts sociales était cependant subordonnée, notamment, à la signature d'un acte portant cession par Monsieur V... au profit de la SAS Mécanique de Précision de Mereau de son fonds artisanal de mécanique de précision moyennant le prix de 242 000 € - fonds qui était alors exploité par la société MPM dans le cadre d'un contrat de location-gérance -, ainsi qu'à la conclusion au profit de Monsieur V... d'un contrat de travail à durée indéterminée moyennant une rémunération nette mensuelle de 2 000 € ; qu'il est constant que dans le cadre d'une assemblée générale ordinaire du 29 octobre 2014, les associés de la SAS Mécanique de Précision de Mereau – en l'occurrence Monsieur V... et sa compagne Madame K... - ont adopté à l'unanimité une résolution numéro 2 consistant « à verser à Monsieur V..., président, une prime exceptionnelle d'un montant de 83 000 € brut dont 33 000 € brut payé avec son salaire du mois d'octobre 2014 et le solde, soit 50 000 € brut, payé en une ou plusieurs fois à compter du 2 janvier 2015 selon la trésorerie de la société » ; que par une nouvelle assemblée générale ordinaire en date du 24 novembre 2014, il a été décidé à l'unanimité des voix des associés de verser à Monsieur V... « une prime exceptionnelle d'un montant de 3 049 ,94 € brut payée avec son salaire du mois de novembre 2014 » ; que Monsieur V..., Monsieur H... et Madame K... ont signé le 4 décembre 2014 l'acte de cession des 500 actions composant le capital de la SAS Mécanique de Précision de Mereau moyennant un prix de 8 000 € ; que cet acte comprenait en pages 7 et 8, un paragraphe intitulé « situation financière et comptable » précisant, d'une part, la teneur des derniers comptes connus au 31 décembre 2012 et au 31 décembre 2013 et, d'autre part, « qu'au terme d'une assemblée générale des actionnaires en date du 29 octobre 2014, il a été attribué à Monsieur V..., président, une prime exceptionnelle de 83 000 €, dont 33 000 € ont été versés en octobre 2014 et le solde, soit 50 000 €, sera versé en 2015» ; que même si l'article 12 de cet acte indique que « les parties reconnaissent avoir eu connaissance du projet du présent acte préalablement à la signature », il n'est pas établi que la teneur des deux assemblées générales précitées - qui sont toutes deux p-postérieures au 1er septembre 2014,·date de réalisation souhaitée par les parties selon l'acte du 21 juillet précédent, et dont la seconde en date s'est tenue seulement 10 jours avant la signature de l'acte de cession, octroyant au président de la société des primes exceptionnelles d'un montant important et obérant dès lors la comptabilité de la société, aurait été portée à la connaissance de Monsieur H... dès la tenue desdites assemblées générales ; que si le formalisme juridique applicable aux délibérations des assemblées générales n'est pas critiqué par Monsieur H... et par la SAS Mécanique de Précision de Mereau, ces derniers soutiennent que les résolutions critiquées constituent des actes anormaux de gestion mettant en péril les intérêts de la société ; qu'il doit être remarqué à cet égard que : - selon les mentions figurant en page 7 de l'acte de cession, le résultat net après impôt de la SAS Mécanique de Précision de Mereau a été de 949 € pour l'année 2013 et 936 € pour l'année 2012 ; - selon le projet de bilan établi le 31 décembre 2014 par la société d'expertise comptable COGEP, le résultat de l'exercice 2014 se soldait par un déficit de 13 978,79 € (pièce numéro 2 du dossier de Monsieur H... et de la SAS Mécanique de Précision de Mereau) - le bilan définitif retenant finalement un bénéfice de 6 606,24 € ; que les décisions prises lors des assemblées générales querellées aboutissent ainsi à octroyer au président de la société, dans les quelques mois séparant l'engagement de cession de l'intégralité des titres et la cession effective de ces derniers, des primes exceptionnelles représentant 13 fois le résultat annuel de la société, lesquelles constituent dès lors des rémunérations abusives comme étant manifestement excessives et contraires à l'intérêt social ; que Monsieur H... et la SAS Mécanique de Précision de Mereau sollicitent dès lors à bon droit l'annulation des résolutions prises dans les assemblées générales du 29 octobre et du 24 novembre 2014 allouant de telles primes à Monsieur V... ; qu'il y aura lieu en conséquence d'infirmer la décision entreprise en ce que, faisant application desdites résolutions, elle a condamné la SAS Mécanique de Précision de Mereau à verser à Monsieur V... les sommes de 34 623,05 € et 50 000 € ; que la décision devra donc également être infirmée en ce qu'elle a condamné Monsieur V... à verser à la SAS Mécanique de Précision de Mereau la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi après avoir considéré que le paiement des primes exceptionnelles « ne pouvait qu'aggraver les charges de l'entreprise », étant par ailleurs remarqué qu'une telle demande n'avait pas été formulée par la SAS Mécanique de Précision de Mereau, mais seulement par Monsieur H... ;
1° ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux moyens qui les saisissent ; qu'en l'espèce, M. V... faisait valoir que l'abus de majorité suppose de constater que la délibération adoptée en assemblée générale l'a été contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité, et que cette seconde condition manquait nécessairement lorsque la résolution avait été adoptée à l'unanimité des associés ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE l'abus de majorité suppose de constater que la délibération adoptée en assemblée générale l'a été contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité ; qu'en l'espèce, il était constant, ainsi que le faisait valoir M. V..., que les délibérations litigieuses avaient été adoptées à l'unanimité des associés, de sorte que l'associée minoritaire avait lui-même estimé que son intérêt n'était pas lésé par cette décision ; qu'en jugeant néanmoins que ces délibérations procédaient d'un abus de majorité, la cour d'appel a violé les articles 1832, 1833 et 1844-1 du code civil ;
3° ALORS QUE, subsidiairement, l'abus de majorité suppose de constater que la délibération adoptée en assemblée générale l'a été contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité ; qu'en se bornant à relever en l'espèce que les délibérations litigieuses étaient contraire à l'intérêt social, sans constater qu'elles avaient été adoptées dans l'unique dessein de favoriser M. V... au détriment, non pas seulement de la société, mais également des autres associés, la cour d'appel a de toute façon privé sa décision de base légale au regard des articles 1832, 1833 et 1844-1 du code civil.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION, à titre subsidiaire
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé les résolutions du 29 octobre 2014 et du 24 novembre 2014 attribuant des primes exceptionnelles à M. V..., et d'avoir débouté M. V... de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QU' il convient de rappeler que le 21 juillet 2014, Monsieur V... et Madame K... sont convenus de céder à Monsieur H... la totalité des 500 parts sociales composant le capital de la SAS Mécanique de Précision de Mereau moyennant le prix global de 8 000 € « étant précisé que la réalisation de cette cession est souhaitée avec effet au 1er septembre 2014 » ; qu'il était prévu que la réalisation de la cession des parts sociales était cependant subordonnée, notamment, à la signature d'un acte portant cession par Monsieur V... au profit de la SAS Mécanique de Précision de Mereau de son fonds artisanal de mécanique de précision moyennant le prix de 242 000 € - fonds qui était alors exploité par la société MPM dans le cadre d'un contrat de location-gérance -, ainsi qu'à la conclusion au profit de Monsieur V... d'un contrat de travail à durée indéterminée moyennant une rémunération nette mensuelle de 2 000 € ; qu'il est constant que dans le cadre d'une assemblée générale ordinaire du 29 octobre 2014, les associés de la SAS Mécanique de Précision de Mereau – en l'occurrence Monsieur V... et sa compagne Madame K... - ont adopté à l'unanimité une résolution numéro 2 consistant « à verser à Monsieur V..., président, une prime exceptionnelle d'un montant de 83 000 € brut dont 33 000 € brut payé avec son salaire du mois d'octobre 2014 et le solde, soit 50 000 € brut, payé en une ou plusieurs fois à compter du 2 janvier 2015 selon la trésorerie de la société » ; que par une nouvelle assemblée générale ordinaire en date du 24 novembre 2014, il a été décidé à l'unanimité des voix des associés de verser à Monsieur V... « une prime exceptionnelle d'un montant de 3 049 ,94 € brut payée avec son salaire du mois de novembre 2014 » ; que Monsieur V..., Monsieur H... et Madame K... ont signé le 4 décembre 2014 l'acte de cession des 500 actions composant le capital de la SAS Mécanique de Précision de Mereau moyennant un prix de 8 000 € ; que cet acte comprenait en pages 7 et 8, un paragraphe intitulé « situation financière et comptable » précisant, d'une part, la teneur des derniers comptes connus au 31 décembre 2012 et au 31 décembre 2013 et, d'autre part, « qu'au terme d'une assemblée générale des actionnaires en date du 29 octobre 2014, il a été attribué à Monsieur V..., président, une prime exceptionnelle de 83 000 €, dont 33 000 € ont été versés en octobre 2014 et le solde, soit 50 000 €, sera versé en 2015» ; que même si l'article 12 de cet acte indique que « les parties reconnaissent avoir eu connaissance du projet du présent acte préalablement à la signature », il n'est pas établi que la teneur des deux assemblées générales précitées - qui sont toutes deux postérieures au 1er septembre 2014,·date de réalisation souhaitée par les parties selon l'acte du 21 juillet précédent, et dont la seconde en date s'est tenue seulement 10 jours avant la signature de l'acte de cession, octroyant au président de la société des primes exceptionnelles d'un montant important et obérant dès lors la comptabilité de la société, aurait été portée à la connaissance de Monsieur H... dès la tenue desdites assemblées générales ; que si le formalisme juridique applicable aux délibérations des assemblées générales n'est pas critiqué par Monsieur H... et par la SAS Mécanique de Précision de Mereau, ces derniers soutiennent que les résolutions critiquées constituent des actes anormaux de gestion mettant en péril les intérêts de la société ; qu'il doit être remarqué à cet égard que : - selon les mentions figurant en page 7 de l'acte de cession, le résultat net après impôt de la SAS Mécanique de Précision de Mereau a été de 949 € pour l'année 2013 et 936 € pour l'année 2012 ; - selon le projet de bilan établi le 31 décembre 2014 par la société d'expertise comptable COGEP, le résultat de l'exercice 2014 se soldait par un déficit de 13 978,79 € (pièce numéro 2 du dossier de Monsieur H... et de la SAS Mécanique de Précision de Mereau) - le bilan définitif retenant finalement un bénéfice de 6 606,24 € ; que les décisions prises lors des assemblées générales querellées aboutissent ainsi à octroyer au président de la société, dans les quelques mois séparant l'engagement de cession de l'intégralité des titres et la cession effective de ces derniers, des primes exceptionnelles représentant 13 fois le résultat annuel de la société, lesquelles constituent dès lors des rémunérations abusives comme étant manifestement excessives et contraires à l'intérêt social ; que Monsieur H... et la SAS Mécanique de Précision de Mereau sollicitent dès lors à bon droit l'annulation des résolutions prises dans les assemblées générales du 29 octobre et du 24 novembre 2014 allouant de telles primes à Monsieur V... ; qu'il y aura lieu en conséquence d'infirmer la décision entreprise en ce que, faisant application desdites résolutions, elle a condamné la SAS Mécanique de Précision de Mereau à verser à Monsieur V... les sommes de 34 623,05 € et 50 000 € ; que la décision devra donc également être infirmée en ce qu'elle a condamné Monsieur V... à verser à la SAS Mécanique de Précision de Mereau la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi après avoir considéré que le paiement des primes exceptionnelles « ne pouvait qu'aggraver les charges de l'entreprise », étant par ailleurs remarqué qu'une telle demande n'avait pas été formulée par la SAS Mécanique de Précision de Mereau, mais seulement par Monsieur H... ;
1° ALORS QUE le cessionnaire qui, lors de la signature de l'acte de cession, accepte la distribution d'une prime exceptionnelle au cédant par la société cédée s'interdit d'en contester ultérieurement la validité, sauf à se prévaloir d'un vice ayant entaché son consentement ; qu'en l'espèce, M. V... soulignait que l'acte de cession du 4 décembre 2014 rappelait l'existence de la délibération du 29 octobre 2014 ayant décidé l'attribution à son profit d'une prime exceptionnelle de 83.000 euros, et qu'en signant sans aucune réserve cet acte de cession, M. H..., qui avait par ailleurs déclaré être parfaitement informé de la situation financière, comptable et économique de la société, et bénéficiait au surplus d'une garantie de passif, avait nécessairement accepté le principe et le montant de cette prime exceptionnelle ; qu'en faisant droit à l'action de M. H... en annulation de cette délibération, sans constater l'existence d'un vice du consentement de sa part, au motif qu'il n'était pas établi que M. H... aurait eu connaissance des délibérations du 29 octobre 2014 et du 24 novembre 2014 « dès la tenue desdites assemblées », la cour d'appel a statué par un motif inopérant, privant sa décision de base légale au regard de l'article 1134 ancien, devenu 1103, du code civil ;
2° ALORS QUE le cessionnaire qui, lors de la signature de l'acte de cession, accepte la distribution d'une prime exceptionnelle au cédant par la société cédée s'interdit d'en contester ultérieurement la validité, sauf à se prévaloir d'un vice ayant entaché son consentement ; qu'en l'espèce, M. H... bénéficiait d'une garantie des cédants pour le cas où les résultats de l'exercice en cours révélerait un élément ou une situation de passif inconnu lors de la cession ; qu'en faisant droit à l'action de nullité du cessionnaire au motif que la prime exceptionnelle de 83.000 euros était excessive au regard du bénéfice généré par la société au cours de l'exercice 2014, sans constater que M. H..., qui n'avait pas mis en oeuvre la garantie de passif, aurait été victime d'un vice de son consentement, la cour d'appel a encore statué par un motif inopérant, privant sa décision de base légale au regard de l'article 1134 ancien, devenu 1103, du code civil ;
3° ALORS QUE, sauf mention contraire des parties contractantes, les stipulations de l'acte définitif de cession, postérieures en date, prévalent sur celles figurant à la promesse de cession précédemment conclue entre les mêmes parties ; qu'en l'espèce, M. V... soulignait que l'acte définitif de cession du 4 décembre 2014 rappelait l'existence de la délibération du 29 octobre 2014 ayant décidé l'attribution à M. V... d'une prime exceptionnelle de 83.000 euros, et qu'en signant sans aucune réserve cet acte de cession, M. H..., qui avait par ailleurs déclaré être parfaitement informé de la situation financière, comptable et économique de la société, et bénéficiait d'une garantie de passif, avait nécessairement accepté le principe de cette prime exceptionnelle ; qu'en se fondant, pour écarter ces stipulations, sur la circonstance que les parties, selon la promesse de cession du 21 juillet 2014, avaient initialement émis le « souhait » que la cession soit réalisée au plus tard le 1er septembre 2014, quand cette stipulation avait été nécessairement rendue caduque par la conclusion de la cession le 4 décembre 2014, les juges ont violé l'article 1134 ancien, devenu 1103, du code civil.
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé les résolutions du 29 octobre 2014 et du 24 novembre 2014 attribuant des primes exceptionnelles à M. V..., et d'avoir débouté M. V... de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QU' il convient de rappeler que le 21 juillet 2014, Monsieur V... et Madame K... sont convenus de céder à Monsieur H... la totalité des 500 parts sociales composant le capital de la SAS Mécanique de Précision de Mereau moyennant le prix global de 8 000 € « étant précisé que la réalisation de cette cession est souhaitée avec effet au 1er septembre 2014 » ; qu'il était prévu que la réalisation de la cession des parts sociales était cependant subordonnée, notamment, à la signature d'un acte portant cession par Monsieur V... au profit de la SAS Mécanique de Précision de Mereau de son fonds artisanal de mécanique de précision moyennant le prix de 242 000 € - fonds qui était alors exploité par la société MPM dans le cadre d'un contrat de location-gérance -, ainsi qu'à la conclusion au profit de Monsieur V... d'un contrat de travail à durée indéterminée moyennant une rémunération nette mensuelle de 2 000 € ; qu'il est constant que dans le cadre d'une assemblée générale ordinaire du 29 octobre 2014, les associés de la SAS Mécanique de Précision de Mereau – en l'occurrence Monsieur V... et sa compagne Madame K... - ont adopté à l'unanimité une résolution numéro 2 consistant « à verser à Monsieur V..., président, une prime exceptionnelle d'un montant de 83 000 € brut dont 33 000 € brut payé avec son salaire du mois d'octobre 2014 et le solde, soit 50 000 € brut, payé en une ou plusieurs fois à compter du 2 janvier 2015 selon la trésorerie de la société » ; que par une nouvelle assemblée générale ordinaire en date du 24 novembre 2014, il a été décidé à l'unanimité des voix des associés de verser à Monsieur V... « une prime exceptionnelle d'un montant de 3 049 ,94 € brut payée avec son salaire du mois de novembre 2014 » ; que Monsieur V..., Monsieur H... et Madame K... ont signé le 4 décembre 2014 l'acte de cession des 500 actions composant le capital de la SAS Mécanique de Précision de Mereau moyennant un prix de 8 000 € ; que cet acte comprenait en pages 7 et 8, un paragraphe intitulé « situation financière et comptable » précisant, d'une part, la teneur des derniers comptes connus au 31 décembre 2012 et au 31 décembre 2013 et, d'autre part, « qu'au terme d'une assemblée générale des actionnaires en date du 29 octobre 2014, il a été attribué à Monsieur V..., président, une prime exceptionnelle de 83 000 €, dont 33 000 € ont été versés en octobre 2014 et le solde, soit 50 000 €, sera versé en 2015» ; que même si l'article 12 de cet acte indique que « les parties reconnaissent avoir eu connaissance du projet du présent acte préalablement à la signature », il n'est pas établi que la teneur des deux assemblées générales précitées - qui sont toutes deux p-postérieures au 1er septembre 2014,·date de réalisation souhaitée par les parties selon l'acte du 21 juillet précédent, et dont la seconde en date s'est tenue seulement 10 jours avant la signature de l'acte de cession, octroyant au président de la société des primes exceptionnelles d'un montant important et obérant dès lors la comptabilité de la société, aurait été portée à la connaissance de Monsieur H... dès la tenue desdites assemblées générales ; que si le formalisme juridique applicable aux délibérations des assemblées générales n'est pas critiqué par Monsieur H... et par la SAS Mécanique de Précision de Mereau, ces derniers soutiennent que les résolutions critiquées constituent des actes anormaux de gestion mettant en péril les intérêts de la société ; qu'il doit être remarqué à cet égard que : - selon les mentions figurant en page 7 de l'acte de cession, le résultat net après impôt de la SAS Mécanique de Précision de Mereau a été de 949 € pour l'année 2013 et 936 € pour l'année 2012 ; - selon le projet de bilan établi le 31 décembre 2014 par la société d'expertise comptable COGEP, le résultat de l'exercice 2014 se soldait par un déficit de 13 978,79 € (pièce numéro 2 du dossier de Monsieur H... et de la SAS Mécanique de Précision de Mereau) - le bilan définitif retenant finalement un bénéfice de 6 606,24 € ; que les décisions prises lors des assemblées générales querellées aboutissent ainsi à octroyer au président de la société, dans les quelques mois séparant l'engagement de cession de l'intégralité des titres et la cession effective de ces derniers, des primes exceptionnelles représentant 13 fois le résultat annuel de la société, lesquelles constituent dès lors des rémunérations abusives comme étant manifestement excessives et contraires à l'intérêt social ; que Monsieur H... et la SAS Mécanique de Précision de Mereau sollicitent dès lors à bon droit l'annulation des résolutions prises dans les assemblées générales du 29 octobre et du 24 novembre 2014 allouant de telles primes à Monsieur V... ; qu'il y aura lieu en conséquence d'infirmer la décision entreprise en ce que, faisant application desdites résolutions, elle a condamné la SAS Mécanique de Précision de Mereau à verser à Monsieur V... les sommes de 34 623,05 € et 50 000 € ; que la décision devra donc également être infirmée en ce qu'elle a condamné Monsieur V... à verser à la SAS Mécanique de Précision de Mereau la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi après avoir considéré que le paiement des primes exceptionnelles « ne pouvait qu'aggraver les charges de l'entreprise », étant par ailleurs remarqué qu'une telle demande n'avait pas été formulée par la SAS Mécanique de Précision de Mereau, mais seulement par Monsieur H... ;
1° ALORS QUE les juges sont tenus de ne pas dénaturer les documents sur lesquels ils fondent leur analyse ; qu'en affirmant en l'espèce qu'il résultait des comptes définitifs de la société pour l'année 2014 que le montant de la prime de 83.000 euros votée au profit de M. V... représentait treize fois le résultat annuel de la société arrêté à 6.606,24 euros, quand ce résultat tenait déjà compte de l'élément de passif représenté par la prime litigieuse, de sorte que, avant imputation, la prime était en réalité, selon ce même document, inférieure au résultat bénéficiaire de l'exercice, la cour d'appel a dénaturé les comptes définitifs de la société MPM pour l'année 2014, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE, subsidiairement, le résultat d'une entreprise tient compte de l'ensemble produits et des charges d'exploitation, en ce compris les primes exceptionnelles payables aux dirigeants ou au personnel salarié ; qu'en l'espèce, M. V... faisait valoir, pour contester le calcul de M. H..., que celui-ci aurait dû réintégrer dans les comptes de l'exercice 2014 la prime litigieuse de 83.000 euros, ainsi que les charges sociales afférentes de 22.500 euros, en sorte que, avant imputation de ces charges, les capitaux propres de la société s'élevaient en réalité à 139.652 euros ; qu'en jugeant que la prime de 83.000 euros votée au profit de M. V... était manifestement excessive pour cette raison qu'elle représentait treize fois le résultat annuel de la société arrêté à 6.606,24 euros, sans tenir compte de ce que ce résultat intégrait déjà le montant de la prime, en sorte que, avant imputation de cette prime et des charges sociales afférentes, le montant de 83.000 euros était bien inférieur au résultat de l'entreprise, la cour d'appel a de toute façon privé sa décision de base légale au regard des articles 1832, 1833 et 1844-1 du code civil.

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12 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 6 janvier 2021, 18-15.228, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 6 janvier 2021, 18-15.228, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Transport international - Convention de Bruxelles du 25 août 1924 - Domaine d'application - Connaissement - Document similaire formant titre - Applications diverses - Accord de réservation pouvant être assimilé à un contrat de transport

ANALYSE DE L'ARRET :

Il résulte de l'article premier, b, de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, aussi bien dans sa version originelle que dans celle issue du protocole modificatif du 23 février 1968, qu'un document similaire formant titre pour le transport de marchandises par mer équivaut au connaissement, pour l'application de cette convention.
Ayant énoncé que l'absence de connaissement peut être suppléée par tout document similaire et relevé que, pour le déplacement, entre les ports de Gijón (Espagne) et Poole (Royaume-Uni), du camion endommagé pendant la traversée, les parties avaient établi un document intitulé «detalles de reserva» (détails de la réservation), la cour d'appel a fait ressortir que le chargeur et le transporteur maritime avaient conclu un accord de réservation pouvant être assimilé à un contrat de transport, justifiant ainsi légalement sa décision de déclarer prescrite par un an, conformément à l'article 3, § 6, alinéa 4, de la Convention précitée, la demande reconventionnelle en paiement du chargeur, malgré l'absence de connaissement

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 6 janvier 2021



Rejet

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 17 F-P
Pourvoi n° Z 18-15.228









R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 6 JANVIER 2021
La société LKW Walter Internationale Transportorganisation AG, dont le siège est [...] ), a formé le pourvoi n° Z 18-15.228 contre l'arrêt rendu le 14 décembre 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 5), dans le litige l'opposant à la société Louis Dreyfus Lines, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de la société LKW Walter Internationale Transportorganisation AG, de Me Le Prado, avocat de la société Louis Dreyfus Lines, après débats en l'audience publique du 10 novembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 décembre 2017), la société LKW Walter Internationale Transportorganisation (la société LKW Walter), prestataire de transport autrichien, a régulièrement confié ses remorques à la société Louis Dreyfus Lines (la société LD Lines) pour des traversées maritimes entre l'Espagne et le Royaume-Uni. Le 26 mai 2014, à la suite de plusieurs transports maritimes effectués en mai 2014, la société LD Lines a établi une facture d'un montant de 18 550 euros dont la société LKW Walter ne s'est acquittée que partiellement, opérant une retenue d'un montant 9 243,36 euros correspondant à une créance qu'elle invoquait au titre des dégradations causées à un camion au cours d'un transport réalisé par la société LD Lines les 8 et 9 avril 2014. Assignée en paiement le 18 mai 2015, la société LKW Walter a opposé à la société LD Lines la compensation légale entre ces créances et demandé, reconventionnellement, l'indemnisation de son préjudice.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
2. La société LKW Walter fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société LD Lines la somme de 9 243,36 euros en principal, avec intérêts de retard, alors :
« 1°/ que les dettes réciproques des parties, certaines, liquides et exigibles se compensent de plein droit, quelle que soit la nature de la créance ; qu'en rejetant la demande de compensation légale au motif que la créance est de nature indemnitaire, sans rechercher si elle était certaine, liquide et exigible, la cour d'appel a privé sa décision de base au regard des articles 1289, 1290 et 1291 dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ que les dettes réciproques des parties, certaines, liquides et exigibles se compensent de plein droit, quelle que soit la nature de la créance ; qu'en rejetant la demande de compensation légale au motif qu'il n'était pas justifié que la société LD Lines a reconnu sa dette indemnitaire tant en son principe qu'en son quantum, la reconnaissance de la créance n'étant pourtant pas une condition de la compensation légale dès lors que les créances réciproques sont certaines, liquides et exigibles, la cour d'appel a statué par une motivation inopérante et privé sa décision de base au regard des articles 1289, 1290 et 1291 dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
3. Ayant exactement énoncé que la compensation légale ne peut s'opérer qu'entre des créances certaines, liquides et exigibles et relevé que la créance, de nature indemnitaire, invoquée par la société LKW Walter n'était admise ni en son principe ni en son quantum par la société LD lines, ce dont il résultait qu'elle ne présentait pas les conditions requises pour le jeu de la compensation légale, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche invoquée par la première branche, a légalement justifié sa décision de rejeter l'exception de compensation légale.
4. Le moyen n'est donc pas fondé.
Et sur le second moyen
Enoncé du moyen
5. La société LKW Walter fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société LD Lines la somme de 9 243,36 euros en principal, avec intérêts de retard, et de la déclarer irrecevable en sa demande reconventionnelle indemnitaire, alors :
« 1°/ que l'article 10 de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement dispose que les dispositions de la présente convention s'appliqueront à tout connaissement relatif à un transport de marchandises entre ports relevant de deux États différents, quand a) le connaissement est émis dans un État Contractant, ou b) le transport a lieu au départ d'un port d'un État Contractant, ou c) le connaissement prévoit que les dispositions de la présente Convention ou de toute autre législation les appliquant ou leur donnant effet régiront le contrat, quelle que soit la nationalité du navire, du transporteur, du chargeur, du destinataire ou de toute autre personne intéressée ; qu'il ressort de cette disposition que la convention ne s'applique que si le transport fait l'objet d'un connaissement ; qu'en jugeant applicable la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, tout en constatant qu'il n'existait pas de connaissement, la cour d'appel a violé l'article 10 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 ;
2°/ qu'à supposer la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 applicable même en l'absence de connaissement, cela suppose qu'il existe un document similaire ; qu'en estimant la demande de compensation prescrite par application de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924, sans relever l'existence d'un document similaire à un connaissement justifiant l'application de ce texte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 10 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte de l'article premier, b) de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, aussi bien dans sa version originelle que dans celle issue du protocole modificatif du 23 février 1968, qu'un document similaire formant titre pour le transport de marchandises par mer équivaut au connaissement, pour l'application de cette convention. Ayant énoncé que l'absence de connaissement peut être suppléée par tout document similaire et relevé que, pour le déplacement, en avril 2014, entre les ports de Gijón (Espagne) et Poole (Royaume-Uni), du camion endommagé pendant la traversée, les parties avaient établi un document intitulé « detalles de reserva » (détails de la réservation), la cour d'appel a fait ressortir que le chargeur et le transporteur maritime avaient conclu un accord de réservation pouvant être assimilé à un contrat de transport, justifiant ainsi légalement sa décision de déclarer prescrite par un an, conformément à l'article 3, § 6, alinéa 4, de la convention précitée, la demande reconventionnelle en paiement de la société LKW Walter, malgré l'absence de connaissement.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société LKW Walter Internationale Transportorganisation aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société LKW Walter Internationale Transportorganisation et la condamne à payer à la société Louis Dreyfus Lines la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille vingt et un.MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Lkw Walter Internationale Transportorganisation AG.

PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné la société LKW Walter à payer à la société LD Lines la somme de 9.243,36 euros en principal, majoré des intérêts de retard de trois fois le taux légal à compter du 30 avril 2015 et d'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros et, statuant à nouveau, d'avoir déclaré la société LKW Walter irrecevable en sa demande reconventionnelle indemnitaire formée au titre de sa facture n° 217751 du 2 juillet 2014 ;
AUX MOTIFS sur la compensation légale :Vu les articles 1289 et suivants du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;LD Lines soutient à bon droit que les conditions de la compensation légale de créances, qui s'opère de plein droit, ne sont pas réunies, faute pour LKW Walter de justifier à son encontre d'une créance certaine, liquide et exigible, de façon simultanée à la sienne.En effet, la créance prétendue de LKW Walter qui correspond à sa facture n° 217751du 2 juillet 2014, est de nature indemnitaire et comme telle sujette à discussion, en ce qu'elle correspond à la réparation d'un dommage causé à son camion, lors de son déchargement le 9 avril 2014 par une société tierce, Terpor, sous-traitant de LD Lines. D'ailleurs, il n'est pas justifié que celle-ci a reconnu sa dette indemnitaire à ce titre tant en son principe, qu'en son quantum, les pièces produites, pour la plupart au surplus rédigées en langue anglaise ou espagnole non traduite en français, n'en attestant pas de façon claire, Terpor pouvant tout aussi bien être la débitrice concernée.
1°) ALORS QUE, les dettes réciproques des parties, certaines, liquides et exigibles se compensent de plein droit, quelle que soit la nature de la créance ; qu'en rejetant la demande de compensation légale au motif que la créance est de nature indemnitaire, sans rechercher si elle était certaine, liquide et exigible, la cour d'appel a privé sa décision de base au regard des articles 1289, 1290 et 1291 dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QUE, les dettes réciproques des parties, certaines, liquides et exigibles se compensent de plein droit, quelle que soit la nature de la créance ; qu'en rejetant la demande de compensation légale au motif qu'il n'était pas justifié que la société LD Lines a reconnu sa dette indemnitaire tant en son principe qu'en son quantum, la reconnaissance de la créance n'étant pourtant pas une condition de la compensation légale dès lors que les créances réciproques sont certaines, liquides et exigibles, la cour d'appel a statué par une motivation inopérante et privé sa décision de base au regard des articles 1289, 1290 et 1291 dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné la société LKW Walter à payer à la société LD Lines la somme de 9.243,36 euros en principal, majoré des intérêts de retard de trois fois le taux légal à compter du 30 avril 2015 et d'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros et, statuant à nouveau, d'avoir déclaré la société LKW Walter irrecevable en sa demande reconventionnelle indemnitaire formée au titre de sa facture n° 217751 du 2 juillet 2014 ;
AUX MOTIFS : Sur la compensation judiciaire :Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a accueilli la demande en paiement de LD Lines en principal et intérêts au titre du solde de sa facture n°190/1405/0035 du 26 mai 2014 qui n'est absolument pas contestée par LKW Walter.Concernant la demande reconventionnelle en paiement de LKW Walter à raison de l'avarie causée à son camion lors du transport, il est soutenu à bon droit par LD Lines que cette demande se trouve régie, non par la convention d'Athènes du 13 décembre 1974, mais par la convention de Bruxelles amendée du 25 août 1924.En effet, il n'est pas établi par LKW Walter, ainsi qu'elle en a la charge, que les parties auraient expressément choisi de se soumettre à la convention d'Athènes, le courriel du 8 avril 2014 faisant état des "detalles de reserva" (détails de la réservation) étant insuffisant pour en attester. En effet, ce mail, outre qu'il est produit en espagnol mâtiné d'anglais non entièrement traduit, ne fait référence à la convention d'Athènes que "si elle est applicable" d'après la traduction fournie de "when applicable". Or, il n'est pas prouvé que cette convention, relative au transport par mer des passagers et de leurs bagages, serait applicable, puisque dans le cas présent, il s'agissait d'un transport de camion non accompagné, c'est-à-dire sans chauffeur/passager ("pasajeros 0 adulto").De même, alors que ce point est contesté, la preuve n'est pas rapportée par LKW Walter - faute par exemple de constat d'huissier en attestant - que le lien hypertexte [...] figurant en bas de ce courriel, renverrait à sa pièce n°1/2 (en anglais non complètement traduit) qui concerne manifestement les conditions générales de transport par "ferry" de personnes, tel n'étant pas le cas, sachant que pour sa part LD Lines se prévaut d'autres conditions générales de vente qui seraient accessibles lors d'une réservation d'un transport par internet et renvoient pour leur part à la convention de Bruxelles de 1924 amendée.La demande se trouve dès lors soumise à la convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée, peu important qu'aucun connaissement n'ait été établi, celle-ci pouvant s'appliquer même en l'absence d'un tel document qui peut être suppléé par "tout document similaire". Par ailleurs, il n'est pas prouvé que le transport litigieux était un transport "ro/ro" (roll on/roll off) excluant comme tel l'application de cette convention, celle-ci ayant vocation à s'appliquer à tout connaissement relatif à un transport de marchandises entre ports relevant de deux états différents.Or, selon l'article 3.6 de cette convention, les actions contre le transporteur à raison des pertes ou dommages subis par les marchandises se prescrivent en une année à compter de leur délivrance.En conséquence, par application de ce texte, la demande est prescrite, ainsi que le soutient à bon droit LD Lines, pour avoir été formée pour la première fois par conclusions du 2 décembre 2015, alors que le camion a été réceptionné le 9 avril 2014, date faisant courir le délai pour agir, et comme telle irrecevable. Le jugement sera donc réformé seulement en ce qu'il a débouté LKW Walter de sa demande, au lieu de la déclarer irrecevable.
1°) ALORS QUE l'article 10 de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement dispose que les dispositions de la présente convention s'appliqueront à tout connaissement relatif à un transport de marchandises entre ports relevant de deux États différents, quand a) le connaissement est émis dans un État Contractant, ou b) le transport a lieu au départ d'un port d'un État Contractant, ou c) le connaissement prévoit que les dispositions de la présente Convention ou de toute autre législation les appliquant ou leur donnant effet régiront le contrat, quelle que soit la nationalité du navire, du transporteur, du chargeur, du destinataire ou de toute autre personne intéressée ; qu'il ressort de cette disposition que la convention ne s'applique que si le transport fait l'objet d'un connaissement ; qu'en jugeant applicable la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, tout en constatant qu'il n'existait pas de connaissement, la cour d'appel a violé l'article 10 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 ;
2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'à supposer la convention de Bruxelles du 25 août 1924 applicable même en l'absence de connaissement, cela suppose qu'il existe un document similaire ; qu'en estimant la demande de compensation prescrite par application de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924, sans relever l'existence d'un document similaire à un connaissement justifiant l'application de ce texte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 10 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924.

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13 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 6 janvier 2021, 18-24.954, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 6 janvier 2021, 18-24.954, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Cassation partielle

MOTS CLES DE L'ARRET :

BANQUE - Responsabilité - Faute - Violation de l'obligation d'éclairer - Applications diverses - Manquement d'un banquier souscripteur d'un contrat d'assurance de groupe, à l'égard de son client emprunteur, adhérent à ce contrat - Prescription quinquennale - Délai - Point de départ - Détermination

ANALYSE DE L'ARRET :

Il résulte des articles 2224 du code civil et L. 110-4 du code de commerce que les actions personnelles ou mobilières entre commerçants et non commerçants se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Lorsqu'un emprunteur, ayant adhéré au contrat d'assurance de groupe souscrit par la banque prêteuse à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, reproche à cette banque d'avoir manqué à son obligation de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur et d'être responsable de l'absence de prise en charge, par l'assureur, du remboursement du prêt au motif que le risque invoqué n'était pas couvert, le dommage qu'il invoque consiste en la perte de la chance de bénéficier d'une telle prise en charge.
Ce dommage se réalisant au moment du refus de garantie opposé par l'assureur, cette date constitue le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité exercée par l'emprunteur

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 6 janvier 2021



Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 66 FS-P
Pourvoi n° W 18-24.954



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 6 JANVIER 2021
M. J... L..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° W 18-24.954 contre l'arrêt rendu le 26 septembre 2018 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 2), dans le litige l'opposant à la société Crédit logement, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. L..., de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Crédit logement, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mmes Vallansan, Graff-Daudret, Vaissette, Bélaval, Fontaine, Fèvre, M. Riffaud, conseillers, M. Guerlot, Mmes Barbot, Kass-Danno, M. Boutié, conseillers référendaires, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 26 septembre 2018) et les productions, le 13 mars 2009, la société BNP Paribas (la banque) a consenti à M. L... un prêt immobilier garanti par le cautionnement de la société Crédit logement (la caution). M. L... a adhéré au contrat d'assurance de groupe souscrit par la banque. Ayant été placé en arrêt maladie en 2012, M. L... a demandé la prise en charge, par l'assurance, du remboursement des mensualités du prêt, laquelle lui a été refusée au motif qu'il avait atteint l'âge au-delà duquel le risque de maladie n'était plus garanti.
2. Des échéances étant demeurées impayées, la banque a prononcé la déchéance du terme du prêt et la caution lui a payé les sommes restant dues. La caution a ensuite assigné en paiement M. L..., qui, reconventionnellement, lui a opposé un manquement de la banque à son devoir de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. M. L... fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite son action en responsabilité, alors « que l'assuré prend connaissance du dommage né d'un manquement à un devoir de conseil sur l'adéquation de la garantie souscrite à ses besoins au moment du refus de garantie, qui constitue donc le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité contre le débiteur de l'obligation de conseil ; qu'en retenant au contraire que le délai de prescription de l'action en responsabilité contre la banque souscripteur de l'assurance groupe pour manquement à son obligation de conseil sur l'adéquation des risques couverts à la situation personnelle de M. L... aurait commencé à courir à compter de la délivrance de la notice d'information, la cour d'appel a violé l'article L. 110-4 du code de commerce et l'article 2224 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 2224 du code civil et L. 110-4 du code de commerce :
4. Il résulte de ces textes que les actions personnelles ou mobilières entre commerçants et non commerçants se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
5. Lorsqu'un emprunteur, ayant adhéré au contrat d'assurance de groupe souscrit par la banque prêteuse à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, reproche à cette banque d'avoir manqué à son obligation de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur et d'être responsable de l'absence de prise en charge, par l'assureur, du remboursement du prêt au motif que le risque invoqué n'était pas couvert, le dommage qu'il invoque consiste en la perte de la chance de bénéficier d'une telle prise en charge.
6. Ce dommage se réalisant au moment du refus de garantie opposé par l'assureur, cette date constitue le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité exercée par l'emprunteur.
7. Pour déclarer prescrite l'action en responsabilité de M. L..., l'arrêt retient que le dommage résultant du manquement de la banque à son obligation de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle, consistant en une perte de chance de ne pas contracter, s'est manifesté dès l'obtention du crédit par l'emprunteur, qui avait été informé des conditions générales de l'assurance par la remise de la notice d'information, et non à l'occasion du refus de prise en charge des mensualités du prêt par l'assureur.
8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, réformant le jugement, il déclare prescrite l'action en responsabilité engagée par M. L... et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 26 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne la société Crédit logement aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Crédit logement et la condamne à payer à M. L... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour M. L....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit prescrite l'action en responsabilité engagée par M. L... ;
AUX MOTIFS QU'en appel, la SA Crédit Logement, caution, devenue subrogée dans les droits et actions de la banque BNP Paribas oppose à M. L..., la prescription de son action, en considérant que le délai a commencé à courir à compter de l'octroi du crédit, date à laquelle il a disposé de toutes les informations nécessaires sur le contrat de prêt ainsi que les conditions de mise en oeuvre du contrat d'assurance ; que la cour relève que M. L... qui ne conteste pas le montant de la somme réclamée par la SA Crédit Logement, fonde son action en responsabilité sur un manquement de la banse à son devoir d'information et à son obligation particulière de conseil en omettant de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle, générant, à le supposer avéré, une perte de chance de ne pas contacter un crédit dans les conditions qu'il a obtenus ; que, dès lors, si la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance, en revanche, comme en l'espèce, le dommage résultant du manquement à l'obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter, s'est manifesté dès l'obtention du crédit par M. L... le 25 mars 2009 qui avait été informé des conditions générales des clauses d'assurances par la remise de la notice d'information le 14 mars 2009, et non pas, comme il le soutient à l'occasion du refus de prise en charge des mensualités par l'assureur ; qu'il s'ensuit que la prescription était acquise le 25 mars 2014, c'est-à-dire antérieurement à la date de délivrance de l'assignation du 14 août 2014 ; qu'il convient donc de réformer le jugement ayant retenu un préjudice subi par M. L... en raison du manquement de la banque à son obligation de conseil et en conséquence de la prescription de l'action en responsabilité de M. L..., l'examen de la demande portant sur l'application et les effets de la subrogation devient sans objet ;
ALORS QUE l'assuré prend connaissance du dommage né d'un manquement à un devoir de conseil sur l'adéquation de la garantie souscrite à ses besoins au moment du refus de garantie, qui constitue donc le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité contre le débiteur de l'obligation de conseil ; qu'en retenant au contraire que le délai de prescription de l'action en responsabilité contre la banque souscripteur de l'assurance groupe pour manquement à son obligation de conseil sur l'adéquation des risques couverts à la situation personnelle de M. L... aurait commencé à courir à compter de la délivrance de la notice d'information, la cour d'appel a violé l'article L. 110-4 du code de commerce et l'article 2224 du code civil.

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14 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 16 décembre 2020, 18-16.801, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 16 décembre 2020, 18-16.801, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

IMPOTS ET TAXES - Redressement et vérifications (règles communes) - Procédures de contrôle - Transmission de pièces par l'autorité judiciaire à l'administration des finances - Pièces issues de la commission d'un délit - Condition

ANALYSE DE L'ARRET :

Selon l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors applicable, l'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle peut recueillir, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une manoeuvre quelconque ayant eu pour objet ou ayant eu pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt, qu'il s'agisse d'une instance civile ou commerciale ou d'une information criminelle ou correctionnelle, même terminée par un non-lieu.
En matière de procédures de contrôle de l'impôt, à l'exception de celles relatives aux visites en tous lieux, même privés, les pièces issues de la commission d'un délit ne peuvent être écartées au seul motif de leur origine dès lors qu'elles ont été régulièrement portées à la connaissance de l'administration fiscale par application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et que les conditions dans lesquelles elles lui ont été communiquées n'ont pas été ultérieurement déclarées illégales par un juge

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CH.B


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 16 décembre 2020



Rejet

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 835 FS-P+B+R
Pourvoi n° J 18-16.801



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 16 DÉCEMBRE 2020
Mme S... O..., domiciliée [...] ), a formé le pourvoi n° J 18-16.801 contre l'arrêt rendu le 26 mars 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant :
1°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [...] ,
2°/ à la directrice chargée de la direction nationale des vérifications de situations fiscales (DNVSF), domiciliée [...] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de Mme O..., de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques et de la directrice chargée de la direction nationale des vérifications de situations fiscales, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, Mmes Darbois, Poillot-Peruzzetto, Champalaune, Michel-Amsellem, M. Ponsot, Mme Boisselet, M. Mollard, conseillers, Mmes Le Bras, de Cabarrus, Lefeuvre, Tostain, Bessaud, Bellino, conseillers référendaires, M. Debacq, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 mars 2018), Mme O... a été définitivement condamnée le 11 juin 2014, par un tribunal correctionnel, pour des faits de fraude fiscale découverts à la suite de la transmission à l'administration fiscale par un procureur de la République, sur le fondement de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, d'informations laissant supposer qu'elle était titulaire de comptes bancaires ouverts, au nom de sociétés de droit panaméen, dans les livres d'une banque établie en Suisse.
2. Parallèlement, le 16 octobre 2013, l'administration fiscale a notifié deux propositions de rectification à Mme O..., portant sur des rappels de droits d'enregistrement selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article 755 du code général des impôts au titre de ses avoirs figurant sur deux comptes étrangers, sur l'impôt de solidarité sur la fortune et sur la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.
3. Le 24 avril 2014, l'administration fiscale a émis un avis de mise en recouvrement et, après rejet de sa contestation, Mme O... l'a assignée afin d'obtenir l'annulation de la décision de rejet et la décharge des sommes mises en recouvrement.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. Mme O... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors :
« 1°/ que la transmission par le procureur de la République, au titre de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, de documents volés ou détournés ou présumés volés ou détournés, ne peut rendre licite leur détention et leur production par les agents de l'administration pour fonder des propositions de rectification ; qu'il n'est pas contesté que les données informatiques versées au soutien de la plainte de l'administration fiscale contre Mme O... le 10 décembre 2010, dont des extraits ont été transmis à l'appui des propositions de rectification, avaient été dérobées par M. N..., ancien informaticien salarié de la filiale suisse de la banque HSBC ; qu'en retenant que les pièces sur la base desquelles les propositions de rectification ont été fondées, avaient une origine apparemment licite dès lors qu'elles avaient été versées dans le cadre régulier d'une communication régulière à l'administration fiscale les 9 juillet 2009, 2 septembre 2009 et 12 janvier 2010, conformément aux dispositions des articles L. 101 et L. 135 du livre des procédures fiscales, bien que la transmission desdites pièces n'ait pas suffi à leur conférer une origine apparemment licite, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que pour établir des propositions de rectification, l'administration fiscale ne peut fonder les rectifications sur des documents illicites ; qu'au cas présent, pour fonder les rectifications opérées, l'administration fiscale a fait état des éléments qu'elle aurait obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, notamment des extraits issus de fichiers informatiques de la banque HSBC à Genève et qui concerneraient des comptes ouverts dans cet établissement ; que la transmission par le procureur de la République, au titre de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, de documents volés ou détournés ou présumés volés ou détournés, ne peut rendre licite leur détention et leur production par les agents de l'administration pour fonder des propositions de rectification ; que la détention de ces données informatiques par l'administration fiscale ne pouvant donc être considérée comme licite, ces données ne pouvaient valablement être opposées à Mme O... comme fondement à des rectifications ; qu'il suffit qu'une seule pièce illicite ait été retenue parmi d'autres pour entraîner la nullité de la procédure d'imposition ; qu'en retenant, pour considérer que les propositions de rectification établissaient que Mme O... détenait des avoirs à l'étranger, que lesdites propositions étaient fondées non seulement sur les documents illicites qui lui ont été transmis par l'autorité judiciaire mais sur des éléments tirés de l'enquête pénale pour fraude fiscale diligentée à l'encontre de Mme O..., la cour d'appel a violé l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
5. En dépit des effets patrimoniaux qu'il a nécessairement quant à la situation des contribuables, le contentieux de l'impôt échappe au champ des obligations de caractère civil de l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. Selon l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors applicable, l'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle peut recueillir, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une manoeuvre quelconque ayant eu pour objet ou ayant eu pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt, qu'il s'agisse d'une instance civile ou commerciale ou d'une information criminelle ou correctionnelle, même terminée par un non-lieu.
7. En matière de procédures de contrôle de l'impôt, à l'exception de celles relatives aux visites en tous lieux, même privés, les pièces issues de la commission d'un délit ne peuvent être écartées au seul motif de leur origine dès lors qu'elles ont été régulièrement portées à la connaissance de l'administration fiscale par application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et que les conditions dans lesquelles elles lui ont été communiquées n'ont pas été ultérieurement déclarées illégales par un juge.
8. Après avoir relevé qu'il n'était pas contesté que les données informatiques versées au soutien de la plainte de l'administration fiscale contre Mme O... avaient été dérobées à la banque par un de ses salariés et avaient été obtenues au cours d'une perquisition légalement effectuée au domicile de ce salarié sur une commission rogatoire internationale délivrée par les autorités judiciaires helvétiques puis régulièrement communiquées à l'administration fiscale par le procureur de la République en application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi que l'administration fiscale ait confectionné les pièces litigieuses ni participé directement ou indirectement à leur production, le rapprochement et le décryptage des données informatiques ne pouvant s'analyser comme une confection d'éléments de preuve par une autorité publique.
9. L'arrêt relève encore, par motifs propres et adoptés, que le tribunal correctionnel a, par un jugement définitif, rejeté l'exception de nullité de la plainte tirée de l'obtention illicite des documents qui la fondaient.
10. De ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit, à bon droit, que ces données constituaient des preuves admissibles, de sorte que les propositions de rectifications notifiées à Mme O... par l'administration fiscale étaient régulières.
11. En conséquence, le moyen, inopérant en sa seconde branche qui critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
12. Mme O... fait le même grief à l'arrêt, alors « que la procédure de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales concernant les demandes de justification de l'origine des avoirs placés sur un compte bancaire à l'étranger non déclaré, qui est applicable aux demandes de l'administration fiscale à compter du 1er janvier 2013, ne peut rouvrir une prescription acquise à cette date, dès lors que l'article 755 du code général des impôts qui prévoit les conséquences de la mise en oeuvre des demandes de justifications, ne s'appliquent qu'aux délais de reprise venant à expiration à compter du 1er janvier 2013 ; que, par ailleurs, les dispositions de l'article L. 181-0 A du livre des procédures fiscales, qui prévoient un délai de reprise de dix ans en matière de droits de succession ou d'impôt de solidarité sur la fortune, en cas de non-déclaration d'un compte bancaire ou d'un contrat d'assurance-vie ouvert ou souscrit auprès d'un établissement ou organisme sis à l'étranger, s'appliquent aux délais de reprise venant à expiration à compter du 1er janvier 2013 ; qu'en l'espèce, la mère de Mme O..., T... M..., étant décédée le [...] et la déclaration de succession définitive ayant été déposée le 27 septembre 2006, la prescription en matière de droits d'enregistrement était acquise au 31 décembre 2012 conformément aux dispositions de l'article L. 186 du livre des procédures fiscales ; que la proposition de rectification, seul acte interruptif de prescription, a été adressée à Mme O... le 16 octobre 2013 ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, entrées en vigueur le 1er janvier 2013, ne pouvaient donc être appliquées au cas présent, dès lors que la prescription était acquise à cette date ; qu'en jugeant le contraire, en retenant que Mme O... ne pouvait invoquer la prescription du droit de reprise de l'administration s'agissant des avoirs dont elle a hérité de sa mère, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 23 C, L. 186 et L. 181-0 A du livre des procédures fiscales ainsi que l'article 755 du code général des impôts. »
Réponse de la Cour
13. Selon les dispositions combinées des articles 1649 A du code général des impôts et L. 23 C du livre des procédures fiscales, les personnes physiques domiciliées en France sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts utilisés ou clos à l'étranger. Lorsque cette obligation n'a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes, l'administration peut demander à la personne physique soumise à cette obligation de fournir, dans un délai de soixante jours, les informations ou justifications sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte et, lorsque la personne a répondu de façon insuffisante aux demandes de l'administration, elle lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours. Il en résulte le fait générateur de l'imposition correspond à la date d'expiration des délais prévus à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales et constitue le point de départ de la prescription décennale fixée par l'article L. 181-0 A du livre des procédures fiscales.
14. Après avoir énoncé que la procédure de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, dont les conséquences de la mise en oeuvre sont codifiées aux articles 755 du code général des impôts et L. 71 du livre des procédures fiscales, est applicable aux demandes de l'administration fiscale à compter du 1er janvier 2013 et relevé que celle-ci avait adressé à Mme O... une première demande d'information le 17 mai 2013, à laquelle elle avait répondu le 15 juillet 2013, puis, jugeant la réponse insuffisante, l'avait mise en demeure, le 29 août 2013, de compléter sa réponse, de sorte que les dispositions de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales étaient applicables, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que Mme O... ne peut invoquer la prescription du droit de reprise de l'administration, s'agissant des avoirs qu'elle prétend avoir hérités de sa mère, à défaut d'avoir rapporté la preuve de cette succession, et qu'en application des dispositions précitées, le fait générateur de l'imposition doit être fixé au 30 septembre 2013, trente jours après l'envoi de la mise en demeure, ajoutant que la prorogation du délai de reprise prévue à l'article L. 188 B du livre des procédures fiscales en cas de plainte de l'administration pour fraude fiscale est également applicable en matière d'impôt de solidarité sur la fortune. De ces constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit à bon droit que la prescription de l'action de l'administration fiscale n'était pas acquise au moment de l'envoi des propositions de rectification, le 16 octobre 2013.
15. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
16. Mme O... fait encore le même grief à l'arrêt, alors :
« 1°/ qu'en application de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, lorsque l'obligation prévue au deuxième alinéa de l'article 1649 A ou à l'article 1649 AA du code général des impôts n'a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes, l'administration peut demander à la personne physique soumise à cette obligation de fournir dans un délai de soixante jours toutes informations ou justifications sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte ou le contrat d'assurance-vie ; qu'il résulte de la demande adressée le 17 mai 2003 à Mme O..., qu'elle excédait largement les dispositions précitées puisqu'aux termes de cette dernière "les explications et justifications que vous produirez concernant l'origine et l'acquisition des avoirs acquis à l'étranger devront comporter, notamment, toutes les précisions suivantes : l'identité et l'adresse de la partie versante pour chaque versement sur les comptes, le motif des versements, le montant et la date des versements, la nature des sommes versées, les pièces bancaires ou tous documents permettant au service de vérifier le bien-fondé de vos affirmations" ; qu'au regard du texte précité, l'administration fiscale ne pouvait demander des justifications que sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte, en dehors de tout autre élément ; qu'en retenant, au contraire, que tous les éléments demandés entraient bien dans le cadre de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, la cour d'appel a violé le texte précité ;
2°/ qu'en application de l'article 755 du code général des impôts, les avoirs figurant sur un compte ou un contrat d'assurance-vie étranger et dont l'origine et les modalités d'acquisition n'ont pas été justifiées dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 23 du livre des procédures fiscales sont réputés constituer, jusqu'à preuve contraire, un patrimoine acquis à titre gratuit assujetti, à la date d'expiration des délais prévus au même article L. 23 C, aux droits de mutation à titre gratuit au taux le plus élevé ; que ces dispositions ne trouvent à s'appliquer que dans l'hypothèse d'une origine inconnue des avoirs, laquelle reste inconnue du fait du défaut de réponse à la suite d'une demande visée à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales ; que tel n'est pas le cas lorsque l'administration fiscale a entendu elle-même amener cette preuve de l'origine des avoirs dès la mise en oeuvre ; qu'au cas présent, l'administration fiscale a eu connaissance, par l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, de l'origine et des modalités d'acquisition des avoirs à l'étranger que Mme O... détenait via les sociétés Newproad Investments SA et Ferncroft Holding SA ; que tout au long de la procédure, l'administration fiscale a entendu elle-même apporter la preuve de l'origine des avoirs et des modalités d'acquisition par les héritiers ; que, par conséquent, l'administration fiscale ne pouvait se fonder sur un défaut de réponse suffisante à ses courriers modèles n° 3907 et 3907 bis des 17 mai et 29 mai 2013 pour procéder à un rappel de droits de mutation à titre gratuit calculé sur la base des avoirs à l'étranger dont l'intéressée avait la disposition suite au décès de sa tante, U... Q..., et de sa mère, T... M... ; qu'en retenant que c'est à juste titre que l'administration avait à bon droit mis en oeuvre la procédure de taxation d'office en calculant les droits de mutation à titre gratuit sur les avoirs figurant sur les comptes étrangers au taux le plus élevé, la cour d'appel a violé l'article 755 du code général des impôts. »
17. Selon l'article 755 du code général des impôts, les avoirs figurant sur un compte ou un contrat d'assurance-vie étranger et dont l'origine et les modalités d'acquisition n'ont pas été justifiées dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales sont réputés constituer, jusqu'à preuve contraire, un patrimoine acquis à titre gratuit, assujetti aux droits de mutation à titre gratuit au taux le plus élevé.
18. Après avoir constaté que les demandes de l'administration fiscale ne visaient qu'à lui permettre de connaître l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs litigieux au regard des conditions d'application de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que les informations qu'elle détenait ne lui permettaient pas de déterminer par quels moyens Mme O... avait obtenu le contrôle exclusif des comptes bancaires détenus par sa tante et sa mère par l'intermédiaire de sociétés de droit panaméen ni s'ils avaient été transmis par voie de succession et partagés entre les héritiers, Mme O... n'ayant ni expliqué et justifié de l'origine et des modalités d'acquisition des avoirs en cause, cependant qu'elle y avait été invitée à deux reprises, ni transmis les relevés de comptes litigieux et alors même que la déclaration de succession de sa tante ne mentionnait pas ces avoirs.
19. L'arrêt relève encore, s'agissant des avoirs que Mme O... a soutenu avoir hérités de sa mère, que le fait que les comptes aient pu être auparavant rattachés à sa tante et sa mère ne suffit pas à établir la transmission de ces avoirs par succession. Il relève enfin qu'après avoir nié devant l'administration avoir connaissance de l'existence de ces comptes, ce n'est que devant le juge pénal que Mme O... a déclaré en avoir eu connaissance en 2005 ou 2006 et reconnu « sa pleine conscience d'être devenue copropriétaire par le jeu de la dévolution successorale, des fonds litigieux. »
20. De ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire que l'administration fiscale avait régulièrement mis en oeuvre la procédure de taxation d'office prévue par l'article 755 du code général des impôts.
21. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme O... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme O... et la condamne à payer au directeur général des finances publiques et à la directrice chargée de la direction nationale des vérifications de situations fiscales la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour Mme O....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté l'ensemble des demandes de Mme O... et confirmé la décision de rejet du 31 octobre 2014,
Aux motifs que « l'administration fiscale qui a déposé plainte le 10 décembre 2010 contre Mme O... des chefs de fraude fiscale a été autorisée par le procureur de la République de Paris les 1er et 20 octobre 2010 à consulter et prendre des copies du contenu de l'enquête préliminaire ; que suite à ces consultations, l'administration fiscale a demandé à Mme O... par lettre du 17 mai 2013, de fournir toutes informations sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur les comptes pour lesquels elle n'avait pas respecté les obligations déclaratives prévues par les articles 1649 A et 1649 AA du code général des impôts ; que par courrier du 29 août 2013 l'administration fiscale a estimé que la réponse apportée par Mme O... le 15 juillet 2013 était insuffisante ; qu'il n'est pas contesté que les données informatiques versées au soutien de la plainte de l'administration fiscale contre Mme O... le 10 décembre 2010 dont des extraits ont été transmis à l'appui des propositions de rectification avaient été dérobées par M. N..., ancien informaticien salarié de la filiale suisse de la banque HSBC ; que ces pièces ont été obtenues par la perquisition légalement effectuée au domicile de M. N... à Nice le 20 janvier 2009 dans le cadre de l'exécution d'une commission rogatoire internationale délivrée à l'initiative des autorités judiciaires helvétiques, et ont fait l'objet d'une communication régulière à l'administration fiscale les 9 juillet 2009, 2 septembre 2009 et 12 janvier 2010, conformément aux dispositions des articles L. 101 et L. 135 du livre des procédures fiscales ; qu'il n'est d'ailleurs pas établi que l'administration fiscale aurait confectionné les pièces litigieuses ni participé directement ou indirectement à leur production, le rapprochement et le décryptage des données informatiques ne pouvant s'analyser comme une confection d'éléments de preuve par une autorité publique ; que ces données ne peuvent donc pas constituer des preuves illicites ; qu'est d'ailleurs souligné que le tribunal correctionnel a rejeté le moyen tiré de la nullité de la plainte tirée de l'obtention illicite des documents qui fondaient la plainte déposée le 10 décembre 2010 ; qu'en tout état de cause, les propositions de rectification de l'administration fiscale sont fondées non seulement sur les documents qui lui ont été transmis par l'autorité judiciaire provenant d'une perquisition régulièrement effectuée mais aussi sur les éléments tirés de l'enquête pénale pour fraude fiscale diligentée à l'encontre de Mme O..., notamment sur les éléments saisis lors de la perquisition régulièrement effectuée à son domicile ainsi que sur ses propres déclarations et celle d'autres membres de sa famille et dont la régularité n'a pas été mise en cause ; que l'exception de nullité de procédure ayant été rejeté par le tribunal correctionnel dans son jugement du 4 avril 2016 ayant acquis l'autorité de la chose jugée, Mme O... et le ministère public s'étant désisté de leur appel ; que les propositions de rectification établissent que Mme O... détenait des avoirs à l'étranger » ;
Alors, d'une part, que la transmission par le procureur de la République, au titre de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, de documents volés ou détournés ou présumés volés ou détournés, ne peut rendre licite leur détention et leur production par les agents de l'administration pour fonder des propositions de rectification ; qu'il n'est pas contesté que les données informatiques versées au soutien de la plainte de l'administration fiscale contre Mme O... le 10 décembre 2010, dont des extraits ont été transmis à l'appui des propositions de rectification, avaient été dérobées par M. N..., ancien informaticien salarié de la filiale suisse de la banque HSBC ; qu'en retenant que les pièces sur la base desquelles les propositions de rectification ont été fondées, avaient une origine apparemment licite dès lors qu'elles avaient été versées dans le cadre régulier d'une communication régulière à l'administration fiscale les 9 juillet 2009, 2 septembre 2009 et 12 janvier 2010, conformément aux dispositions des articles L. 101 et L. 135 du livre des procédures fiscales, bien que la transmission desdites pièces n'ait pas suffi à leur conférer une origine apparemment licite, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Alors, d'autre part, que pour établir des propositions de rectification, l'administration fiscale ne peut fonder les rectifications sur des documents illicites ; qu'au cas présent, pour fonder les rectifications opérées, l'administration fiscale a fait état des éléments qu'elle aurait obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, notamment des extraits issus de fichiers informatiques de la banque HSBC à Genève et qui concerneraient des comptes ouverts dans cet établissement ; que la transmission par le procureur de la République, au titre de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, de documents volés ou détournés ou présumés volés ou détournés, ne peut rendre licite leur détention et leur production par les agents de l'administration pour fonder des propositions de rectification ; que la détention de ces données informatiques par l'administration fiscale ne pouvant donc être considérée comme licite, ces données ne pouvaient valablement être opposées à Mme O... comme fondement à des rectifications ; qu'il suffit qu'une seule pièce illicite ait été retenue parmi d'autres pour entraîner la nullité de la procédure d'imposition ; qu'en retenant, pour considérer que les propositions de rectification établissaient que Mme O... détenait des avoirs à l'étranger, que lesdites propositions étaient fondées non seulement sur les documents illicites qui lui ont été transmis par l'autorité judiciaire mais sur des éléments tirés de l'enquête pénale pour fraude fiscale diligentée à l'encontre de Mme O..., la cour d'appel a violé l'article L. 101 du livre des procédures fiscales et l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté l'ensemble des demandes de Mme O... et confirmé la décision de rejet du 31 octobre 2014,
Aux motifs propres que « ainsi que le soutient l'administration fiscale, la procédure de l'article 23 C du livre des procédures fiscales concernant les demandes de justification de l'origine des avoirs placés sur un compte bancaire à l'étranger non déclaré et dont les conséquences de la mise en oeuvre sont codifiées aux articles 755 du code général des impôts et L. 71 du livre des procédures fiscales est applicable aux demandes de l'administration fiscale à compter du 1er janvier 2013 ; que si, le tribunal a, à juste titre, estimé que Mme O... ne pouvait pas invoquer la prescription du droit de reprise de l'administration s'agissant des avoirs dont elle prétend avoir hérité de sa mère à défaut d'avoir rapporté la preuve de cette succession, il convient d'ajouter que le fait générateur de l'imposition correspond à la date d'expiration des délais prévus à l'article L. 23 C du code général des impôts, soit le 30 septembre 2013, soit 30 jours après l'envoi de la mise en demeure prévue à cet article d'une part et que la prorogation du délai de reprise prévue à l'article L. 188 B du livre des procédures fiscales en cas de plainte de l'administration pour fraude fiscale était également applicable en l'espèce en matière d'impôt de solidarité sur la fortune » ;
Et aux motifs adoptés que « Mme O... ne peut davantage invoquer la prescription du droit de reprise de l'administration s'agissant des avoirs dont elle prétend avoir hérité de sa mère, à défaut d'avoir apporté la preuve de cette succession ; »
Alors que la procédure de l'article 23 C du livre des procédures fiscales concernant les demandes de justification de l'origine des avoirs placés sur un compte bancaire à l'étranger non déclaré, qui est applicable aux demandes de l'administration fiscale à compter du 1er janvier 2013, ne peut rouvrir une prescription acquise à cette date, dès lors que l'article 755 du code général des impôts qui prévoit les conséquences de la mise en oeuvre des demandes de justifications, ne s'appliquent qu'aux délais de reprise venant à expiration à compter du 1er janvier 2013 ; que, par ailleurs, les dispositions de l'article L. 181-0 A du livre des procédures fiscales, qui prévoient un délai de reprise de dix ans en matière de droits de succession ou d'impôt de solidarité sur la fortune, en cas de non-déclaration d'un compte bancaire ou d'un contrat d'assurance-vie ouvert ou souscrit auprès d'un établissement ou organisme sis à l'étranger, s'appliquent aux délais de reprise venant à expiration à compter du 1er janvier 2013 ; qu'en l'espèce, la mère de Mme O..., Mme T... M..., étant décédée le [...] et la déclaration de succession définitive ayant été déposée le 27 septembre 2006, la prescription en matière de droits d'enregistrement était acquise au 31 décembre 2012 conformément aux dispositions de l'article L. 186 du livre des procédures fiscales ; que la proposition de rectification, seul acte interruptif de prescription, a été adressée à Mme O... le 16 octobre 2013 ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, entrées en vigueur le 1er janvier 2013, ne pouvaient donc être appliquées au cas présent, dès lors que la prescription était acquise à cette date ; qu'en jugeant le contraire, en retenant que Mme O... ne pouvait invoquer la prescription du droit de reprise de l'administration s'agissant des avoirs dont elle a hérité de sa mère, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 23 C, L. 186 et L. 181-0 A du livre des procédures fiscales ainsi que l'article 755 du code général des impôts.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté l'ensemble des demandes de Mme O... et confirmé la décision de rejet du 31 octobre 2014,
Aux motifs propres que « l'administration fiscale a demandé à Mme O... l'identité et l'adresse de la partie versante pour chaque versement sur les comptes, les motifs des versements, le montant et la date des versements, la nature des sommes versées, les pièces bancaires ou tous documents permettant au service de vérifier le bien-fondé de ses affirmations ; que ces demandes visant à permettre à l'administration de connaître l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs litigieux entrent bien dans le cadre de l'article L. 23 du livre des procédures fiscales ; que les informations selon lesquelles Mme O... était détentrice de comptes à l'étranger non déclarés par l'intermédiaire de deux sociétés ne permettaient pas de déterminer de manière précise par quel moyen l'intéressée avait obtenu le contrôle exclusif des comptes ni d'affirmer que les comptes antérieurement détenus par sa tante Mme U... M... avaient été transmis par voie de succession et partagés entre les héritiers, la déclaration de succession du 28 novembre 2009 ne mentionnant pas ces avoirs ; que Mme O... n'a pas expliqué ni justifié de l'origine des modalités d'acquisition des avoirs litigieux alors qu'elle y avait été invitée à deux reprises ni transmis les relevés de comptes litigieux ; qu'elle n'a pas établi que ces avoirs avaient été transmis par succession, le fait que les comptes aient pu être auparavant rattachés à sa tante et sa mère ne suffit pas à établir la transmission de ces avoirs par succession, s'agissant des avoirs qu'elle dit avoir hérités de sa mère ; qu'elle n'a pas, par courriers des 15 juillet et 25 septembre 2013, confirmé la propriété du compte ayant appartenu à sa tante décédée Mme U... Q... alors qu'à l'audience pénale du 11 juin 2014, elle a reconnu et admis « avoir eu connaissance de ces comptes en 2005 ou 2006 et reconnu sa pleine conscience d'être devenue copropriétaire par le jeu de la dévolution successorale, des fonds litigieux » ; que Mme O... n'a pas confirmé que la propriété du compte appartenant à sa tante décédée et a indiqué que les héritiers avaient tous refusé la succession alors qu'une déclaration de succession a été rédigée le 28 novembre 2009 précisant l'acceptation de la succession par les héritiers dont Mme O... et il ressort de son audition le 13 octobre 2011 qu'elle reconnaît avoir procuration sur les comptes ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont estimé que l'administration fiscale avait à bon droit mis en oeuvre la procédure de taxation d'office dans les conditions de l'article 755 du code général des impôts, soit en calculant les droits de mutation à titre gratuit sur les avoirs figurant sur les comptes étrangers au taux le plus élevé » ;
Et aux motifs adoptés que « Mme O... n'a pas expliqué ni justifié de l'origine et des modalités de l'acquisition des avoirs litigieux alors qu'elle y avait été invitée à deux reprises par l'administration ; qu'ainsi, le fait qu'il ressorte notamment des éléments de l'enquête pénale que les comptes détenus par les sociétés Newproad investments SA et Ferncroft Holding SA aient pu être auparavant rattachés respectivement à la tante et à la mère de la demanderesse ne suffit pas à établir la transmission de ces avoirs par succession ; () que c'est donc par une juste application des textes précités que l'administration a mis en oeuvre la procédure de taxation d'office dans les conditions de l'article 755 du code général des impôts, soit en calculant les droits de mutation à titre gratuit sur les avoirs figurant sur les comptes étrangers au taux le plus élevé ; »
Alors, d'une part, qu'en application de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, lorsque l'obligation prévue au deuxième alinéa de l'article 1649 A ou à l'article 1649 AA du code général des impôts n'a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes, l'administration peut demander à la personne physique soumise à cette obligation de fournir dans un délai de soixante jours toutes informations ou justifications sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte ou le contrat d'assurance-vie ; qu'il résulte de la demande adressée le 17 mai 2003 à Mme O..., qu'elle excédait largement les dispositions précitées puisqu'aux termes de cette dernière « les explications et justifications que vous produirez concernant l'origine et l'acquisition des avoirs acquis à l'étranger devront comporter, notamment, toutes les précisions suivantes : l'identité et l'adresse de la partie versante pour chaque versement sur les comptes, le motif des versements, le montant et la date des versements, la nature des sommes versées, les pièces bancaires ou tous documents permettant au service de vérifier le bien-fondé de vos affirmations » ; qu'au regard du texte précité, l'administration fiscale ne pouvait demander des justifications que sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte, en dehors de tout autre élément ; qu'en retenant, au contraire, que tous les éléments demandés entraient bien dans le cadre de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, la cour d'appel a violé le texte précité ;
Alors, d'autre part, qu'en application de l'article 755 du code général des impôts, les avoirs figurant sur un compte ou un contrat d'assurance-vie étranger et dont l'origine et les modalités d'acquisition n'ont pas été justifiées dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales sont réputés constituer, jusqu'à preuve contraire, un patrimoine acquis à titre gratuit assujetti, à la date d'expiration des délais prévus au même article L. 23 C, aux droits de mutation à titre gratuit au taux le plus élevé ; que ces dispositions ne trouvent à s'appliquer que dans l'hypothèse d'une origine inconnue des avoirs, laquelle reste inconnue du fait du défaut de réponse à la suite d'une demande visée à l'article 23 C du livre des procédures fiscales ; que tel n'est pas le cas lorsque l'administration fiscale a entendu elle-même amener cette preuve de l'origine des avoirs dès la mise en oeuvre ; qu'au cas présent, l'administration fiscale a eu connaissance, par l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, de l'origine et des modalités d'acquisition des avoirs à l'étranger que Mme O... détenait via les sociétés Newproad Investments SA et Ferncroft Holding SA ; que tout au long de la procédure, l'administration fiscale a entendu elle-même apporter la preuve de l'origine des avoirs et des modalités d'acquisition par les héritiers ; que, par conséquent, l'administration fiscale ne pouvait se fonder sur un défaut de réponse suffisante à ses courriers modèles n° 3907 et 3907 bis des 17 mai et 29 mai 2013 pour procéder à un rappel de droits de mutation à titre gratuit calculé sur la base des avoirs à l'étranger dont l'intéressée avait la disposition suite au décès de sa tante, Mme U... Q... née M..., et de sa mère, Mme T... M... ; qu'en retenant que c'est à juste titre que l'administration avait à bon droit mis en oeuvre la procédure de taxation d'office en calculant les droits de mutation à titre gratuit sur les avoirs figurant sur les comptes étrangers au taux le plus élevé, la cour d'appel a violé l'article 755 du code général des impôts.

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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 16 décembre 2020, 19-21.091, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

BOURSE - Autorité des marchés financiers - Voies de recours - Décisions susceptibles - Exclusion - Cas - Notification de griefs

ANALYSE DE L'ARRET :

Le propre d'une notification de griefs est de formuler une accusation afin de mettre les personnes concernées en mesure de se défendre. C'est donc à bon droit qu'ayant rappelé que, conformément à l'articles L. 621-15 du code monétaire et financier, la notification des griefs ouvre la phase contradictoire de la procédure de sanction, qui se poursuit le cas échéant jusqu'à la décision rendue par la commission des sanctions sur le bien-fondé de cette accusation, décision elle-même susceptible du recours prévu à l'article L. 621-30 du même code, une cour d'appel en a déduit que cet acte ne pouvait faire l'objet d'un recours autonome devant elle

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB

COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 16 décembre 2020



Rejet

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 833 F-P
Pourvoi n° T 19-21.091

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 16 DÉCEMBRE 2020
1°/ la société Montaigne Fashion Group, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ la société EMJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , en la personne de M. G... W..., agissant en qualité de liquidateur de la société Montaigne Fashion Group,
ont formé le pourvoi n° T 19-21.091 contre l'arrêt rendu le 20 juin 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 7), dans le litige les opposant à l'Autorité des marchés financiers, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ponsot, conseiller, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Montaigne Fashion Group et de la société EMJ, ès qualités, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de l'Autorité des marchés financiers, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Ponsot, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 juin 2019), à la suite de l'enquête ouverte par l'Autorité des marchés financiers (l'AMF) sur l'information financière et le marché du titre Montaigne Fashion Group, le président de l'AMF a, après examen du rapport d'enquête par le collège de cette autorité, notifié deux griefs à la société Montaigne Fashion Group (la société MFG).
2. Le 11 décembre 2017, la société MFG a saisi le président de l'AMF d'un recours gracieux tendant au retrait d'un des griefs notifiés, l'estimant dépourvu de toute motivation.
3. Aucune suite n'ayant été réservée à ce recours, la société MFG a, le 11 janvier 2019, saisi la cour d'appel de Paris d'un recours en annulation contre la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La société Montaigne Fashion Group fait grief à l'arrêt de déclarer son recours irrecevable, alors :
« 1°/ que la notification de griefs émanant du collège de l'AMF ne constitue pas un acte préparatoire de la décision de la commission des sanctions, mais une décision individuelle pouvant faire grief et à ce titre susceptible d'un recours conformément aux dispositions de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, de sorte qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé ledit texte par refus d'application ;
2°/ que toute décision individuelle émanant du collège faisant grief est susceptible d'un recours ouvert par l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, de sorte qu'en se déterminant sur la base de la considération selon laquelle l'article L. 621-14-1 du code monétaire et financier ne prévoirait pas de recours contre la notification de griefs indépendamment de la décision de la Commission des sanctions, la cour d'appel a violé l'article L. 621-30 dudit code ;
3°/ que, subsidiairement, les actes simplement préparatoires font grief en raison de la gravité des effets qu'ils déploient par eux-mêmes et que tel est le cas lorsque la notification de griefs émanant du collège de l'AMF porte atteinte à la présomption d'innocence ; qu'ainsi, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la rédaction à l'indicatif de la notification de griefs ne portait pas atteinte à la présomption d'innocence de la société MFG, ce qui rendait immédiatement recevable le recours de celle-ci contre cette décision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
5. Le propre d'une notification de griefs est de formuler une accusation afin de mettre les personnes concernées en mesure de se défendre. C'est donc à bon droit qu'ayant rappelé que, conformément à l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, la notification des griefs ouvre la phase contradictoire de la procédure de sanction, qui se poursuit le cas échéant jusqu'à la décision rendue par la commission des sanctions sur le bien-fondé de cette accusation, décision elle-même susceptible du recours prévu à l'article L. 621-30 du même code, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu le sens et la portée de l'article L. 621-14-1 du même code et qui n'avait pas à effectuer la recherche inopérante invoquée par la troisième branche, en a déduit que cet acte ne pouvait faire l'objet d'un recours autonome devant elle.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Montaigne Fashion Group aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la société Montaigne Fashion Group et la société EMJ, ès qualités.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable le recours déposé au greffe de la cour d'appel de Paris le 11 janvier 2019 par la société Montaigne Fashion Group ;
AUX MOTIFS QUE la cour rappelle qu'aux termes de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, « [l]'examen des recours formés contre les décisions individuelles de l'Autorité des marchés financiers autres que celles, y compris les sanctions prononcées à leur encontre, relatives aux personnes et entités mentionnées au II de l'article L. 621-9 est de la compétence du juge judiciaire » ; que la société MFG saisi la cour d'un recours dans les termes reproduits au paragraphe 6 du présent arrêt ; que la cour relève à titre liminaire que la décision du Conseil d'État du 19 décembre 2018, fondée sur les articles L. 621-9, R. 621-45 et L. 621-30 du code monétaire et financier, par laquelle il s'est déclaré incompétent pour connaître du recours exercé par la société MFG, s'est borné à relever que la requérante ne figure pas au nombre des personnes et entités mentionnées au II de l'article L. 621-9 du code précité, à l'égard desquelles le Conseil d'État est compétent, sans pour autant se prononcer sur l'existence d'un recours immédiat ouvert devant le juge judiciaire pour le type de décision en cause ; que l'article L. 621-15 alinéas 1er et 2 du code monétaire et financier dispose : « Le collège examine le rapport d'enquête ou de contrôle établi par les services de l'Autorité des marchés financiers, ou la demande formulée par le président de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ; Sous réserve de l'article L. 465-3-6, s'il décide l'ouverture d'une procédure de sanction, il notifie les griefs aux personnes concernées ; il transmet la notification des griefs à la commission des sanctions, qui désigne un rapporteur parmi ses membres () » ; qu'il résulte de cette disposition que la notification de griefs ouvre la phase contradictoire de la procédure de sanction, dont la première étape, l'instruction s'achève par le dépôt d'un rapport ; que ce rapport reprend l'ensemble des éléments recueillis ainsi que, le cas échéant, le contenu des auditions de la personne mise en cause et dont le contenu peut encore être discuté en séance devant la Commission des sanctions, est ainsi destiné à éclairer cette dernière sur l'ensemble du dossier au cours de l'ultime phase de la procédure, à l'issue de laquelle cette commission adopte une décision susceptible de recours ; qu'il est donc inexact de dire, comme le fait la société MFG qu'une condamnation est susceptible d'être prononcée « sur la seule foi » de la notification de griefs, étant précisé que la Commission des sanctions peut considérer que tout ou partie des griefs notifiés ne sont pas établis ; qu'en outre, la Commission des sanctions, qui est saisie tant de la régularité de la procédure que du bien-fondé des accusations, est en mesure de tirer les conséquences d'une éventuelle irrégularité en n'entrant pas, le cas échéant, en voie de condamnation ; que tel pourrait notamment être le cas si la Commission constatait que les termes dans lesquels la notification de griefs a été rédigée n'ont pas permis à son destinataire de comprendre ce qui lui est reproché et qu'il a ainsi été porté une atteinte irrémédiable à ses droits de la défense ; que relevant de la catégorie des actes préparatoires, ne donnant lieu à aucune publicité de la part de l'AMF et servant de cadre aux services d'instruction comme à la Commission des sanctions, laquelle rend sa décision dans le respect des limites qu'elle pose, la notification de griefs ne constitue pas un acte faisant grief indépendamment de la décision de la Commission et, par voie de conséquence, n'entre pas dans le champ de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier ; qu'une personne mise en cause ne peut donc contester, devant la présent cour, la régularité de la notification de griefs qui lui a été adressée que dans le cadre du recours formé contre la décision de la Commission des sanctions mettant fin à la procédure ouverte par cette notification ; qu'à cet égard, c'est en vain que la société MFG des dispositions de l'article L. 621-14-1 du code monétaire et financier ; que si le législateur a expressément prévu, au sixième alinéa de cet article, que les décision du Collège et de la Commission des sanctions de l'AMF prises dans le cadre de la procédure de composition administrative sont soumises aux voies de recours prévues à l'article L. 621-30 du code de commerce, admettant ainsi l'existence de recours exercés de manière autonome contre leurs décisions respectives, en revanche aucune disposition de ce code n'ouvre de recours équivalent contre l'acte de notification de griefs auquel procède le Collège de l'AMF ; que l'absence de disposition similaire s'agissant de la notification de griefs démontre au contraire que le législateur n'a pas entendu ouvrir un recours contre cet acte indépendamment de la décision de la Commission des sanctions ; qu'en l'espèce, la société MFG, qui est irrecevable à exercer un recours juridictionnel direct et immédiat à l'encontre de la notification de griefs elle-même, l'est a fortiori à introduire un recours contre la décision née du silence conservé par l'AMF sur sa demande de retrait d'une partie des griefs notifiés ; que la cour ajoute que la régularité d'une notification de griefs peut être contestée à l'occasion du recours exercé conte la décision de la Commission des sanctions, de sorte que son destinataire n'est pas privé de tout accès au juge concernant le contrôle de la régularité de la procédure engagée contre lui ; qu'il s'ensuit que le recours de la société MFG est irrecevable ;
ALORS, DE PREMIERE PART, QUE la notification de griefs émanant du Collège de l'Autorité des Marchés Financiers ne constitue pas un acte préparatoire de la décision de la Commission des sanctions, mais une décision individuelle pouvant faire grief et à ce titre susceptible d'un recours conformément aux dispositions de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, de sorte qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé ledit texte par refus d'application ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE toute décision individuelle émanant du Collège faisant grief est susceptible d'un recours ouvert par l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, de sorte qu'en se déterminant sur la base de la considération selon laquelle l'article L. 621-14-1 du code monétaire et financier ne prévoirait pas de recours contre la notification de griefs indépendamment de la décision de la Commission des sanctions, la cour d'appel a violé l'article L. 621-30 dudit code ;
ALORS, DE TROISIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE les actes simplement préparatoires font grief en raison de la gravité des effets qu'ils déploient par eux-mêmes et que tel est le cas lorsque la notification de griefs émanant du Collège de l'Autorité des Marchés Financiers porte atteinte à la présomption d'innocence ; qu'ainsi, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la rédaction à l'indicatif de la notification de griefs ne portait pas atteinte à la présomption d'innocence de la société MFG, ce qui rendait immédiatement recevable le recours de celle-ci contre cette décision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 16 décembre 2020, 18-20.229, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

ANALYSE DE L'ARRET :



DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
CH.B


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 16 décembre 2020



Rejet

Mme DARBOIS, conseiller le plusancien faisant fonction de président


Arrêt n° 784 F-P+B
Pourvoi n° K 18-20.229



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 16 DÉCEMBRE 2020
La société [...] , société anonyme, dont le siège est [...] ), a formé le pourvoi n° K 18-20229 contre l'arrêt rendu le 26 mars 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant :
1°/ au ministre des finances et comptes publics, domicilié [...] ,
2°/ à la direction générale des douanes, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de Me Bouthors, avocat de la société [...] , de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du ministre des finances et comptes publics et de la direction générale des douanes, et l'avis de M. Debacq, avocat général, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 3 novembre 2020 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 mars 2018), la société [...] (la société [...]), implantée à Mouscron en Belgique, qui exerce une activité de commissionnaire en douanes, a accompli, pour le compte de la société Jost Logistique France, commissionnaire en transport, les formalités de dédouanement de marchandises que celle-ci a importées de pays tiers à l'Union européenne, placées sous titre de transit communautaire externe à leur arrivée à Marseille ou Algeciras en Espagne.
2. A la suite d'un contrôle a posteriori des opérations de transit, l'administration des douanes a notifié à la société [...] un procès-verbal de constat d'infractions concernant des soustractions de marchandises sous régime suspensif en cours de transport et a liquidé d'office les droits et taxes y afférents. La société [...] ne s'étant pas acquittée des sommes qui lui étaient demandées, l'administration des douanes a émis à son encontre un avis de mise en recouvrement (AMR). Sa contestation de cet avis ayant été rejetée, la société [...] a assigné l'administration des douanes en annulation de la décision de rejet et de l'AMR.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
3. La société [...] fait grief à l'arrêt de reconnaître la compétence matérielle des juridictions françaises et de rejeter ses contestations, alors :
« 1°/ qu'en vertu des articles 92-1 et 96 du code des douanes communautaire, le régime de transit externe permettant aux marchandises de circuler d'un point à un autre au sein de l'Union européenne en suspension de droits de douanes prend fin lorsque les documents sont présentés au bureau des douanes de destination qui accepte ainsi la déclaration de mise en libre pratique des marchandises ; que cette mise en libre pratique détermine la compétence douanière pour connaître des irrégularités éventuelles affectant ladite opération, y compris tout fait de soustraction à la surveillance douanière née de l'absence physique de la marchandise à ce moment, irrégularité susceptible de générer une dette douanière ; que la localisation ultérieure en France de la livraison matérielle desdites marchandises est sans emport sur la compétence exclusive des autorités douanières belges de sorte que les douanes françaises ont excédé leur compétence en violation des textes susvisés ;
2°/ qu'aux termes de la combinaison des articles 201, 203, 204 et 215 du code des douanes communautaire, la dette douanière née de la mise en libre pratique de marchandises passibles de droits à l'importation au moment de la déclaration en douane correspondante, peut également prendre naissance quand lesdites marchandises sont réputées avoir été soustraites à la surveillance des douanes, faute de pouvoir être représentées au bureau des douanes du pays de destination ayant accepté la déclaration susvisée ; que la constatation et la sanction des irrégularités afférentes à ces opérations appartiennent exclusivement aux autorités du pays de destination sur le territoire desquelles a été commise la première infraction ; qu'en reconnaissant cependant compétence à la douane française pour considérer qu'une dette douanière était née en France lors même que la première infraction était située en Belgique, motif inopérant pris de la livraison ultérieure en France par le transporteur des marchandises auparavant mises en libre pratique en Belgique, la cour a méconnu les règles d'ordre public gouvernant la matière au sein de l'Union douanière en violation des textes susvisés. »
Réponse de la Cour
4. La Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que doit être considérée comme une soustraction à la surveillance douanière tout acte ou omission qui a pour résultat d'empêcher, ne serait-ce que momentanément, l'autorité douanière compétente d'accéder à une marchandise sous surveillance douanière et d'effectuer les contrôles prévus par la réglementation douanière communautaire (Arrêt 11 juillet 2002, Liberexim, C-371/99) et que si le lieu de l'infraction ou de l'irrégularité pouvait être établi, les dispositions des articles 203 et 215 du code des douanes communautaire permettent de désigner comme compétent pour recouvrer la dette douanière l'Etat membre sur le territoire duquel a été commise la première infraction ou irrégularité susceptible d'être qualifiée de soustraction à la surveillance douanière (Arrêt 3 avril 2008, Militzer & Münch, C-230/06).
5. Après avoir énoncé que le régime de transit suppose une surveillance des marchandises par l'administration des douanes, dont il ne peut être disposé avant que les formalités de dédouanement aient été accomplies, et que leur mise en libre pratique ne pouvait intervenir qu'à la fin du régime de transit, qui impliquait l'arrivée des marchandises au bureau des douanes ou dans les locaux du commissionnaire en douane, l'arrêt retient que les opérations d'importation en cause étaient irrégulières puisque les marchandises parties de Marseille ou Algeciras sous titre de transit communautaire avaient pour destination Mouscron en Belgique et avaient fait l'objet d'une notification d'arrivée dans le système informatique de dédouanement dédié aux marchandises circulant sous titre de transit, cependant qu'elles n'avaient jamais été acheminées en Belgique mais qu'elles avaient été livrées en région parisienne.
6. Il relève encore que la soustraction au régime de transit, c'est-à-dire la mise sur le marché de la marchandise en dehors des conditions prévues au régime douanier, a été opérée en France.
7. De ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel déduit à bon droit que l'administration des douanes françaises était compétente pour connaître des irrégularités affectant les opérations litigieuses.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
9. La société [...] fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en l'absence de contestation portant sur la déclaration d'origine des marchandises dont l'importation était soumise à un tarif douanier préférentiel, les douanes françaises ne pouvaient légalement taxer d'office lesdites marchandises à un taux exorbitant et disproportionné, sans autrement s'en expliquer au regard des exigences issues des articles 91 et suivants du code des douanes communautaire, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
10. Le bénéfice d'un régime préférentiel est subordonné à la présentation d'une preuve de l'origine des marchandises, qui doit, en principe, intervenir au moment du dédouanement et suppose la possibilité de leur contrôle physique par l'administration des douanes.
11. Ayant retenu, par motifs adoptés, que la société [...] ne pouvait bénéficier du tarif douanier préférentiel du fait des irrégularités commises lors de l'importation des marchandises en cause, et notamment de leur soustraction à la surveillance douanière, la cour d'appel, en jugeant que la dette douanière ne devait pas prendre en compte les droits sur une base de régime préférentiel mais sur celle du tarif extérieur commun, a légalement justifié sa décision.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
Et sur le second moyen
Enoncé du moyen
13. La société [...] fait le même grief à l'arrêt, alors :
« 1°/ qu'en vertu de l'article 7 § 3 1er alinéa de la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 modifiée, la TVA sur l'importation n'est pas due si les marchandises ne sortent pas du régime douanier sous lequel elles ont été placées, même si naît une dette douanière à raison de l'inexécution de l'une des obligations propres à l'utilisation de ce régime douanier ; qu'en prétendant mettre à la charge du transitaire la TVA afférente à des marchandises mises en libre pratique avant d'être acquises par des tiers qui n'ont pas réglé la TVA, la cour a méconnu les exigences susvisées ;
2°/ que l'article 345 du code des douanes français, s'il permet aux douanes de recouvrer "les créances de toute nature" ne les autorise pas à recouvrer des taxes dans des conditions étrangères aux prévisions du code des douanes communautaire ; qu'en déclarant le contraire, la cour a violé le texte susvisé. »
Réponse de la Cour
14. Selon les dispositions combinées de l'article 285 du code des douanes et des articles 291 et 293 A du code général des impôts, l'administration des douanes est compétente pour recouvrer les taxes sur le chiffre d'affaires et tous autres droits et taxes exigibles à l'importation du bien, c'est-à-dire au moment de l'entrée en France d'un bien, originaire ou en provenance d'un Etat ou d'un territoire n'appartenant pas à la Communauté européenne et qui n'a pas été mis en libre pratique.
15. Après avoir énoncé que l'article 285 du code des douanes autorise l'administration des douanes à recouvrer toute TVA exigible en cas de fraude liée à une déclaration d'importation, que l'importation soit ou non réalisée, et retenu que la société [...] ne pouvait bénéficier du régime de suspension de droit prévu par les articles 91 et suivants du code des douanes communautaire pour les marchandises en transit, faute d'avoir respecté les formalités prévues par ces textes, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que les marchandises ont été importées de Tunisie et du Maroc, pays tiers à l'Union européenne, qu'elles n'ont pas été valablement mises en pratique, puisqu'elles ne l'ont été que par suite de manoeuvres frauduleuses, et qu'elles doivent ainsi être considérées comme importées en France.
16. De ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit, à bon droit, que la société [...] était redevable de la TVA à l'importation auprès de l'administration des douanes.
17. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société [...] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [...] et la condamne à payer au ministre de l'action et des comptes publics et au directeur général des douanes et droits indirects la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour la société [...] .
Premier moyen de cassation
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir reconnu la compétence matérielle des juridictions françaises et d'avoir rejeté les contestations de la société [...] tendant à obtenir l'annulation de l'avis de résultat d'enquête mentionnant une dette douanière de 2.114.626 € (3 juin 2014) et de l'avis de mise en recouvrement (13 octobre 2014) correspondant ;
aux motifs que, sur l'existence de la dette douanière, il résulte des dispositions de l'article 92-1 du code des douanes communautaire que le régime de transit externe permettant aux marchandises de circuler d'un point à un autre au sein de l'Union européenne en suspension de droits de douane prend fin lorsque les documents sont présentés au bureau des douanes de destination qui accepte la déclaration en libre pratique ; que l'article 96 du même code dispose que le principal obligé ainsi que le destinataire des marchandises est tenu de présenter les marchandises intactes au bureau des douanes de leur lieu de destination ; que selon l'article 372-1 e) des dispositions d'application du code le principal obligé ou le destinataire des marchandises doit avoir recours à un destinataire agrée ; / qu'aux termes de l'article 203-1 du code des douanes communautaire, une dette douanière nait à l'importation en cas de soustraction à la surveillance douanière d'une marchandise passible de droits à l'importation ; que la notion de soustraction s'entend comme tout acte ou omission ayant pour résultat d'empêcher ne serait-ce que momentanément l'autorité douanière d'accéder aux marchandises sous surveillance douanière et d'effectuer des contrôles ; qu'elle ne suppose pas un élément intentionnel mais présuppose la réunion de conditions de nature objective, telle l'absence physique des marchandises dans le lieu de dépôt au moment où l'autorité douanière entend procéder à leur examen ou le fait qu'elles aient été soustraites à des contrôles, indépendamment du fait qu'ils aient été effectivement réalisés par l'autorité douanière ; / que le régime en matière de transit implique une surveillance des marchandises et interdit d'en disposer avant qu'il n'y soit mis fin après que les formalités de dédouanement ont été accomplies ; / que la mise en libre pratique qui permet de disposer librement des marchandises ne peut intervenir qu'à la fin du régime de transit ce qui implique l'arrivée des marchandises au bureau de douane, en application de l'article 92-1 du code des douanes communautaire ou dans les locaux du destinataire agréé ; / qu'en l'espèce, l'enquête douanière a permis d'établir que sur 241 opérations d'importation, 92 sont irrégulières puisque les marchandises parties de Marseille ou Algésiras sous-titre de transit communautaire avec pour destination Mouscron ont fait l'objet de notification d'arrivée dans le système informatique de dédouanement dédié aux marchandises circulant sous-titre de transit alors qu'elles avaient été soustraites sur le territoire français puisqu'elles n'avaient jamais été conduites en Belgique, les chauffeurs ayant déclaré qu'ils transportaient toujours les marchandises selon le même itinéraire Marseille - Paris sauf exception ; / que la société [...] estime que la soustraction des marchandises à la surveillance douanière a été commise à Mouscron en Belgique ; que l'infraction alléguée par la douane française (dédouanement à Mouscron en Belgique sans présentation des marchandises) est forcément la première infraction douanière commise ; qu'à titre subsidiaire si était retenue une infraction en France, celle-ci serait postérieure à l'infraction de mise en libre pratique des marchandises de textile en Belgique, notamment la déclaration douanière à Mouscron sans que les marchandises ne soient présentées dans les installations de [...] ; qu'elle fait valoir que tant que les marchandises voyageaient sur le territoire de l'Union européenne, c'est à dire depuis Algésiras / Marseille jusqu'à Garonor, il ne pouvait y avoir soustraction à la surveillance douanière et que sous le couvert d'un T1 réglementairement établi, les marchandises étaient à l'abri d'une infraction et restaient réglementairement sous la surveillance de la douane ; que la première soustraction à la surveillance douanière s'est produite à Mouscron en Belgique ; que lorsque les marchandises ont été déchargées à Garonor, elles étaient auparavant dédouanées par [...] et se trouvaient légitimement en libre pratique ; qu'elle en déduit que la douane française n'était pas fondée à relever et à notifier l'infraction de soustraction et que, par voie de conséquence, les tribunaux français ne sont pas compétents pour connaître du litige et l'administration française incompétente pour recouvrer la dette douanière ; que seul le pays où la première infraction à la surveillance de la douane a été commise est bien fondé à procédé au recouvrement ; / que ceci étant exposé, aux termes de l'article 215-1 du code des douanes communautaire, le lieu de naissance de la dette douanière est celui où se produisent les faits qui font naître cette dette, ou si ce lieu ne peut être déterminé, celui où les autorités douanières constatent que la marchandise se trouve dans une situation ayant fait naître une dette douanière ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que, sur une totalité de 241 opérations d'importation, 92 sont irrégulières ; que les marchandises en question sont parties de Marseille ou Algésiras sous titre de transit communautaire externe, avec pour destination Mouscron et ont fait l'objet de notifications d'arrivée dans le système informatique de dédouanement dédié aux marchandises circulant sous titre de transit (NSTI) alors qu'elles n'y étaient pas présentes physiquement ; que les marchandises n'ont jamais été conduites en Belgique et ont été soustraites à la surveillance douanière à partir du moment où elles ont été acheminées vers la région parisienne pour prise en charge ou déchargement ; que c'est donc bien en France que la soustraction au régime de transit, en l'espèce la mise sur le marché de la marchandise en dehors des conditions prévues au régime douanier, a été opérée de sorte que le recouvrement de la dette douanière incombe à la douane française ; / que l'appelante conteste sa responsabilité en se prévalant de son statut de destinataire agréé ; que l'administration des douanes réplique que ce statut douanier de destinataire agréé prévu aux articles 406 à 408 des dispositions d'application du code des douanes communautaire octroie certaines facilités à son bénéficiaire, notamment celle de recevoir dans ses locaux des marchandises circulant sous titres de transit ; que pour autant, le statut de destinataire agréé n'autorise nullement son bénéficiaire à notifier l'arrivée des marchandises au bureau de douane d'arrivée, dans le but de mettre fin au régime du transit, en l'absence de celles-ci ; qu'il doit se conformer à la réglementation sur le transit externe telle que prévue aux articles 91 à 97 du code des douanes communautaire ; qu'il est reproché à la société [...] la non présentation des marchandises au bureau de douane de destination, celui de Mouscron ; que si le statut de destinataire agréé permet en effet à son titulaire de ne pas présenter physiquement la marchandise à ce bureau, cette présentation reste toutefois exigée et se fait virtuellement, le destinataire agréé devant en effet informer le bureau de douane de destination de la prise en charge dans ses locaux, au moment de l'arrivée physique des marchandises placées sous T1, par l'envoi d'un message de notification d'arrivée via le système informatique du transit ; / que ceci étant exposé, il n'est pas contesté qu'en l'espèce, la société [...] a été chargée, par la société Jost Logistique, d'effectuer les formalités de dédouanement des marchandises ; que l'article 96-2 du code des douanes communautaire étend l'obligation de présentation en douane incombant au principal obligé ayant souscrit un régime de transit, aux autres professionnels ayant participé à l'importation, notamment aux destinataires des marchandises ; qu'à ce titre, la société [...] doit se conformer à cette obligation de présentation en douane ; / qu'aux termes de l'article 203-3 du même code, est débiteur de la dette douanière : « - la personne qui a soustrait la marchandise à la surveillance douanière, - les personnes qui ont participé à cette soustraction en sachant ou en devant raisonnablement « savoir qu'il s'agissait d'une soustraction de la marchandise à la surveillance douanière, - celles qui ont acquis ou détenu la marchandise en cause et qui savaient ou devaient raisonnablement « savoir au moment où elles ont acquis ou reçu cette marchandise qu'il s'agissait d'une « marchandise soustraite à la surveillance douanière [...] » ; qu'il est établi par l'enquête douanière et non contesté par ailleurs par la société [...] que cette dernière, destinataire agréé, a envoyé le message de notification d'arrivée des marchandises dans ses locaux à la douane belge alors que celles-ci n'étaient pas en Belgique mais étaient restées en France ; qu'elle n'a donc pas respecté ses obligations de destinataire de marchandises sous sujétion douanière puisqu'elle n'a pas pris en charge ces marchandises arrivant sous couvert de titres de transit dans ses locaux ; qu'elle n'a pas pu constater leur intégrité physique et envoyé sans disposer des marchandises le message de notification d'arrivée au bureau de douane belge ; qu'elle a joué un rôle déterminant et actif et donc participé à la soustraction des marchandises faite en France et est donc débitrice, en application de l'article 203-3 du code des douanes communautaires, de la dette douanière née de cette soustraction (arrêt p. 4 à 6 ; adde : TGI p. 4 à 6) ;
1°) alors que, d'une part, en vertu des articles 92-1 et 96 du code des douanes communautaire, le régime de transit externe permettant aux marchandises de circuler d'un point à un autre au sein de l'Union européenne en suspension de droits de douanes prend fin lorsque les documents sont présentés au bureau des douanes de destination qui accepte ainsi la déclaration de mise en libre pratique des marchandises ; que cette mise en libre pratique détermine la compétence douanière pour connaître des irrégularités éventuelles affectant ladite opération, y compris tout fait de soustraction à la surveillance douanière née de l'absence physique de la marchandise à ce moment, irrégularité susceptible de générer une dette douanière ; que la localisation ultérieure en France de la livraison matérielle desdites marchandises est sans emport sur la compétence exclusive des autorités douanières belges de sorte que les douanes françaises ont excédé leur compétence en violation des textes susvisés ;
2°) alors, d'autre part, qu'aux termes de la combinaison des articles 201, 203, 204 et 215 du code des douanes communautaire, la dette douanière née de la mise en libre pratique de marchandises passibles de droits à l'importation au moment de la déclaration en douane correspondante, peut également prendre naissance quand lesdites marchandises sont réputées avoir été soustraites à la surveillance des douanes, faute de pouvoir être représentées au bureau des douanes du pays de destination ayant accepté la déclaration susvisée ; que la constatation et la sanction des irrégularités afférentes à ces opérations appartiennent exclusivement aux autorités du pays de destination sur le territoire desquelles a été commise la première infraction ; qu'en reconnaissant cependant compétence à la douane française pour considérer qu'une dette douanière était née en France lors même que la première infraction était située en Belgique, motif inopérant pris de la livraison ultérieure en France par le transporteur des marchandises auparavant mises en libre pratique en Belgique, la cour a méconnu les règles d'ordre public gouvernant la matière au sein de l'Union douanière en violation des textes susvisés ;
3°) alors, en tout état de cause, qu'en l'absence de contestation portant sur la déclaration d'origine des marchandises dont l'importation était soumise à un tarif douanier préférentiel, les douanes françaises ne pouvaient légalement taxer d'office lesdites marchandises à un taux exorbitant et disproportionné, sans autrement s'en expliquer au regard des exigences issues des articles 91 et suivants du code des douanes communautaire, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Second moyen de cassation
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir reconnu la compétence matérielle des juridictions françaises et d'avoir rejeté les contestations de la société [...] tendant à obtenir l'annulation de l'avis de résultat d'enquête mentionnant une « dette douanière » de 2.114.626 € (3 juin 2014), comprenant 6.143 € de taxe pour le développement de l'industrie de l'habillement et 345.537 € de TVA, ensemble l'avis de mise en recouvrement (13 octobre 2014) correspondant ;
aux motifs que, sur l'incompétence de l'administration des douanes à percevoir la TVA, la société [...] soutient qu'elle n'est pas redevable de la TVA ; qu'elle soutient qu'elle a payé les droits sur les marchandises lors de leur mise en libre pratique ; / que l'administration des douanes indique que les droits qui ont pu être acquittés au titre d'opérations de dédouanement ne sauraient être pris en compte dans le cadre d'une dette douanière dont la société est débitrice du fait des soustractions répétées de marchandises sous douane auxquelles elle a pleinement participé ; que la perception de la TVA relève bien des services douaniers français dans la mesure où les faits ont été qualifiés de contrebande et que le régime préférentiel ne saurait trouver à s'appliquer puisque la soustraction des marchandises placées sous régime suspensif de transit ont rendu impossible l'identification des marchandises importées à titre général et, plus spécifiquement, par rapport aux documents attestant leur origine préférentielle et que c'est à bon droit que la dette douanière ne prend pas en compte les droits sur une base de régime préférentiel mais sur celle du tarif extérieur commun ; que l'article 345 du code des douanes permet à l'administration des douanes de recouvrer « les créances de toute nature » qui auraient fait l'objet d'un AMR, dès lors que cet AMR vise l'article du code des douanes qui génère ces créances, et à condition que les conditions de cet article soient réunies ; / que, ceci étant exposé, en l'espèce, l'AMR émis le 13 octobre 2014 à l'encontre de la société [...] vise bien l'article 417-2 c du code des douanes, dont les conditions sont réunies au regard de la soustraction des marchandises ; que la créance ainsi générée, englobant la TVA, est donc exigible par l'administration des douanes ; que l'article 285-1 du code des douanes autorise l'administration des douanes à recouvrer toute TVA exigible en cas de fraude liée à une déclaration d'importation, que l'importation soit ou non réalisée ; que les droits acquittés sur le territoire belge par la société [...] l'ont été à la suite de manoeuvres frauduleuses consistant à déclarer des importations effectuées sur ce territoire qui en réalité, l'ont été en France ; que cette dernière ne peut donc se prévaloir du paiement de ces droits ; qu'elle ne peut non plus prétendre à bénéficier du régime de suspension de droit prévu par les articles 91 et suivants du code des douanes communautaire pour les marchandises en transit si elle n'a pas respecté les formalités prévues par ces textes ; / que le jugement entrepris sera donc confirmé en toutes ses dispositions ; que la société [...] succombant en son appel sera déboutée de sa demande d'indemnité de procédure ; qu'elle sera condamnée, sur ce même fondement, à payer à l'administration des douanes, la somme de 2 000 euros (arrêt p. 6 ; adde : TGI p. 5 et 6) ;
1°) alors que, d'une part, en vertu de l'article 7 § 3 1er alinéa de la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 modifiée, la TVA sur l'importation n'est pas due si les marchandises ne sortent pas du régime douanier sous lequel elles ont été placées, même si naît une dette douanière à raison de l'inexécution de l'une des obligations propres à l'utilisation de ce régime douanier ; qu'en prétendant mettre à la charge du transitaire la TVA afférente à des marchandises mises en libre pratique avant d'être acquises par des tiers qui n'ont pas réglé la TVA, la cour a méconnu les exigences susvisées ;
2°) alors en tout état de cause que l'article 345 du code des douanes français, s'il permet aux douanes de recouvrer « les créances de toute nature » ne les autorise pas à recouvrer des taxes dans des conditions étrangères aux prévisions du code des douanes communautaire ; qu'en déclarant le contraire, la cour a violé le texte susvisé.

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17 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 décembre 2020, 19-14.441, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 décembre 2020, 19-14.441, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

ANALYSE DE L'ARRET :



DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 9 décembre 2020



Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 763 F-P+B
Pourvoi n° Q 19-14.441








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 DÉCEMBRE 2020
M. X... N..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Q 19-14.441 contre l'arrêt rendu le 17 janvier 2019 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société Essertenne, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. N..., après débats en l'audience publique du 20 octobre 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 17 janvier 2019), M. N..., agriculteur et négociant en bestiaux, et époux commun en biens de Mme V... , a été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 17 mars 2008 et 10 février 2009, la date de cessation des paiements étant fixée au 18 septembre 2006 et M. B... désigné liquidateur. Le 12 décembre 2008 MM. B..., ès qualités, et N... ont été assignés par l'EURL Essertenne en paiement d'une provision. Par assemblée générale extraordinaire du 20 décembre 2008, une SCI créée entre Mme V... et ses frères a fait l'objet d'une augmentation de capital conduisant Mme V... à devenir minoritaire. Cette délibération a été jugée inopposable pour fraude à l'EURL Essertenne par arrêt du 10 mars 2014. La liquidation judiciaire de M. N... a été clôturée pour insuffisance d'actif le 11 mars 2014. L'EURL Essertenne a été autorisée à reprendre à l'encontre de M. N... son action tendant au recouvrement de sa créance par jugement du 4 octobre 2016.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
2. M. N... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'appel qu'il a interjeté le 7 décembre 2016 à l'encontre du jugement rendu le 4 octobre 2016 par le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu, alors :
« 1°/ que, selon l'article R. 643-18 du code de commerce, le jugement autorisant la reprise des actions individuelles de tout créancier à l'encontre du débiteur postérieurement à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif est signifié au débiteur à la diligence du greffier dans les huit jours de son prononcé ; qu'en jugeant que la notification effectuée par le greffe le 17 octobre 2016 était régulière et avait fait courir le délai d'appel, bien qu'il résultât de ses constatations que, le jugement entrepris ayant été prononcé le 4 octobre 2016, sa notification le 17 octobre 2016 ne respectait pas le délai de huit jours précité, de sorte qu'elle était irrégulière et n'avait pu faire courir le délai d'appel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a, dès lors, violé le texte susvisé, ensemble l'article L. 643-11 IV du code de commerce ;
2°/ que l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités, ne fait pas courir le délai de recours ; que le jugement du tribunal autorisant la reprise des poursuites individuelles sur le fondement de l'article L. 643-11 IV du code de commerce est susceptible d'appel dans les conditions de forme et de délai de droit commun ; qu'en considérant comme régulière la notification effectuée par le greffe le 17 octobre 2016, bien qu'il résultât de ses constatations qu'elle mentionnait, non pas le délai d'appel de droit commun, mais le délai de dix jours prévu par l'article R. 661-3 du code de commerce, la cour d'appel a violé l'article L. 643-11 IV du code de commerce, ensemble l'article 680 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
3. D'une part, s'il résulte de la combinaison des alinéas 4 et 5 de l'article R. 643-18 du code de commerce que le jugement qui, postérieurement à celui clôturant la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, autorise, à titre exceptionnel, la reprise des actions individuelles des créanciers doit être signifié au débiteur dans les huit jours de son prononcé, le non-respect de ce délai n'est pas sanctionné par la nullité pour irrégularité de l'acte de signification délivré après son expiration, de sorte que cet acte fait courir le délai d'appel.
4. D'autre part, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que le délai d'appel du jugement autorisant la reprise des actions individuelles des créanciers, que ce jugement soit celui de clôture de la liquidation judiciaire ou un jugement postérieur, lequel obéit au même régime, est le délai de dix jours prévu par l'article R. 661-3, alinéa 1er, du code de commerce, ces décisions étant, au sens de ce texte, rendues en matière de liquidation judiciaire.
5. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. N... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. N... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé en l'audience publique du neuf décembre deux mille vingt et signé par Mme Vaissette, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de M. Remery.MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. N....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'appel interjeté le 7 décembre 2016 par Monsieur N... à l'encontre du jugement rendu le 4 octobre 2016 par le Tribunal de grande instance de BOURGOIN-JALLIEU, et de l'avoir condamné au paiement d'une indemnité de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs que : « l'irrecevabilité pour tardiveté de l'appel constitue une fin de non-recevoir ; que l'irrecevabilité de l'appel entraine l'irrecevabilité des demandes de l'appelant ; que, selon l'article R.643-18 du code de commerce, qui concerne la clôture des opérations de liquidation judiciaire, lorsque le Tribunal autorise la reprise des actions individuelles de tout créancier à l'encontre du débiteur : - il en est fait mention dans les publicités prévues à l'article R.621-8 du code de commerce, - le jugement est signifié au débiteur à la diligence du greffier dans les huit jours de son prononcé ; que, selon l'article R.661-3, le délai pour interjeter appel d'une telle décision, qui est rendue en matière de liquidation judiciaire, est de huit jours ; qu'en l'espèce, après clôture pour insuffisance d'actif, le 11 mars 2014 de la procédure de liquidation judiciaire de X... N..., le Tribunal de grande instance de BOURGOIN-JALLIEU a été saisi, sur le fondement de l'article L.643-11 du code de commerce, par requête en date du 20 mai 2016, par l'EURL ESSERTENNE en autorisation de reprise de ses poursuites individuelles à l'encontre de X... N... pour recouvrer à son encontre sa créance d'un montant de 32.451,47 euros au titre de sa créance née postérieurement à l'ouverture de la procédure collective le 17 mars 2018 selon une ordonnance de référé rendue le 28 mars [avril] 2009 ; que, par courriers recommandés du greffier en date du 20 mai 2016, X... N... et Maître B... ont été invités à se présenter à l'audience du 7 juin 2016 pour fournir leurs observations sur la requête de l'EURL ESSERTENNE ; qu'à l'issue des débats qui se sont finalement tenus en chambre du conseil le 6 septembre 2016 en présence du Ministère public, le tribunal de grande instance de BOURGOIN-JALLIEU qui a mentionné qu'il lui était demandé de statuer sur le droit de reprise des créanciers et ce, indistinctement, par jugement contradictoire en date du 4 octobre 2016, a : - rappelé que l'EURL ESSERETENNE dispose d'un titre exécutoire lui permettant de poursuivre individuellement X... N..., - déclaré recevable l'action intentée par l'EURL ESSERETENNE, - autorisé la reprise des actions individuelles de tous créanciers à l'encontre de X... N... ; qu'à la diligence du greffier du Tribunal de grande instance de BOURGOIN-JALLIEU le jugement du 4 octobre 2016 a fait l'objet : - d'une publicité le 14 octobre 2016 dans le Courrier Liberté et le 2 novembre 2016 au BODACC, - d'une signification par exploit délivré le 17 octobre 2016 à X... N... avec mention d'un délai de dix jours pour interjeter appel et des modalités de mise en oeuvre de cette voie de recours ; que la signification effectuée à la requête du greffier le 17 octobre 2016 en application de l'article R.643-18 du code de commerce est donc opposable à X... N... et a fait courir le délai d'appel ; qu'ainsi, l'appel interjeté le 7 décembre 2016 par X... N... sera déclaré irrecevable comme tardif, peu important que l'EURL ESSERTENNE ait ensuite fait signifier à nouveau le jugement entrepris par acte du 8 novembre 2016 en mentionnant un délai erroné d'un mois pour relever appel ; que le jugement entrepris doit donc recevoir son plein et entier effet ; »;
Alors, d'une part, que, selon l'article R.643-18 du code de commerce, le jugement autorisant la reprise des actions individuelles de tout créancier à l'encontre du débiteur postérieurement à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif est signifié au débiteur à la diligence du greffier dans les huit jours de son prononcé ; qu'en jugeant que la notification effectuée par le greffe le 17 octobre 2016 était régulière et avait fait courir le délai d'appel, bien qu'il résultât de ses constatations que, le jugement entrepris ayant été prononcé le 4 octobre 2016, sa notification le 17 octobre 2016 ne respectait pas le délai de huit jours précité, de sorte qu'elle était irrégulière et n'avait pu faire courir le délai d'appel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a, dès lors, violé le texte susvisé, ensemble l'article L.643-11 IV du code de commerce ;
Alors, d'autre part et en tout état de cause, que l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités, ne fait pas courir le délai de recours ; que le jugement du tribunal autorisant la reprise des poursuites individuelles sur le fondement de l'article L.643-11 IV du code de commerce est susceptible d'appel dans les conditions de forme et de délai de droit commun ; qu'en considérant comme régulière la notification effectuée par le greffe le 17 octobre 2016, bien qu'il résultât de ses constatations qu'elle mentionnait, non pas le délai d'appel de droit commun, mais le délai de dix jours prévu par l'article R.661-3 du code de commerce, la cour d'appel a violé l'article L.643-11 IV du code de commerce, ensemble l'article 680 du code de procédure civile.

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18 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 décembre 2020, 19-14.437, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 décembre 2020, 19-14.437, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Liquidation judiciaire - Ouverture - Cessation des paiements - Report de la date de cessation des paiements - Impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible - Date d'appréciation - Détermination - Jour auquel est envisagé le report

ANALYSE DE L'ARRET :

Dès lors qu'il résulte des articles L. 631-1 et L. 631-8 du code de commerce que la date de cessation des paiements ne peut être reportée qu'au jour où le débiteur était déjà dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, c'est au jour auquel est envisagé le report de cette date que le juge doit apprécier la situation. Il en résulte que ne peut être incluse dans le passif une dette résultant d'une décision, qui, à la date envisagée, fait encore l'objet d'un recours, la dette étant par ailleurs incertaine

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CH.B


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 9 décembre 2020



Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 738 F-P+B
Pourvoi n° K 19-14.437



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 DÉCEMBRE 2020
La société Axyme, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , en la personne de M. R... V..., agissant en qualité de liquidateur de la société Chiquita compagnie des bananes a formé le pourvoi n° K 19-14.437 contre l'arrêt rendu le 18 octobre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Chiquita Europe BV, dont le siège est [...] ),
2°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, 34 quai des Orfèvres, 75055 Paris cedex 01,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Axyme, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Chiquita Europe BV, après débats en l'audience publique du 20 octobre 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2018), l'administration fiscale a notifié à la société Chiquita compagnie des bananes (la société Chiquita) une proposition de rectification au titre de la TVA, qu'elle a contestée.
2. La société Chiquita a été mise en liquidation judiciaire le 10 novembre 2016. La société EMJ a été désignée liquidateur, puis a été remplacée dans cette fonction par la société Axyme.
3. Le jugement d'ouverture ayant fixé la date de la cessation des paiements au 10 mai 2015, la société Chiquita Europe BV, créancière de la société Chiquita, a formé tierce opposition à ce jugement, du seul chef de la fixation de la date de cessation des paiements. Le tribunal a, sur ce recours, confirmé la date contestée.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le liquidateur fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement et de fixer la date de cessation des paiements de la société Chiquita au 15 décembre 2015, alors :
« 1°/ que seule une créance fiscale contestée dans les conditions de l'article L. 277 du Livre des procédures fiscales et pour laquelle le contribuable a sollicité et obtenu un sursis de paiement peut être exclue du passif exigible ; que la cour d'appel a constaté que la créance fiscale avait fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement le 9 août 2012, que la société Chiquita avait introduit un recours sans assortir ce dernier d'une demande de sursis à paiement ; qu'il se déduisait de ces constatations que la créance fiscale devait être prise en compte dans le passif exigible ; qu'en énonçant cependant, pour refuser de fixer la date de cessation des paiements au 10 mai 2015, que l'absence de demande de sursis à paiement ne rendait pas la créance de l'administration fiscale certaine dès lors qu'un recours devant les juridictions administratives était en cours au moment de la date de cessation des paiements retenue par le tribunal, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 277 du livre des procédures fiscales et l'article L. 631-1 du code de commerce ;
2°/ que c'est au jour où elle statue qu'une cour d'appel, saisie de l'appel d'un jugement statuant sur l'opposition formée contre un jugement ayant fixé la cessation des paiements, doit apprécier le caractère certain d'une créance exigible ; que la cour d'appel a constaté que la créance fiscale avait fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement le 9 août 2012, que la société Chiquita compagnie des bananes avait introduit un recours sans assortir ce dernier d'une demande de sursis à paiement et que le recours avait été rejeté par un jugement du 18 mars 2014, confirmé par un arrêt du 15 décembre 2015 ; qu'il se déduisait de ces constatations qu'au jour où la cour d'appel statuait, la créance fiscale exigible au 9 août 2012 était certaine ; qu'en énonçant cependant, pour refuser de fixer la date de cessation des paiements au 10 mai 2015, qu'à cette date la créance fiscale était exigible mais non certaine, seul l'arrêt du 15 décembre 2015, ayant rendu certaine ladite créance, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 631-1 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
5. Il résulte des articles L. 631-1 et L. 631-8 du code de commerce que la date de cessation des paiements ne peut être reportée qu'au jour où le débiteur était déjà dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Le juge saisi d'une demande de report doit donc, pour apprécier cette situation, se placer, non au jour où il statue, mais à celui auquel est envisagé le report de la date de cessation des paiements. Par ailleurs, ne peut être incluse dans le passif exigible une dette incertaine, comme faisant l'objet d'un recours.
6. Si l'arrêt constate qu'au 10 mai 2015, date retenue par le premier juge, la société Chiquita n'avait pas assorti sa réclamation d'une demande de sursis de paiement, il relève également qu'à cette date, le jugement du tribunal administratif qui avait rejeté son recours faisait l'objet d'un appel. C'est donc à bon droit que la cour d'appel en a déduit que la créance fiscale n'était devenue certaine qu'à la date qu'elle a retenue du 15 décembre 2015, correspondant au prononcé de l'arrêt de la cour administrative d'appel.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Axyme, en qualité de liquidateur de la société Chiquita compagnie des bananes, aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Axyme.
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR fixé la date de cessation des paiements de la société Chiquita Compagnie des Bananes au 15 décembre 2015 ;
AUX MOTIFS QUE la cour constate que seule la date d'exigibilité du passif est contestée ; qu'il ressort des pièces produites aux débats que la société Chiquita a fait l'objet d'un redressement fiscal portant sur la TVA d'un montant de 797.916 euros le 13 juillet 2011 ; qu'un avis de mise en recouvrement a été délivré le 9 août 2012, reçu le 14 août 2012 ; que la société Chiquita a introduit un recours contre ce redressement ; que le tribunal administratif de Paris a rejeté la requête par jugement du 18 mars 2014 ; que le jugement a été confirmé par arrêt de la cour administrative d'appel le 15 décembre 2015 ; qu'il n'est pas contesté que la société Chiquita n'a pas demandé le sursis au paiement du redressement ; que l'absence de demande de sursis à paiement ne rend toutefois pas la créance de l'administration fiscale certaine dès lors qu'un recours devant les juridictions administratives était en cours au moment de la date de cessation des paiements retenue par le tribunal ; qu'en effet, il est de jurisprudence constante qu'une créance constatée par une décision exécutoire par provision mais frappée d'appel ne présentait pas de caractère certain ; qu'il en est de même d'un avis de mise en recouvrement dont l'exécution n'a pas été suspendue dès lors que la décision à l'origine de cet avis est régulièrement contestée devant le juge compétent ; qu'en revanche la créance de l'administration fiscale est devenue certaine dès l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 15 décembre 2015 ; que le jugement sera donc infirmé et il convient donc de reporter la date de cessation des paiements au 15 décembre 2015 ;
1/ ALORS QUE seule une créance fiscale contestée dans les conditions de l'article L. 277 du Livre des procédures fiscales et pour laquelle le contribuable a sollicité et obtenu un sursis de paiement peut être exclue du passif exigible ; que la cour d'appel a constaté que la créance fiscale avait fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement le 9 août 2012, que la société Chiquita avait introduit un recours sans assortir ce dernier d'une demande de sursis à paiement ; qu'il se déduisait de ces constatations que la créance fiscale devait être prise en compte dans le passif exigible ; qu'en énonçant cependant, pour refuser de fixer la date de cessation des paiements au 10 mai 2015, que l'absence de demande de sursis à paiement ne rendait pas la créance de l'administration fiscale certaine dès lors qu'un recours devant les juridictions administratives était en cours au moment de la date de cessation des paiements retenue par le tribunal, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 277 du livre des procédures fiscales et l'article L. 631-1 du code de commerce ;
2/ ALORS subsidiairement QUE c'est au jour où elle statue qu'une cour d'appel, saisie de l'appel d'un jugement statuant sur l'opposition formée contre un jugement ayant fixé la cessation des paiements, doit apprécier le caractère certain d'une créance exigible ; que la cour d'appel a constaté que la créance fiscale avait fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement le 9 août 2012, que la société Chiquita Compagnie des Bananes avait introduit un recours sans assortir ce dernier d'une demande de sursis à paiement et que le recours avait été rejeté par un jugement du 18 mars 2014, confirmé par un arrêt du 15 décembre 2015 ; qu'il se déduisait de ces constatations qu'au jour où la cour d'appel statuait, la créance fiscale exigible au 9 août 2012 était certaine ; qu'en énonçant cependant, pour refuser de fixer la date de cessation des paiements au 10 mai 2015, qu'à cette date la créance fiscale était exigible mais non certaine, seul l'arrêt du 15 décembre 2015, ayant rendu certaine ladite créance, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 631-1 du code de commerce.

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19 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 décembre 2020, 19-20.875, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 décembre 2020, 19-20.875, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Cassation partielle

MOTS CLES DE L'ARRET :

TRANSPORTS ROUTIERS - Marchandises - Contrat de transport - Contrat type - Absence de prévision par les parties - Application à titre supplétif

ANALYSE DE L'ARRET :

L'existence d'un contrat de transport écrit n'exclut pas à elle seule l'application du contrat type général dès lors que, si cette convention est silencieuse sur l'une ou l'autre des matières mentionnées par l'article L. 1432-4 du code des transports, la clause du contrat type s'applique de plein droit à titre supplétif

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 9 décembre 2020



Cassation partielle

M. RÉMERY, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 752 F-P+B
Pourvoi n° G 19-20.875






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 DÉCEMBRE 2020
1°/ la société Mission, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
2°/ la société Helvetia assurances, société anonyme, dont le siège est [...] ,
ont formé le pourvoi n° G 19-20.875 contre l'arrêt rendu le 3 juin 2019 par la cour d'appel de Limoges (chambre économique et sociale), dans le litige les opposant à la société Comptoir des bois de Brive, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Helvetia assurances, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Comptoir des bois de Brive, après débats en l'audience publique du 20 octobre 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société Mission du désistement de son pourvoi.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 3 juin 2019), le 30 novembre 2015, la société Comptoir des bois de Brive (la société CBB), spécialisée dans le commerce de bois, a conclu avec la société Mission une convention cadre de transfert d'engins et matériels forestiers lourds.
3. Le 18 mai 2016, l'engin transporté a été endommagé après que le transporteur eut heurté un pont. Des réserves ont été émises sur la lettre de voiture.
4. Le 1er septembre 2017, la société CBB a assigné la société Mission et l'assureur de celle-ci, la société Helvetia assurances, en réparation de son préjudice.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. La société Helvetia assurances fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande dirigée contre elle par la société CBB, alors « qu'une offre transactionnelle ne caractérise pas en elle-même une reconnaissance de responsabilité interruptive de prescription si aucune mention sur ce point n'a été insérée dans l'acte ; que, pour déclarer non prescrite l'action de la société Comptoir des bois de Brive contre la société Helvetia, la cour d'appel a énoncé que, dans un courrier électronique du 13 avril 2017, le responsable de gestion des sinistres de la société Helvetia a offert une indemnisation à hauteur de 40 962,71 euros et a établi un projet de quittance de sinistre, pour en déduire que l'assureur a reconnu le droit à indemnisation de la société Comptoir des Bois ; qu'en statuant ainsi, sans relever que ce courriel mentionnait une reconnaissance de responsabilité, propre à interrompre la prescription, la cour d'appel a violé l'article 2240 du code civil, ensemble l'article L. 133-6 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
6. C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a retenu que le courrier électronique du 13 avril 2017, dans lequel la société Helvetia assurance offrait une indemnisation à hauteur de 40 962,71 euros et présentait un projet de quittance de sinistre, valait reconnaissance du droit à indemnisation de la société CBB, ce dont elle a exactement déduit qu'il avait interrompu la prescription de l'action en paiement.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
8. La société Helvetia assurances fait grief à l'arrêt de la condamner à régler à la société CBB la somme totale de 62 442,07 euros HT, assortie des intérêts au taux légal, alors « que le contrat type applicable aux transports publics routiers de marchandises pour lesquels il n'existe pas de contrat type spécifique s'applique de plein droit, à défaut de convention écrite sur l'ensemble ou certaines des matières mentionnées à l'article 8-II de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ; que, pour condamner la société Helvetia à réparer l'entier préjudice subi par la société Comptoir des bois de Brive, la cour d'appel a énoncé que le transport litigieux est intervenu dans le cadre de la convention cadre de transfert d'engins du 30 novembre 2015, modifiée par avenant du 21 décembre 2015, conclue avec la société Mission, l'existence de cette convention spécifique excluant l'application de plein droit du contrat type, de sorte que l'assureur n'est pas fondée à invoquer la limitation du droit à réparation de la société Comptoir des Bois ; qu'en statuant ainsi, sans relever que les parties à cette convention avaient expressément exclu l'application des limites d'indemnisation instituées par l'article 21 du contrat type général, la cour d'appel a violé l'article 1er, alinéa 3 de l'annexe du décret n° 99-269 du 6 avril 1999 portant approbation du contrat type applicable aux transports publics routiers de marchandises pour lesquels il n'existe pas de contrat type spécifique, applicable au litige, ensemble l'article 8-II de la loi du 30 décembre 1982 et l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
9. La société CBB conteste la recevabilité du moyen, comme étant nouveau et mélangé de fait et de droit.
10. Cependant il ressort des conclusions d'appel de l'assureur que, pour le cas où la responsabilité de la société Mission serait retenue, il demandait l'application des limites de réparation légales édictées au contrat type, comme étant applicables de plein droit à l'opération.
11. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles L. 1432 -2 et L. 1432- 4 du code des transports et les articles 1er, alinéa 3 et 21 de l'annexe du décret n° 99-269 du 6 avril 1999 portant approbation du contrat type applicable aux transports publics routiers de marchandises pour lesquels il n'existe pas de contrat type spécifique (« le contrat type général ») :
12. Aux termes du premier de ces textes, tout contrat de transport public de marchandise précise :1° la nature et l'objet du transport ;2° les modalités d'exécution du service tant en ce qui concerne le transport proprement dit que les conditions d'enlèvement et de livraison des objets transportés ;3° les obligations respectives de l'expéditeur, du commissionnaire, du transporteur et du destinataire ;4° le prix du transport, ainsi que celui des prestations accessoires prévues.
En application des deuxième et troisième de ces textes, le contrat type général s'applique de plein droit, à défaut de convention écrite sur l'ensemble ou certaines des matières mentionnées à l'article L. 1432-2 précité.
Et selon le dernier, l'indemnité que le transporteur est tenu de verser pour la réparation de tous les dommages justifiés dont il est légalement tenu pour responsable, résultant de la perte totale ou partielle ou de l'avarie de la marchandise, est calculée selon certaines modalités en fonction notamment du tonnage des envois. Toutefois, le donneur d'ordre a toujours la faculté de faire une déclaration de valeur qui a pour effet de substituer le montant de cette déclaration au plafond de l'indemnité fixée en application de ces dispositions.
13. Pour condamner la société Helvetia au paiement d'une certaine somme, l'arrêt retient que les parties ont établi le 30 novembre 2015 une convention écrite intitulée « Convention cadre de transfert d'engins », modifiée par un avenant du 21 décembre 2015 portant sur le tarif appliqué et la désignation de l'assureur du transporteur, et en déduit que, le transport litigieux étant intervenu dans ce cadre, l'existence de cette convention spécifique exclut l'application de plein droit du contrat type prévu par le décret précité.
14. En statuant ainsi, alors que l'existence d'une convention écrite n'exclut pas à elle seule l'application du contrat type général dès lors que, si cette convention est silencieuse sur l'une ou l'autre des matières mentionnées par l'article L. 1432-4 du code des transports, la clause du contrat type s'applique de plein droit à titre supplétif, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que les parties étaient convenues de la fixation de l'indemnité, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il condamne la société Helvetia assurances à payer à la société Comptoir des bois de Brive la somme de 62 442,07 euros HT, assortie des intérêts au taux légal, l'arrêt rendu le 3 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne la société Comptoir des bois de Brive aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Helvetia assurances.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la demande de la société Comptoir des bois de Brive dirigée contre la société Helvetia assurances recevable,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la prescription, il résulte des dispositions de l'article L. 133-6 alinéas 1 et 3 du code du commerce que les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d'un an, sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélité et que le délai de ces prescriptions est compté, dans le cas de perte totale, du jour où la remise de la marchandise aurait dû être effectuée, et, dans tous les autres cas, du jour où la marchandise aura été remise ou offerte au destinataire ; que, par ailleurs, l'article 2240 du code civil prévoit que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrit interrompt le délai de prescription ; qu'en l'espèce, il est indiqué sur la feuille de voiture dans la partie réservée au destinataire que la livraison a été effectuée 18 mai 2016 à 14h30 et le signataire (a) mentionné les réserves suivantes : « le porteur est hors service avec des réserves éventuelles après expertise » ; qu'au vu des mentions manuscrites précédant la signature de son préposé, la société Comptoir des Bois ne peut soutenir l'absence de livraison de l'engin et, dans ces conditions, la date du 18 mai 2016 constitue le point de départ du délai de prescription ; que la société Comptoir des Bois a fait assigner la société Mission le 12 septembre 2017 et la société Helvetia assurances le 1er septembre 2017, soit plus d'un an après la remise de l'engin ; que, toutefois, dans un courrier électronique du 13 avril 2017, le responsable de gestion des sinistres de la société Helvetia Assurances a offert une indemnisation à hauteur de 40 962,71 euros et a établi un projet de quittance de sinistre ; qu'il se déduit de ce document que l'assureur a reconnu le droit à indemnisation de la société Comptoir des Bois et il importe peu que cette reconnaissance apparaisse dans un écrit adressé au courtier de la société Comptoir des Bois et non à cette dernière directement ; que cette reconnaissance a interrompu la prescription à l'égard de l'assureur le 13 avril 2017 et a fait courir un nouveau délai d'un an à compter de cette date, conformément aux dispositions des articles 2231 et 2240 du code civil ; que la société Comptoir des Bois ayant assigné en justice la société Helvetia Assurances avant le 13 avril 2018, son action n'est pas prescrite à l'encontre de cette dernière ; qu'en revanche, cette même reconnaissance ne peut produire d'effet interruptif à l'égard de la société Mission que si la société Helvetia Assurances a agi en qualité de mandataire de celle-ci ; qu'or, en l'espèce, il n'est ni établi ni allégué que la société Helvetia Assurances était le mandataire de la société Mission. Dans ces conditions, le courrier électronique du 13 avril 2017 ne peut avoir eu d'effet interruptif de prescription à son égard ; que, par ailleurs, la société Comptoir des Bois ne peut invoquer une fraude en faisant valoir que la société Mission et son assureur ont organisé une procédure d'évaluation et des propositions indemnitaires afin de l'empêcher de faire valoir ses droits en temps utile alors que rien ne lui interdisait d'agir en justice à titre conservatoire ; qu'il apparaît donc que l'action mise en oeuvre par la société Comptoir des Bois est prescrite à l'égard de la société Mission et recevable à l'égard de la société Helvetia Assurances ; que la décision des premiers juges sera réformée de ce chef » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « () ; que, surtout, le tribunal retient essentiellement que la proposition chiffrée d'indemnisation de la Cie Helvetia envoyée par mail le 13 avril 2017 (pièce n° 17) à la société Comptoir des bois d'un montant de 40 462,71 euros HT, vaut reconnaissance de responsabilité ; qu'en application de l'article 2240 du code civil et conformément à une jurisprudence constante, la reconnaissance du droit du réclamant interrompt la prescription ; que le tribunal considère donc que la SNC Comptoir des bois est fondée à se prévaloir d'un nouveau délai de prescription d'un an à compter du 13 avril 2017 ; que la partie adverse n'oppose par ailleurs aucun élément à cette argumentation ; que, par conséquent, le tribunal constate que l'assignation engagée en date du 1er septembre 2017 est parfaitement recevable et non prescrite » ;
ALORS QU'une offre transactionnelle ne caractérise pas en elle-même une reconnaissance de responsabilité interruptive de prescription si aucune mention sur ce point n'a été insérée dans l'acte ; que, pour déclarer non prescrite l'action de la société Comptoir des bois de Brive contre la société Helvetia, la cour d'appel a énoncé que, dans un courrier électronique du 13 avril 2017, le responsable de gestion des sinistres de la société Helvetia a offert une indemnisation à hauteur de 40 962,71 euros et a établi un projet de quittance de sinistre, pour en déduire que l'assureur a reconnu le droit à indemnisation de la société Comptoir des Bois ; qu'en statuant ainsi, sans relever que ce courriel mentionnait une reconnaissance de responsabilité, propre à interrompre la prescription, la cour d'appel a violé l'article 2240 du code civil, ensemble l'article L. 133-6 du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Helvetia assurances à régler à la SNC Comptoir des bois de Brive la somme totale de 62 442,07 euros HT, assorties des intérêts au taux légal,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur le fond, selon l'article L. 133-1 du code du commerce, le voiturier est garant de la perte des objets à transporter, hors les cas de la force majeure et des avaries autres que celles qui proviennent du vice propre de la chose ou de la force majeure ; qu'en l'espèce, le dommage provoqué au porteur forestier est la conséquence de la percussion d'un pont autoroutier lors du transport effectué par la société Mission ; qu'il est donc constant que la cause du dommage ne résulte ni d'un vice propre de l'engin, ni de la force majeure ou d'une faute du cocontractant qui constitue les seules causes d'exonération possible pour le transporteur ; que, par ailleurs, il est constant que le dommage n'existait pas au moment de la prise en charge par le transporteur ; que la responsabilité de la société Mission est donc engagée et, dans ces conditions, la société Helvetia Assurances, ès qualités d'assureur du transporteur, doit sa garantie ; que, s'agissant du montant de l'indemnisation, la société Helvetia Assurances sollicite l'application des limites de réparations légales édictées au contrat type prévu par le décret n° 99-269 du 6 avril 1999 modifié portant approbation du contrat type applicable aux transports publics routiers de marchandises pour lesquels il n'existe pas de contrat type spécifique ; que l'article L. 1432-4 du code des transports prévoit qu'à défaut de convention écrite et sans préjudice de dispositions législatives régissant les contrats, les rapports entre les parties sont, de plein droit, ceux fixés par les contrats-types prévus à la section 3 ; qu'or, en l'espèce, les parties ont établi le 30 novembre 2015 une convention écrite intitulée « Convention cadre de transfert d'engins », modifié par avenant du 21 décembre 2015, cet avenant portant sur le tarif appliqué et la désignation de l'assureur du transporteur ; que le transport litigieux est intervenu dans le cadre de cette convention et l'existence de cette convention spécifique exclut l'application de plein droit du contrat type prévu par le décret précité ; que la société Helvetia Assurances n'est donc pas fondée à invoquer cette limitation du droit à réparation de la société Comptoir des Bois ; que les travaux de remise en état du porteur forestier se sont élevés à 51 978,07 euros HT ; que ces travaux correspondent à l'évaluation de l'expertise réalisée par la société Aumarex, expert désigné par la société Helvetia assurances, qui avait retenu une évaluation de 52 348,85 euros hors vétusté, étant précisé que le propriétaire du véhicule a droit à la réparation intégrale de son dommage ce qui exclut la prise en compte de la vétusté ; que, par ailleurs, la société Comptoir des Bois a dû supporter les frais de location durant l'immobilisation de son engin ainsi que des frais de transport pour le récupérer après réparation. Les frais de location se sont élevés à 9 324 euros HT et les frais de transport à 1 140 euros ; que la décision des premiers juges sera donc confirmée en ce qu'ils ont condamné l'assureur à payer à la société Comptoir des Bois la somme de 62 442,07 euros » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « sur l'indemnisation, le chauffeur de la SARL Mission a commis une faute en modifiant son itinéraire pour emprunter l'autoroute A20 ; qu'il appartient donc à la SARL Mission et sa compagnie d'assurances de garantir la société Comptoir des bois contre les risques et préjudices engendrés en conséquence de la mission de transport qui lui a été confiée ; que l'article 10 de la convention cadre de transfert d'engins du 30 novembre 2015 (pièce n° 1), signée entre la SARL Mission et le Comptoir des bois, précise, que « le transporteur assume l'entière responsabilité des risques liée à l'exécution du contrat de transport et s'engage à souscrire une ou plusieurs police d'assurances le garantissant contre ces risques » ; que, sur la base de ce contrat, le tribunal écarte les divers arguments de limitations et plafonnements d'indemnisation soulevés en défense par la SARL Mission et la Cie Helvetia et les considère inapplicables en l'espèce ; que, par conséquent, à la lecture des pièces versées au dossier et aux dires du rapport d'expertise Aumarex du 13 décembre 2016, le tribunal estime justifiées les demandes de paiement des sommes suivantes au profit de la société requérante : - 51 978,07 euros HT correspondant à la facture Komatsu du 29 septembre 2016 de remise en état de l'engin sinistré (pièces détachées, main d'oeuvre, fourniture d'atelier), - 9 324 euros HT au titre des frais de location d'un engin de substitution suite au sinistre, correspondant aux factures du 17 août 2016 (4 770 euros HT), du 9 septembre 2016 (2 340 euros HT), du 29 septembre 2016 (2 682 euros HT) et à l'avoir du 12 octobre 2016 (468 euros HT), - 1 140 euros HT correspondant au montant payé au transporteur suite au transfert d'engin à la sortie de l'atelier Komatsu » ;
ALORS QUE le contrat type applicable aux transports publics routiers de marchandises pour lesquels il n'existe pas de contrat type spécifique s'applique de plein droit, à défaut de convention écrite sur l'ensemble ou certaines des matières mentionnées à l'article 8-II de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ; que, pour condamner la société Helvetia à réparer l'entier préjudice subi par la société Comptoir des bois de Brive, la cour d'appel a énoncé que le transport litigieux est intervenu dans le cadre la convention cadre de transfert d'engins du 30 novembre 2015, modifiée par avenant du 21 décembre 2015, conclue avec la société Mission, l'existence de cette convention spécifique excluant l'application de plein droit du contrat type, de sorte que l'assureur n'est pas fondée à invoquer la limitation du droit à réparation de la société Comptoir des Bois ; qu'en statuant ainsi, sans relever que les parties à cette convention avaient expressément exclu l'application des limites d'indemnisation instituées par l'article 21 du contrat type général, la cour d'appel a violé l'article 1er, alinéa 3 de l'annexe du décret n° 99-269 du 6 avril 1999 portant approbation du contrat type applicable aux transports publics routiers de marchandises pour lesquels il n'existe pas de contrat type spécifique, applicable au litige, ensemble l'article 8-II de la loi du 30 décembre 1982 et l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

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20 / Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 décembre 2020, 19-17.579, Publié au bulletin -
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Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 décembre 2020, 19-17.579, Publié au bulletin

SENS DE LA DECISION : Rejet

MOTS CLES DE L'ARRET :

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Redressement judiciaire - Période d'observation - Créanciers - Déclaration des créances - Relevé de forclusion - Domaine d'application - Créances ne bénéficiant pas du régime de faveur

ANALYSE DE L'ARRET :

Il résulte de la combinaison des articles L. 622-24, alinéa 6, et L. 622-17, I, du code de commerce, que les créances postérieures au jugement d'ouverture et qui ne sont pas nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période et qui, ainsi, n'ont pas vocation à être payées à leur échéance, peuvent donner lieu au relevé de la forclusion prévu par l'article L. 622-26 de ce code

DECISION :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 9 décembre 2020



Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 755 F-P+B
Pourvoi n° A 19-17.579



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 DÉCEMBRE 2020
Mme G... S..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° A 19-17.579 contre l'arrêt rendu le 17 mai 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre A), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. T... C... , domicilié [...] ,
2°/ à M. A... Y..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire à l'exécution du plan de redressement judiciaire de Mme G... S...,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de Mme S..., après débats en l'audience publique du 20 octobre 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 mai 2018), Mme S... a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 17 mai 2016, M. Y... étant désigné en qualité de mandataire judiciaire. Cette décision a été publiée au BODACC le 10 juin 2016.
2. Exposant que, par un jugement du 30 mai 2016, la résolution du contrat qu'il avait conclu avec Mme S... avait été prononcée, et que celle-ci avait été déboutée de sa demande en paiement et condamnée à lui verser la somme de 500 euros à titre d'indemnité de procédure, M. C... a présenté le 5 décembre 2016 une requête en relevé de forclusion en vue de déclarer la créance correspondante.
3. Par une ordonnance du 20 mars 2017, le juge-commissaire a fait droit à cette requête.
4. Le 9 octobre 2017, le tribunal a rejeté le recours formé par Mme S....
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Mme S... fait grief à l'arrêt de confirmer ce jugement, alors « que le fait générateur des créances de dépens et d'article 700 du code de procédure civile est la décision qui les alloue ; qu'en considérant que la créance de frais irrépétibles invoquée par M. C... au soutien de sa requête en relevé de forclusion entrait dans le champ des dispositions de l'article L. 622-26 du code de commerce, cependant que cette créance a été fixée par un jugement du tribunal de commerce de Fréjus du 30 mai 2016, donc par décision postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective de Mme S... en date du 17 mai 2016, de sorte que cette créance postérieure n'entrait pas dans le champ du texte susvisé, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 622-26 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte de la combinaison des articles L. 622-24, alinéa 6, et L. 622-17, I, du code de commerce, que les créances postérieures au jugement d'ouverture et qui ne sont pas nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période et qui, ainsi, n'ont pas vocation à être payées à leur échéance, peuvent donner lieu au relevé de la forclusion prévu par l'article L. 622-26 de ce code.
7. Ayant relevé que le jugement du 30 mai 2016 invoqué par M. C... au soutien de sa requête en relevé de forclusion faisait suite à une ordonnance d'injonction de payer du 19 mars 2015 et portait sur un litige relatif à un contrat antérieur à l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir que la créance d'indemnité de procédure, certes postérieure à cette ouverture, ne pouvait être née pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, en a exactement déduit que, cette créance devant être déclarée, son titulaire pouvait demander à être relevé de la forclusion qu'il avait encourue.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme S... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme S... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille vingt.MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme S....
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur l'appel interjeté en l'attente de la décision à intervenir sur le recours en révision formé par Mme S... à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Fréjus du 30 mai 2016 et d'avoir, confirmant le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 9 octobre 2017 ayant confirmé l'ordonnance du juge-commissaire du 20 mars 2017, relevé M. T... C... de la forclusion encourue ;
AUX MOTIFS QU' en vertu de l'article L. 622-26 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 12 mars 2014 applicable au litige « A défaut de déclaration dans les délais prévus à l'article L 622-24, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et les dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ou qu'elle est due à une omission du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L 622-6. Ils ne peuvent alors concourir que pour les distributions postérieures à leur demande. L'action en relevé de forclusion ne peut être exercée que dans le délai de six mois. Ce délai court à compter de la publication du jugement d'ouverture ou, pour les institutions mentionnées à l'article L 3253-14 du code du travail, de l'expiration du délai pendant lequel les créances résultant du contrat de travail sont garanties par ces institutions. Pour les créanciers titulaires d'une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié, il court à compter de la réception de l'avis qui leur est donné. Par exception, si le créancier justifie avoir été placé dans l'impossibilité de connaître l'obligation du débiteur avant l'expiration du délai de six mois, le délai court à compter de la date à laquelle il est établi qu'il ne pouvait ignorer l'existence de sa créance » ; que sur requête déposée par Mme S... exerçant sous l'enseigne commerciale FLATH (Formation Loisirs Analyses Tourisme Hôtellerie) une activité de formation professionnelle à l'hygiène en boucherie charcuterie, il a été fait injonction à M. C... , gérant de la boucherie Salam Viandes, inscrit pour suivre cette formation de 16 heures, par ordonnance du président du tribunal de commerce de Fréjus en date du 19 mars 2015, de régler à Mme S... la somme de 1.148,16 € au titre d'une facture impayée ; que sur opposition formée par M. C... à cette ordonnance qui lui a été signifiée le 24 avril 2015, par jugement du 30 mai 2016 non versé aux débats par l'appelante, Mme S... a été déboutée de sa demande de condamnation de M. C... au paiement de la somme de 1.148,16 € et condamnée à lui verser une somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ; que cette décision est définitive faute pour Mme S... d'en avoir fait appel ; qu'elle expose avoir déposé le 20 novembre 2017, un recours en révision et solliciter la rétractation de ce jugement ; qu'elle demande à la cour de surseoir à statuer sur l'appel formé le 25 octobre 2017 à l'encontre du jugement ayant rejeté son recours contre l'ordonnance du juge-commissaire ayant relevé M. C... de la forclusion encourue ; que toutefois, la décision à intervenir sur le recours en révision ne peut avoir d'incidence sur l'action en relevé de forclusion engagée par M. C... , mais seulement sur la vérification et l'admission de la créance déclarée par ce dernier au passif du redressement judiciaire de Mme S... ; qu'elle sera par conséquent déboutée de ce chef de demande ; qu'il n'est pas contesté, et résulte des termes du jugement attaqué, que M. C... a saisi le juge commissaire d'une requête en relevé de forclusion le 5 décembre 2016, soit dans le délai de six mois de la publication au Bodacc du jugement d'ouverture de la procédure collective de Mme S... ; qu'il n'est pas non plus contesté que Mme S... n'a pas mentionné l'existence de la créance détenue par M. C... suite au jugement du 30 mai 2016 sur la liste des créanciers remise au mandataire judiciaire ; que le juge commissaire, puis le tribunal, ont dès lors considéré à bon droit que la défaillance de M. C... n'était pas due à son fait mais à l'omission volontaire de Mme S... ; qu'il n'appartient pas à la cour, saisie de l'appel sur la demande de relevé de forclusion présentée par M. C... , de statuer sur l'admission ou le rejet de la créance déclarée par ce dernier ; que Mme S... est par conséquent déboutée de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, et que le jugement attaqué, ayant confirmé l'ordonnance du juge commissaire en toutes ses dispositions, est lui-même confirmé ;
ALORS QUE le fait générateur des créances de dépens et d'article 700 du code de procédure civile est la décision qui les alloue ; qu'en considérant que la créance de frais irrépétibles invoquée par M. C... au soutien de sa requête en relevé de forclusion entrait dans le champ des dispositions de l'article L. 622-26 du code de commerce, cependant que cette créance a été fixée par un jugement du tribunal de commerce de Fréjus du 30 mai 2016, donc par décision postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective de Mme S... en date du 17 mai 2016, de sorte que cette créance postérieure n'entrait pas dans le champ du texte susvisé, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 622-26 du code de commerce.

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